Avec 31 900 créations d’entreprises artisanales, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur enregistre en 2024 une progression marquée de l’entrepreneuriat artisanal (+8% sur un an). Un rebond significatif qui confirme l’attractivité du secteur, tout en mettant en lumière un enjeu majeur : celui de la transmission de milliers d’entreprises dans les prochaines années.
Après le ralentissement observé en 2023, l’artisanat régional renoue avec une dynamique soutenue. Selon le dernier baromètre publié par l’Institut Supérieur des Métiers, avec le soutien de Maaf, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur se hisse au troisième rang national en volume de créations artisanales, derrière l’Île-de-France et l’Auvergne-Rhône-Alpes. Près de 30% des créations d’entreprises régionales relèvent de l’artisanat, faisant de la région la deuxième de France sur ce critère.
Un rebond net après une année de repli
Cette reprise s’appuie autant sur les entreprises individuelles que sur les structures employeuses. Les sociétés commerciales (SA Société anonyme ; SARL, Société anonyme à risque limité, SAS, Société par actions simplifiées), souvent plus pourvoyeuses d’emplois, enregistrent une hausse notable, signe d’un entrepreneuriat plus structuré.
Les services, moteur de la croissance artisanale
Tous les secteurs de l’artisanat profitent de cette embellie, mais l’artisanat des services s’impose comme le principal moteur. Il concentre près de la moitié des créations régionales et affiche la plus forte progression annuelle. Nettoyage des bâtiments, soins de beauté, entretien automobile ou encore coiffure figurent parmi les activités les plus dynamiques, traduisant une demande soutenue liée à l’évolution des modes de vie et à la tertiarisation de l’économie. Le BTP, la fabrication et l’artisanat de l’alimentation progressent également, à des rythmes plus modérés, confirmant la résilience globale du tissu artisanal régional.
Une dynamique territoriale contrastée
La hausse des créations bénéficie à la majorité des départements, avec des progressions marquées dans le Vaucluse, le Var et les Alpes-Maritimes. À l’inverse, les Hautes-Alpes et les Alpes-de-Haute-Provence enregistrent un léger recul, illustrant des disparités territoriales persistantes entre littoral attractif et arrière-pays plus fragile économiquement.
Entreprendre pour se réinventer
L’étude met également en lumière un trait marquant de l’entrepreneuriat artisanal : la reconversion professionnelle. Près d’un créateur sur deux change de métier au moment de se lancer. Ce phénomène est particulièrement prononcé dans l’artisanat de fabrication, les services et l’alimentation, où l’artisanat apparaît comme un levier de réinvention professionnelle et de quête de sens.
La transmission, talon d’Achille du secteur
Derrière ces indicateurs positifs se dessine toutefois une fragilité structurelle. Les reprises d’entreprises restent marginales : moins d’une création sur dix est issue d’un rachat. Or, près de 8 240 entreprises artisanales pourraient être cédées dans les cinq prochaines années en région, notamment dans la maçonnerie, la réparation automobile, le nettoyage ou le commerce alimentaire sur les marchés. Ces entreprises, souvent dotées de salariés et de savoir-faire spécifiques, constituent un enjeu économique et patrimonial majeur. Leur disparition faute de repreneur signifierait la perte de compétences parfois rares et un affaiblissement durable du tissu local.
Le bilan
Le bilan 2025 de la création d’entreprises artisanales en Provence-Alpes-Côte d’Azur dessine un paysage contrasté. D’un côté, un secteur attractif, dynamique et créateur d’emplois ; de l’autre, une transmission encore trop peu anticipée, qui menace la pérennité de milliers d’entreprises. À l’heure où l’artisanat demeure un pilier de l’économie de proximité, l’enjeu n’est plus seulement de créer, mais aussi de transmettre, pour que la vitalité entrepreneuriale d’aujourd’hui ne se transforme pas en fragilité demain.
Mireille Hurlin
