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Immobilier, où en est-on aujourd’hui ? Un expert répond

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Le marché de l’immobilier est, par nature, cyclique. S’il reste une valeur sûre, tout comme l’or, la conjoncture influe énormément sur l’opportunité de s’exécuter ou d’attendre pour acheter comme pour vendre. En un mot, est-ce le moment ?

Plusieurs faits interviennent immédiatement sur le dynamisme du secteur : le nombre et la qualité des biens à la vente dans les secteurs choisis, les taux d’emprunt proposés, le taux de l’inflation, sa propre capacité de remboursement assortie du montant de son apport personnel.

Qu’observe-t-on aujourd’hui ?
Après deuxfastes années post-Covid, 2021 et 2022 particulièrement intenses en termes de changements de vie et donc de résidence, le marché connaît une accalmie en partie due à la remontée des taux bancaires –de 1,5% à 3,87% en moyenne et sans doute 4% en septembre-. Mais pas que, car il est aussi question de la prudence des banques qui suivent la proposition de l’Etat via le Haut conseil de stabilité financière (HCSF) de ramener de 15 à 20% l’endettement des acquéreurs, alors qu’auparavant, en 2020, il était encore de 33%.

Des préconisations étatiques pour protéger les plus modestes
Préconisation qui a éjecté illico les primo-accédants du marché de l’immobilier et les investisseurs que les propositions de l’Etat ne séduisent pas en matière de défiscalisation intéressante et alors que ces derniers sont le principal soutien du parc de logement privé.

Pourquoi ?
Parce que le Covid, puis le confinement, ont bouleversé les ménages –dans le monde et en France- les séparations et les divorces –le taux de divorce a doublé en 5 ans entre 2016 et 2021- 46% des mariages se terminent en divorce- ont bousculé les cartes du relogement. Mais aussi les règlementations avec le Zéro artificialisation nette (ZAN) et l’obligation désormais de construire dans les dents creuses, sur d’anciens sites industriels, ou encore travailler sur le changement de destination de bâtiment. Or, la construction est au plus bas, particulièrement en Vaucluse.

Résultat ?
Le logement, dont le Gouvernement souhaite qu’il se fasse de plus en plus dense et compacte pour ne plus s’étendre sur les espaces naturels et végétalisés, va devenir une denrée rare et signe la fin des maisons avec jardin –c’est-à-dire du rêve Français-. Une décision, également, qui ne va pas manquer de bouleverser la physionomie des villages où les maisons provençales, pour peu qu’elles bénéficient d’un peu de terrain, seront mises à terre, ou les terrains allotis au profit de collectifs de plus en plus hauts, possiblement détonnants dans le paysage.

Qui sont les acheteurs idéaux ?
De fait, les acheteurs idéaux restent les personnes qui ont acquis puis revendus un ou plusieurs biens et qui disposent de liquidités importantes sans avoir vraiment besoin d’un recours à la banque. Ces anciens vendeurs devenus acheteurs –âgés de 40 à plus de 70 ans- peuvent même se payer le luxe de discuter le prix puisqu’ils en ont les moyens.

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En face, quels vendeurs ?
Ils disposeront des biens des vendeurs qui ne peuvent pas jouer la montre pour cause de mutation, de séparation, de départ en Ehpad (Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes)… Bref ne vendront que ceux qui y sont obligés, avec, souvent à la clef, un budget travaux conséquent, levier de la baisse du bien. Et puis il y a la nature du bien par lui-même qui appelle soit à la vie seul ou à deux, soit à la vie de famille, ou encore celle de la famille recomposée qui réclame l’espace et le nombre de chambres nécessaires.

Ceux qui resteront sur le tapis ?
Seront ceux qui auront surestimé la valeur de leur bien, qui auront communiqué sur plusieurs sites internet à des prix différents, qui resteront trop longtemps sur ces mêmes sites, et qui même en baissant les prix auront suscité la méfiance de potentiels acheteurs. « En temps de marché ‘calme’ le bon prix, c’est-à-dire un montant raisonnable reste la meilleure tactique, affirme Hervé Chelly, agent immobilier chez Andaon à Avignon. Enfin, il reste plus logique de vendre son bien avant de se lancer dans un rachat, afin d’éviter le crédit relais et les affres de nuits blanches », prévient-il.

Vendre, acheter, maintenant ou pas ?
«Que le marché soit très haut où très bas, l’un dans l’autre vous achèterez très haut ce que vous aurez vendu, auparavant, très haut, cela ne change pas vraiment la donne puisque vous aurez vendu et acheté en même temps, selon les mêmes lois et exigences du moment. C’est pour le primo accédant et l’investisseur que cela se gâte, car ils devront attendre pour acheter au regard des mensualités qui pourraient se révéler trop importantes. Pourquoi vendre ou acheter maintenant ? Parce qu’il est important de continuer à vivre son projet de vie », ajoute Hervé Chelly.

En manque de logements
Le nombre de personnes à loger continue de se développer, notamment avec l’accroissement des familles monoparentales. Les petites villes humaines proches des bassins d’emploi continuent d’avoir le vent en poupe par rapport aux métropoles, trop inaccessibles en termes de prix.

Hervé Chelly, agent immobilier chez Andaon, Avignon


L’Interview
Hervé Chelly, agent immobilier chez Andaon immobilier à Avignon

«Le marché immobilier a changé dès le mois de mai, perdant les primo-accédants ainsi que les investisseurs, à cause de la hausse des taux bancaires, bien sûr. Nous enregistrons une chute de 30% des ventes qui fait suite à trois ans de record de ventes en Vaucluse et Grand Avignon. En gros ? Il ne restera plus que les personnes les plus fortunées sur le marché, celles qui auront vendu d’importants biens et qui thésaurisent de conséquentes sommes d’argent disponibles pour acheter. En plus ? Ils pourront opportunément négocier la valeur du bien qu’ils convoitent.»

En ce moment ?
«Je me rappelle que le marché de l’immobilier s’est enflammé trois mois après la sortie du Covid. Les parisiens se sont mis à acheter toutes les maisons disponibles sur les Angles, Villeneuve, Rochefort, sans négocier, au prix fort, alors que ces mêmes biens stagnaient depuis plusieurs mois. Du coup, de nouvelles maisons à la vente sont apparues sur le marché à des prix encore plus élevés. C’est cela qui a causé le début de la flambée des prix. Nous étions en pleine euphorie ambiante. Les parisiens sont-ils repartis sur Paris ? Non, ils sont toujours là. Certains naviguent entre télétravail et allers-retours en TGV. Désormais il y a de plus en plus de gens en télétravail. On peut presque habiter n’importe où.»

Je suis en quête de biens de grande dimension
«car tous les petits biens ont été vendus très rapidement. Quant au diagnostic immobilier ? Oui, il peut clairement freiner les ventes, à tel point qu’une mauvaise note telle que G –extrêmement peu performant et interdit à la location- induit que les potentiels acheteurs ni ne regardent, ni ne visitent le bien. Ils passent directement au bien suivant. Pour les biens en F –indécents- cela devient compliqué et E passe encore. Les futurs acheteurs savent en cela qu’ils devront passer par la case travaux.»

Bientôt la reprise ?
«Au chapitre des taux bancaires, nous sommes passés de 1,5% à pratiquement 3,8%. Alors que nous avions vendu beaucoup de biens grâce, justement, au faible taux bancaire. Ce taux, conjugué à une inflation actuellement de 6,1%, fait que le reste à vivre s’amenuise et empêche les Français de devenir propriétaires. L’Etat ne veut pas que les Français s’endettent, avec l’effet ciseaux de l’inflation et de la hausse des taux d’intérêt, l’Etat éloigne de la propriété les plus fragiles, ceux qui auraient des difficultés à rembourser leur crédit bancaire. Lorsque l’inflation baissera, les taux bancaires devraient faire de même et permettre la reprise du marché de l’immobilier, peut-être en décembre ?»

Et là, maintenant tout de suite ?
«Nous refaisons du stock. Les personnes qui ont mis leur bien à la vente réalisent qu’elles ont besoin de notre expertise, notamment par rapport au diagnostic de performance énergétique (DPE). Les ventes se sont faites tranquillement de janvier à fin juin. Juillet et août marquent le retour du festival d’Avignon du In et du off et la pause vacances. Certains biens sont loués et ne peuvent pas être visités. Je me rappelle que l’an dernier j’avais fait un excellent dernier trimestre, je compte faire de même, la pierre est une valeur sûre.»

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