19 avril 2024 | Les jardins de l’abbaye Saint-André, entre rococo et Méditerranée

Ecrit par Linda Mansouri le 22 juillet 2021

Les jardins de l’abbaye Saint-André, entre rococo et Méditerranée

Au cœur de l’enceinte du fort Saint-André qui domine Villeneuve-lez-Avignon, l’abbaye royale de Saint-André ouvre aux visiteurs ses somptueux jardins en terrasses et son palais abbatial.

A l’origine de l’abbaye Saint-André

Au VIe siècle une jeune femme dénommée Casarie se retire dans une grotte au sommet du mont Andaon pour se consacrer à la prière. A sa mort en 586, son tombeau devient un haut lieu de pèlerinage. Une communauté de moines bénédictins s’établit autour de sa sépulture, approuvée au Xe siècle par l’évêque d’Avignon. Les bénédictins dont la puissance s’accroit rapidement, érigent deux églises.

Un lieu rare qui mêle, avec harmonie, l’art des jardins, une mosaïque de patrimoines et l’histoire du Languedoc et de la Provence depuis le VIe siècle. La visite peut être libre ou guidée, du 1er mars au 1er novembre. L’art et la musique s’invitent aussi régulièrement à l’abbaye. Ayant reçu le label “Jardin remarquable” en 2014, les jardins de l’abbaye se déploient entre les vestiges des églises romanes et les tombeaux du VIe siècle: plantes méditerranéennes, oliviers et pins centenaires… Au pied du palais, un parterre de style toscan du XVI, actuellement en restauration, orné de bassins, vases et sculptures longe une pergola couverte de glycines et de roses. Sur les hauteurs du mont Andaon, ces jardins en balcon offrent une vue panoramique sur le Palais des Papes d’Avignon.

©Linda Mansouri

Le jardin italien

C’est réellement à partir de l’installation à Saint-André d’Elsa Kœberlé et de Génia Lioubow que commence l’histoire des jardins. Dès l’après-guerre, les deux amies décident la création d’un jardin sur la partie basse du site, dominée par la grande terrasse édifiée par les bénédictins mauristes au XVIIIe siècle. Un jardin d’inspiration italienne est alors créé de toute pièce. Il se compose, longeant la terrasse, d’une pergola soutenue par des colonnes de pierre aux chapiteaux ouvragés. Cette pergola, initialement plantée de vigne et qui supporte aujourd’hui des glycines et des rosiers de Banks, est complétée sur toute sa longueur par deux massifs en banquettes plantés d’iris, l’ensemble ouvrant largement sur un grand parterre, encadré par deux bassins accompagnés chacun d’une loggia de verdure, avec banc et table de pierre.

©Linda Mansouri

Ce grand parterre est remarquable par sa forme en éventail, par le soin apporté à son dessin, souligné fortement par une bordure de pierre ornementée de fleurons à motifs divers : fleurs de lys, trèfles, spirales… Le jardin italien, conçu en amphithéâtre, est fermé au sud par une ligne de cyprès de Florence. L’ensemble frappe par son originalité et relève à bien des égards, par la reprise de nombreux motifs décoratifs inspirés du langage propre au Roccoco, de l’esthétique du XVIIIe siècle telle qu’elle a été revisitée par l’Art Deco. Ce souci du raffinement décoratif est visible dans de nombreux détails sculptés présents dans le jardin italien et témoignent de la culture artistique de leur créatrices, toutes deux artistes et lettrées.

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Elsa Kœberlé et Génia Lioubow choisissent aussi les statues qui ornent le jardin italien. Au centre de l’hémicycle, Marie-Adélaïde de Savoie, Duchesse de Bourgogne, en Diane, copie d’une statue d’Antoine Coysevox datant de 1710. A l’est, dominant le bassin, une copie d’une statue romaine représentant Polymnie, Muse de l’Art lyrique et de la Rhétorique. Faisant face à Diane, au centre de la pergola, une statue à l’origine inconnue représentant Cérès, déesse de l’agriculture, reconnaissable à sa faux et à la gerbe de blé portée sous le bras gauche. Ce triple patronage de Diane, Polymnie et Cérès souligne et renforce la forte identité féminine de ce jardin, imaginé et créé par deux femmes artistes.

©Linda Mansouri
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Le sentier botanique

Ce sentier botanique de plantes méditerranéennes se devait de répondre aux exigences d’une gestion 100% naturelle et aux nouvelles conditions climatiques, sans oublier le mistral qui balaye souvent ce promontoire rocheux. Un défi relevé par Olivier Ricomini, le jardinier de l’abbaye, à l’origine du projet et la botaniste Véronique Mure, spécialiste des paysages de garrigue et des jardins secs. Le sentier odorant chemine en pente douce depuis la chapelle Sainte-Casarie, puis longe le mur d’enceinte jusqu’aux grandes terrasses qui offrent de ce côté un vaste panorama sur la vallée du Rhône et le mont Ventoux.

©Linda Mansouri
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Le palais abbatial

Lieu stratégique et spirituel, l’abbaye raisonne de nombreux faits historiques. Ermitage de sainte Casarie, monastère bénédictin, Saint-André devient abbaye royale au XIIIe siècle, commandant alors plus de 200 prieurés. Remanié fin XVIIe par l’architecte du Roi, Pierre Mignard, le palais abbatial conserve d’élégantes salles voûtées, un portail et un escalier monumental… Les peintures murales d’Emile Bernard ainsi que de nombreuses collections sont aussi à découvrir lors de la visite guidée.

Abbaye Saint-André, Fort Saint-André, Rue Montée du Fort, 30400 – Villeneuve-lès-Avignon, Téléphone: 04 90 25 55 95, info@abbayesaintandre.fr. Les jardins sont ouverts du mardi au dimanche, de 10h à 18h sans interruption (dernier billet 17h15).

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