20 avril 2024 | Délinquance 2020, tout ce qui s’est dit ! Episode 2

Ecrit par Mireille Hurlin le 18 mars 2021

Délinquance 2020, tout ce qui s’est dit ! Episode 2

Bertrand Gaume, préfet de Vaucluse a présenté les chiffres de la délinquance 2020 avec, à ses côtés, les plus grands acteurs de la sécurité des Parquets d’Avignon et de Carpentras, de la gendarmerie et de la police. Chacun est revenu précisément sur ce qu’il a vécu. Voici ce qu’ils ont dit. 

Bertrand Gaume, Préfet de Vaucluse
«En 2021 nous poursuivrons notre travail de lutte contre les gros trafiquants de stupéfiant. Nous élaborons, le Plan de prévention départemental de la délinquance 2021-2024 pour amplifier les actions mises en œuvre, notamment avec le rapprochement Police-population et aussi avec le Plan 10 000 jeunes –qui propose des stages et des contrats, services civiques en Préfecture, services de Police-. La Maison de la famille située à Carpentras sera inaugurée le 22 mars prochain. Un deuxième intervenant social en gendarmerie sera détaché au profit de l’aide aux victimes, dans le cadre de l’association Amav (Association de médiation et d’aide aux victimes) et cofinancé par Conseil départemental de Vaucluse.»

Philippe Guemas, Procureur de la République près du tribunal judiciaire d’Avignon
«En 2020 nous avons reçu 30 000 procédures judiciaires contre 27 000 l’an passé. L’activité est restée soutenue malgré les confinements, dont le 1er de mars à mai et alors qu’auparavant, à partir de mi-décembre jusqu’au début du confinement (Ndlr : 17 mars 2020), nous avions été impactés par la grève des avocats. Cela avait eu pour effet de renvoyer la majorité des audiences correctionnelles et de la Cour d’Assise. Clairement, nous n’avons rien pu juger de janvier jusqu’à la mi-mai 2020. Lors du 2e confinement nous avions retrouvé une activité tout à fait normale. Concernant la criminalité, nous relevons l’absence de féminicide et de règlement de compte mortel au cours de l’année passée.»

« Restons vigilants »

Au chapitre du trafic de stupéfiant 
«Beaucoup de bandes ont été démantelées, des têtes de réseaux mises hors d’état de nuire et écrouées. Les saisies d’armes de guerre par la Police judiciaire ont désarmé les bandes en question. S’il n’y a pas eu de règlement de comptes en 2020, nous ne sommes pour autant pas à l’abri de cette question, comme nous le rappelle les faits intervenus de l’autre côté du Rhône,» (Ndlr : le 25 février fusillade à Villeneuve-lès-Avignon, à proximité du lycée Jean Vilar, un homme de 26 ans est criblé de 12 balles devant son domicile. Il était sorti de prison en décembre 2019 et était lié au trafic de stupéfiant. Il était originaire du quartier Monclar à Avignon).
La violence intrafamiliale
«La violence intrafamiliale reste une préoccupation même si elle n’a pas été constatée dans le ressort d’Avignon lors du 1er confinement. Le bracelet anti-rapprochement (Bar) sera mis en place cette année. Le principe ? Le contrevenant est équipé d’un bracelet couplé à un téléphone remis à la victime. En cas de rapprochement le contrevenant est averti qu’il doit prendre de la distance tandis que la victime est immédiatement prévenue de ce rapprochement ainsi que les services de la Police et de la Gendarmerie.»

« La forte impulsivité et la violence semblent se renforcer sur ce département et particulièrement à Carpentras »

Pierre Gagnoud, Procureur de la République près du tribunal judiciaire de Carpentras
«Le Parquet de Carpentras a enregistré 13 600 plaintes et dénonciations contre 16 000 en 2019. La délinquance, lors du 1er confinement a chuté de 60%. Cependant la baisse de la délinquance est un peu en trompe l’œil car il y a eu des phénomènes de rattrapage après le 1er confinement et il y en aura au cours de l’année 2021. Il faudra rester extrêmement vigilants et prudents. Une fois le diagnostic établi, il faut se donner les moyens d’actions. Les structures criminelles vivent actuellement de nouveaux équilibres instables, dans le cadre des enquêtes menées par le Parquet et dirigées par le juge d’instruction de Carpentras. Des opérations importantes ont été menées par la Police judiciaire et la Sécurité publique particulièrement sur la cité du Pous du plan et des Amandiers à Carpentras, entraînant la chute de certains leaders et de leurs équipes. Les équilibres ont été modifiés et les cartes redistribuées. Ainsi, si l’année 2020, en termes de règlements de comptes a été exceptionnelle, les derniers événements qui se sont déroulés à la Cité Verte (Ndlr : tirs sur des voitures sur fond de trafic de drogue dimanche 20 janvier 2021), montrent l’implantation ou le développement de nouveaux territoires. Des armes de guerre ont été saisies dans des caches et sur des individus circulant sur la voie publique à pied ou en véhicules, ce qui induit des actes préparatoires ce qui aurait pu faire chuter les règlements de comptes.»
La violence
«La forte impulsivité et la violence semblent se renforcer sur ce département et particulièrement à Carpentras. La crise sanitaire a exacerbé ces comportements asociaux et cette brutalité, violence verbale et physique, particulièrement face aux personnes qui représentent l’autorité ou l’institution comme la police, la gendarmerie et les pompiers (homme auteur de violences conjugales qui se saisit d’une arme et tire sur les pompiers venu le secourir le 25 décembre 2020, chemin Saint-Labre à Carpentras). La violence conjugale réclame l’évaluation du risque, dans ce cadre nous avons mis en place les enquêtes d’évaluation personnalisée des victimes (EVVI) pour en connaître le degré de vulnérabilité. Les enquêtes sont mises en œuvre par l’association de l’aide aux victimes. Évaluation du risque, mesures de protection : téléphone grave danger, bracelet anti rapprochement, développement des contrôles judiciaires, prise en charges des auteurs de violence conjugales après leur sortie de prison et présentations immédiates sont sans doute une partie des dispositifs ayant permis les bons chiffres de l’année 2020.» 

« Nous avons formé 702 personnels à la prise en charge des victimes »

Jean-Christophe Le Neindre Colonel commandant du groupement de la gendarmerie de Vaucluse
«Nous avons constaté 2 113 faits violents d’agression en zone de gendarmerie ce qui tend à une relative stabilité. Nous avons formé nos 702 personnels à la prise en charge des victimes de violences intrafamiliales et constitué, été 2020, une Maison de la confiance et de la protection de la famille à Carpentras, près du centre hospitalier qui dispose d’un pôle médico-judiciaire avec lequel nous travaillons.» Pour faire face à cette ambition la gendarmerie a créé « 5 postes supplémentaires dédiés et créés par la Centrale. Ces 5 personnels sont dédiés à la prévention pour la délinquance juvénile, la violence intrafamiliale, conjugale, l’audition de mineurs victimes, » et le dispositif « est complété d’un appui judiciaire en étroite relation avec le Procureur de la République de Carpentras et l’association Amav (Association de médiation et d’aide aux victimes). Egalement nous avons détaché un intervenant social qui travaillera avec les victimes et les auteurs pour éviter le cercle infernal de la récidive.»
Augmentation des escroqueries par Internet
«Nous observons 1 900 faits d’escroqueries par Internet en 2020, c’est 188 de plus qu’en 2019, soit 11% d’augmentation. Nous avions noté 1 263 faits en 2012. Cela indique que concitoyens, entreprises et administrations sont vulnérables à ce type d’escroquerie. Dans ce cadre et pour apporter notre soutien, nous avons, lors du 1er confinement, constitué le pôle Atl@s (Assistance technique pour les administrations et les sociétés) et avons regroupé dans cette structure des compétences en intelligence économique, sûreté, sécurisation des systèmes d’information ainsi qu’en connaissance des nouvelles technologies. Ce pôle accueille également des experts formés par le GIGN (groupe d’intervention de la gendarmerie nationale), sur la décomplexion (géolocalisation précise de l’utilisateur). Ce pôle est mis à la disposition gracieusement des personnalités et structures qui le souhaitent.»
Augmentation des infractions relevées par l’action des services (Iras)
«Nous notons une augmentation des Iras avec 82 faits. Nous avons intensifié nos actions sur la problématique des stupéfiants en harcelant les points de deal ce qui a porté ses fruits. Nous avons beaucoup occupé le terrain et mené des opérations anti-délinquance, avec une augmentation des personnes mises en garde à vue et notre taux d’élucidation a augmenté de manière générale. Nous nous sommes concentrés sur l’opération nationale #RépondrePrésent, déclinée localement  pendant le 1er confinement nous mettant en lien avec nos aînés, des seniors, vis-à-vis de sociétés, professions plus vulnérables et avons poursuivi cette fonction contact, occupant le terrain et étant en phase avec les préoccupations de la population. Concernant la sécurité routière, nous avons renouvelé notre parc motocycliste, des véhicules rapides d’intervention. Également, nous avons observé des comportements délictuels de sécurité routière avec de très fortes vitesses observées, notamment après les phases de confinement.»  

« Un stock important d’armes a été retiré du secteur ce qui a concouru à stopper les tentatives de règlements de comptes »

Jérémie Bosse Platière commissaire divisionnaire, chef de police judiciaire d’Avignon 
«L’année a été marquée d’une manière très forte par la lutte contre les trafiquants de produits stupéfiants, en particulier sur Carpentras, au Pous du plan à Carpentras et à la Reine Jeanne à Avignon, où des clans ont été démantelés, avec beaucoup de saisie d’armes à feu et notamment des fusils d’assaut, un stock important d’armes a été retiré du secteur ce qui a concouru à stopper les tentatives de règlements de compte. Nous avons dénombré 7 tentatives d’homicides volontaires dans le cadre de ces conflits liés à la prise de différents points de deal par les clans de malfaiteurs et aucun homicide contre 13 tentatives d’homicides et 2 décès en 2019. Nous déplorons des affaires criminelles importantes comme la disparition de la petite Sarah et malheureusement la découverte de son cadavre (Sarah 11, ans morte noyée les mains attachées dans le Rhône près de l’ile Piot, poussée dans l’eau par son père Sergio, 38 ans, le 18 juillet 2020. L’homme avait déjà été condamné pour des faits de violences conjugales et souffrait d’alcoolisme). Le 2e cadavre était celui d’une jeune-femme (Eléa) disparue au cours de l’été 2019 tuée par son compagnon (et retrouvé sur l’ile de la Barthelasse en janvier 2020).»

Jean-Marc Luca, Directeur départemental de la sécurité publique
«Outre la baisse des faits constatés sur le département, le taux d’élucidation a progressé. 840 personnes ont été interpelées pour usage ou trafic de stupéfiant. 134 opérations ciblées ont été menées. Le harcèlement et les agressions sexuelles sont en très nette augmentation. Sur 1 885 faits, 77% d’entre-eux ont fait l’objet d’un dépôt de plainte. Nous avons un fort engagement public avec 64 interventions par 24h en moyenne. Notre taux de résolution des affaires avoisine les 60% sur 253 problématiques.»

https://www.echodumardi.com/dossier/delinquance-2020-tout-ce-qui-sest-dit-episode-2/   1/1