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Dominique Santoni : « Ce que je veux, c’est changer la vie des Vauclusiens »

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Dominique Santoni, présidente du Conseil départemental de Vaucluse a accordé une interview à l’Echo du mardi pour la sortie de la 7e édition de notre hors-série annuel ‘Le Vaucluse en chiffres 2023’. L’occasion pour la première femme à la tête de l’institution départementale d’évoquer le lancement du plan santé où le Département sort de ses compétences habituelles pour répondre aux besoins quotidiens des Vauclusiens. Une volonté qui s’étend à d’autres domaines comme l’attractivité économique, le soutien aux projets d’aménagement des communes, l’audiovisuel, la sécurité… Autant de thèmes que Dominique Santoni entend prendre à bras le corps.

Pourquoi le Département a-t-il lancé son plan santé alors que ce domaine n’est pas de sa compétence ?
« La santé est l’une des principales préoccupations des Vauclusiens, c’est pour cela que j’ai résolument choisi de sortir des sentiers battus pour apporter des solutions concrètes à nos concitoyens qui ne trouvent plus de médecins. Alors oui, la santé ce n’est peut-être pas l’une des compétences du département mais je crois qu’il faut que l’on soit pragmatiques car ce que je veux c’est changer la vie des Vauclusiens. Le plan santé : c’était aussi l’un de nos engagements de campagne que nous allons respecter dès 2023 avec le recrutement de 8 médecins. »

Comment s’articule ce plan ?
« Dans un premier temps, nous avons travaillé sur les zones touchées par la désertification médicale et les priorités de l’ARS (Agence régionale de santé). Aujourd’hui, ce sont donc 4 territoires qui vont être concernés par la phase 1 de ce plan santé : Valréas, Cadenet, Apt et Avignon-Intramuros. »

Avignon touché par la désertification médicale, cela peut paraître surprenant ?
« C’est vrai qu’Avignon, nous ne l’avions pas forcément identifiée au début. Puis on s’est aperçus en travaillant avec le président de l’Ordre des médecins de Vaucluse qu’il y avait une véritable carence dans la cité des papes et plus particulièrement dans l’intra-muros, notamment en raison de problèmes de déplacement et les difficultés de stationnement. Il y a aussi toute une population, notamment de gens âgés, qui ne trouvait plus de médecin. Très bientôt, deux généralistes seront donc installés au sein de l’ancien espace du département et des pays de Vaucluse qui se situe en haut de la place de l’horloge, à côté de l’ancienne Banque de France. Ce lieu a l’avantage d’être visible, central et équipé en accès pour les PMR (Personnes à mobilité réduite). À termes, il y a également la place pour accueillir un troisième médecin sur ce site en cœur de ville. »

« Le local, les réseaux informatiques, le cabinet équipé, l’assistante… On s’occupe de tout.»

Quel est le profil des médecins retenus ?
« Il y a des médecins préretraités qui auraient pu s’arrêter mais qui finalement se disent ‘vous nous donnez la possibilité de continuer à exercer de manière partielle dans des conditions plus favorables’. Nous avons aussi des jeunes médecins qui viennent tenter cette aventure avec la possibilité d’ouvrir ensuite leur propre cabinet. Et puis on a des médecins qui viennent d’ailleurs, particulièrement du Nord de la France qui sont attirés par la qualité de vie. Dans tous les cas, ce qui leur plaît c’est de pouvoir se consacrer pleinement à leur patientèle. Pour cela, le Département les salarie, met à leur disposition le lieu dans lequel ils vont travailler – cela peut être un Espace de solidarité (Edes) comme à Apt début janvier 2023 ou à Valréas. Ce qu’il faut prendre en compte également c’est que les conditions de travail ont évolué et que les médecins qui vont s’installer sur le territoire veulent travailler comme ils l’entendent. Cela veut dire que, parfois, il y aura besoin de 2 médecins pour faire un poste comme cela va être le cas sur Avignon par exemple avec deux mi-temps. Il y en a qui feront des gardes et d’autres qui n’en feront pas. Il y en a qui feront des visites à domicile et d’autres non. Si l’un veut partir en vacances, un autre peut le remplacer. Ils auront une totale liberté et quand on les rencontre c’est ce qui les séduit. Ce qui est intéressant aussi pour eux, c’est que l’on va mettre en place un vrai réseau de santé. C’est-à-dire qu’ils ne vont pas travailler seuls et que, par exemple, il va y avoir une mise en réseau internet leur permettant d’échanger leurs données et de communiquer. Le local, les réseaux informatiques, le cabinet équipé, l’assistante… On s’occupe de tout. Pas besoin non plus de faire de l’encaissement car nous avons un accord avec la Caf. J’insiste, ils ne font que de la médecine et c’est ça qui leur plaît. »

Ce plan santé répond-il à une demande des maires de Vaucluse ?
« Il y avait de leur part une réelle inquiétude qu’ils faisaient remonter régulièrement. Et comme il n’y a pas de mal à s’inspirer de ce qui fonctionne bien dans les autres territoires, nous avons vu le département de Saône-et-Loire où le Conseil départemental assume et conforte son rôle de garant de l’équité territoriale en contribuant activement à rétablir l’égal accès de tous les citoyens aux soins de proximité. Nous sommes le 1er département de la Région Sud à mettre en place un tel dispositif. »

Est-ce que le fait d’avoir été maire auparavant, maire d’Apt en l’occurrence, une commune touchée par ces difficultés d’accès aux soins, vous a sensibilisée davantage à ces problématiques ?
« Certainement, car lorsque l’on débute avec ce mandat de maire, il y a ce côté ‘pied dans la terre’, proximité, on rencontre plein de gens. Encore faut-il aimer les gens et avoir de l’empathie. Mais c’est vrai que c’est un atout de bien connaître les territoires et les maires sont souvent les mieux placés pour cela. Au-delà de ça, cela fait aussi parti de mon ADN : changer la vie des gens. Les Vauclusiens attendent des solutions. Ma satisfaction en tant que politique c’est quand on m’arrête dans la rue pour me dire que ‘c’est bien ce que vous avez fait’. »

Quelles sont les limites que vous vous êtes fixées avec ce plan santé et qu’elles sont les étapes à attendre à l’avenir ?
« Il y a 3 étapes. La première c’est la mise en place de ces 8 généralistes début 2023. Mais nous allons continuer avec l’arrivée de nouveaux médecins dans le courant de l’année afin de mieux quadriller le territoire. À titre comparatif, la Saône-et-Loire compte maintenant plus d’une centaine de médecins. Ensuite, nous envisageons de  faire aussi appel à des spécialistes, qui nous ont déjà sollicités d’ailleurs, comme des dentistes notamment. Parallèlement nous souhaitons créer un bus itinérant dans les territoires où il n’y a pas assez de population pour avoir un docteur comme dans le secteur de Sault. Ce bus avec un véritable médecin traitant offrira un vrai suivi. Enfin il y a aussi le développement de la télémédecine. »

« Les médecins ne veulent plus œuvrer comme hier, il faut s’adapter. »

Justement en ce qui concerne la télémédecine, le Vaucluse a été choisi par la Région comme département pilote pour ce type de suivi en matière de santé, notamment dans le domaine du télédiagnostic ophtalmologique ?
« Pour cela nous travaillons effectivement avec la Région Sud qui nous a apporté un soutien financier important. Alors, même si on sent une certaine réticence concernant le déploiement du télédiagnostic et de la télémédecine, à un moment il faut accepter que le monde change. Les médecins ne veulent plus œuvrer comme hier, il faut s’adapter. Aujourd’hui, il y en a moins et ils veulent travailler différemment. Donc, si on veut être soignés il faut aller vers de nouvelles technologies. Toutefois, la télémédecine ce n’est pas pour tout non plus et cela ne remplacera pas le médecin. Mais dans les domaines de la vision et de la dermatologie par exemple on sait que la télémédecine fonctionne bien. »

D’un point de vue plus ‘technique’ cette possibilité de développement de la télémédecine a été rendue possible par le déploiement du THD (Très haut débit) par le Département ?
« Si on a été choisis par la Région c’est effectivement parce que nous avons été des précurseurs sur le très haut débit en Provence- Alpes-Côte d’Azur. C’est aussi parce que nous avons su être innovants. »

Outre la santé, y a-t-il d’autres outils collectifs que vous souhaitez mettre en place comme Vaucluse ingénierie par exemple ?
« Il y a effectivement plusieurs projets que nous voulons mettre en place au fur et à mesure dans le courant de la mandature. Vaucluse ingénierie est l’un de ceux que nous allons lancer le plus rapidement. Il s’agit d’un nouvel outil destiné aux maires pour identifier les besoins des communes dans le cadre de leur dossier d’aménagement, d’identifier les leviers et les contraintes de leur projet, de travailler sur l’étude de faisabilité, de trouver un AMO (Assistance à maîtrise d’ouvrage)… L’idée c’est d’accompagner les maires dans leur projet alors que l’on s’aperçoit que tout est compliqué pour faire quoi que ce soit. Surtout pour les petites communes. En effet, nous nous sommes rendu compte que certaines d’entre elles ne consomment pas les crédits qui leur sont alloués alors qu’elles ont parfois du mal à boucler leur budget car elles n’arrivent pas à monter les dossiers. »

Concrètement cela se passera comment pour les communes vauclusiennes faisant appel à cette structure ?
« Les maires devront se tourner vers l’équipe de 4 personnes dirigée par Caroline Leuret dont le rôle sera de faire le relais avec les services du département. Dans ce cadre, Vaucluse ingénierie accompagnera ainsi leurs démarches techniques et financières auprès des 23 différents partenaires du département comme le CAUE, la SPL Territoire 84, VPA, l’Aurav, EPF-Paca, les parcs naturels régionaux du Ventoux et du Luberon, le Sdis… »

« Le principe c’est d’accompagner ces communes en proposant un service qu’elles n’auraient pas les moyens de se payer. »


« L’autre avantage, c’est que nous aurons connaissance du projet dès le départ. Cela nous permettra d’aller chercher des financements croisés notamment auprès de la Région ou bien de l’Europe. Le principe c’est d’accompagner ces communes en proposant un service qu’elles n’auraient pas les moyens de se payer. Cette mutualisation du conseil mis à disposition des maires c’était une vraie attente de leur part. Et pour le Département, quand les maires réalisent des projets, l’ensemble des Vauclusiens s’en rend compte. C’est donc notre intérêt d’aller aider les communes. »

Vous travaillez également à l’élaboration d’un plan cinéma ?
« Il est nécessaire de sortir ce département  d’un certain marasme et de constater qu’il y a des écosystèmes qui marcheraient mieux ici qu’ailleurs en étant parfaitement adaptés à notre territoire. L’audiovisuel en fait partie car nous avons tout ce qu’il faut pour pouvoir développer cette forme d’économie sachant que nous avons déjà la base : on a des écoles d’art, l’université, de nombreux studios d’animation… Nous avons la possibilité de former des gens qui s’engageront dans cette industrie, de créer des métiers intéressants qui correspondent à l’air du temps. Cela veut dire aussi que les professionnels de l’audiovisuel ou du cinéma qui viendront ici pour tourner n’auront pas besoin de venir avec leur équipe car il y aura déjà des techniciens sur place, des studios. »
« Dans cette optique, nous voulons renforcer le rôle de la commission du film avec des studios sur Avignon, le Ventoux et le Luberon. Nous souhaitons aussi faire un état des lieux pour savoir ce que nous avons sur le territoire en termes de formations, de studios, de tournages, de vidéastes, de techniciens, d’acteurs… pour savoir ce qui nous manque et par quoi on commence dès 2023. Le Département va également participer financièrement au plan cinéma de la région. Et grâce à VPA qui travaille à l’implantation de nouveaux acteurs sur notre territoire qui en est déjà  bien pourvu, nous allons être un des tout premiers départements en matière de studio d’animation. »

« Nous avons souhaité fédérer les entreprises et les personnalités qui veulent porter les couleurs du Vaucluse. »

Cette année 2022 a aussi été marquée par le lancement de la ‘Team Vaucluse’ ?
« Oui, nous avons effectivement souhaité fédérer les entreprises et les personnalités qui veulent porter les couleurs du Vaucluse, le faire rayonner en France comme à l’international, afin de susciter des implantations d’entreprises et l’installation de talents sur le territoire. C’est l’ambition de la toute nouvelle ‘Team Vaucluse’ et cette mise en réseau des décideurs qui vont désormais avancer sur des thématiques de réflexion et de travail courant 2023. »

La fusion entre Vallis habitat et Grand delta habitat a constitué un autre dossier important de cette année écoulée ?
« J’ai été interpellé par de nombreux maires de Vaucluse sur les grandes difficultés qu’aurait Vallis habitat à remplir tous ses engagements en matière de logement dans les années à venir que ce soit en termes de réhabilitation d’un parc vieillissant, de construction dans les zones carencées ou de réponse à la nouvelle réglementation thermique d’isolation des logements. Nous avons donc choisi de fusionner notre bailleur départemental avec Grand delta habitat, une coopérative vauclusienne qui depuis des années a fait ses preuves dans la gestion du logement social. C’est le choix de l’efficacité et de la modernisation de notre logement social car nous voulons apporter une réponse rapide aux attentes des locataires. »
« Grand delta habitat s’est ainsi formellement engagé dans le cadre de cette fusion à réhabiliter 4 000 logements en 5 ans sur tout le territoire du Vaucluse. C’est considérable ! Cette rénovation est notre priorité car c’est celle des maires comme celle des locataires. Dans le même temps, cette dynamique va également s’accompagner de la construction de logements neufs à travers un engagement de 500 logements neufs par an dans le Vaucluse. »

Votre leitmotiv c’est donc d’agir tout azimut pour le Département ?
« Je pense tout le temps au Département, même la nuit. Il faut aller parfois là où l’on ne nous attend pas mais où je sais qu’il y a un véritable besoin. C’est très important de faire. Les gens attendent des solutions. Ils ont envie d’entendre des choses qui vont leur faire du bien. Bien sûr qu’il y a des choses qui vont mal mais il y a aussi des choses qui vont bien. Dans cette optique, le rôle des politiques c’est de dire où l’on va. Et l’administration dit comment on y va. C’est un travail commun mais il faut effectivement qu’il y ait quelqu’un qui trace un cap. Et je ne cesse de le dire, le mandat de président du Département est un mandat local. Alors au final, il y a ce que l’on veut être et ce que l’on veut faire. Moi j’ai choisi de faire : au département mais aussi avec les maires de Vaucluse. »

Propos recueillis par Laurent Garcia

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