13 mai 2025 | 60 ans plus tard, La Balance penche du bon côté pour les Harkis d’Avignon

Ecrit par Laurent Garcia le 12 mai 2025

60 ans plus tard, La Balance penche du bon côté pour les Harkis d’Avignon

Le quartier de La Balance à Avignon figure parmi les 37 nouveaux lieux reconnus par la Commission nationale indépendante pour les Harkis (CNIH) au titre de la réparation nationale envers les Harkis dans le cadre de la loi du 23 février 2022. Dans la région Arles, Manosque, Nice ainsi que Montpellier et Perpignan sont aussi concernés par cette décision.

Le gouvernement vient de valider la proposition de la CNIH d’intégrer 37 nouveaux sites à la liste des structures ouvrant droit à réparation, dans le cadre de la loi du 23 février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les Harkis. Parmi ces lieux, on retrouve le bidonville du quartier de la Balance à Avignon où de nombreuses familles de Harkis vivront dans les années 1960 dans des logements insalubres.

Un quartier en délabrement
Le préfet de Vaucluse écrivait alors dans un rapport au Premier ministre en 1960 que ce quartier du centre‑ville était « très dégradé, abandonné par ses propriétaires qui ont naguère fermé portes et fenêtres pour ne pas payer l’impôt, insalubre et même dangereux à cause des risques d’effondrement ». Ainsi, sur les 824 logements du quartier de la Balance, 429 étaient insalubres, en raison notamment des inondations. Le rapport du préfet de l’époque mentionne également que ce quartier est devenu « un refuge de nomades et de marginaux ».

Crédit : collection Michel Bourgues-DR

« Un refuge de nomades et de marginaux »

Le préfet de Vaucluse de l’époque

Pas d’eau, pas d’électricité, pas de chauffage…
À la suite de la suppression des maisons closes et en raison du nombre de logements vacants, « on décida d’y concentrer des familles gitanes ». Comme dans d’autres villes du sud de la France, on y trouve également à partir de 1962 des Harkis, qui y vivent sans eau, sans électricité ni chauffage, dans des appartements aux portes et fenêtres qui ne ferment pas. Les familles de Harkis (environ 150 personnes selon le CNIH) se regroupent par communauté et vivent dans des appartements situés principalement rue Ferruce, rue de la Grande Frusterie et rue de la Juiverie d’octobre 1962 à octobre 1966.
Les personnes susceptibles d’y avoir séjourné et leurs descendants pourront prochainement entamer des démarches de réparation auprès du service départemental de l’Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG), dès que le cadre réglementaire sera finalisé.

Par la suite ce quartier fut détruit dans le cadre d’une opération menée par la SEM Citadis (voir encadré en fin d’article), et les populations gitanes et harkis furent relogées dans deux quartiers distincts situé dans la cité Beau Soleil dans le secteur de Monclar qui fait déjà partie depuis 2023 des premiers quartiers choisis par la CNIH ouvrant droit à des dispositifs de réparation. Dans la région Arles (Le Mas Fondu), Manosque (Cité du Saint-Martin) et Nice ‘Bidonvilles : Digue des Français, Montagne ainsi que Saint-Roch) sont aussi concernés par cette décision. Dans le reste du grand Sud on trouve également Montpellier (Cité Redon et Zoo de Lunaret) et Perpignan (Bidonville de la cité Bellus – actuel Nouveau Logis).
Jusqu’à 6 000 personnes supplémentaires pourraient être indemnisées à la suite de leur passage dans l’un de ces sites. A ce jour, depuis sa création en 2022, la vingtaine de membres de la commission a traité plus de 27 000 dossiers pour un montant de près de 176M€.

« Le quartier de la Balance fait désormais pleinement partie de l’histoire nationale des Harkis et de la mémoire collective. »

Jean-Baptiste Blanc, sénateur de Vaucluse

« La reconnaissance du quartier de la Balance dans notre département de Vaucluse est une avancée majeure, souligne Jean-Baptiste Blanc, sénateur de Vaucluse, qui a été un des premiers élus locaux à réagir. Elle constitue un geste fort de justice et de mémoire, envers celles et ceux qui, après avoir servi la France, ont été relégués dans des conditions indignes sur notre sol. »
« Je tiens à saluer l’engagement de la Commission, des associations et de tous ceux qui ont contribué à faire émerger cette reconnaissance, poursuit le parlementaire. Le quartier de la Balance fait désormais pleinement partie de l’histoire nationale des Harkis et de la mémoire collective. »

L.G.

La Balance : une volonté de sauvegarde du patrimoine à l’origine de la loi Malraux
La Société d’équipement du département de Vaucluse (SEDV) est officiellement née le 3 mars 1960. Henri Duffaut, maire d’Avignon est alors élu président et Jean Garcin, président du conseil général, est désigné vice-président. Le conseil d’administration de l’ancêtre de Citadis lui assigne comme objectif prioritaire de réaliser la ZUP d’Avignon et de rénover la balance. Autrement dit de démolir ce quartier insalubre mais très vite autour de la Balance des voix s’élèvent contre cette atteinte au patrimoine.
Cela tombe bien, à l’autre bout de la France des destructions identiques sont imaginées dans le quartier du Marais à Paris. André Malraux, ministre de la culture de l’époque entend des défenseurs du patrimoine. Il fait voter une loi voter une loi qui porte encore aujourd’hui son nom : grâce à la mise en valeur du patrimoine l’historique elle donne droit à des investissements défiscalisés.
Crédit : Citadis-DR

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