Site icon

Banque populaire : Ce que la crise va changer

DR

Partager cet article

Comment les entreprises pourront-elles résister à la plus forte vague de récession depuis la Seconde Guerre mondiale ? L’heure de vérité approche à mesure que les employeurs vont devoir supporter les salaires et les charges que l’Etat ne pourra plus subventionner massivement.

 

Il va bien falloir sortir du chômage partiel qui indemnise actuellement un salarié sur trois du privé. Un million d’entreprise vont devoir sortir de ce dispositif léthargique et reprendre une activité. Mais comment ?

Il s’adresse à toutes les entreprises, professions libérales, artisans, exploitants agricoles, grandes entreprises et même associations. Le prêt garanti par l’Etat (PGE) est un succès. « Il est intéressant, intelligent et malin », commente Philippe Gassend, directeur de l’exploitation de la Banque populaire Méditerranée. « C’est une formule qui avait réussi lors de la crise de 2008, accordant la caution directe de l’Etat aux prêts bancaires » : 300 milliards sont aujourd’hui sur la table pour soutenir l’activité et soulager les problèmes de rentrée d’argent.

« Les entreprises sont très matures et prudentes et n’empruntent que ce dont elles ont besoin. »

Le PGE est un prêt de trésorerie d’un an qui peut couvrir jusqu’à trois mois d’inactivité, soit 25% du chiffre d’affaires annuel. En cas de défaillance d’un emprunteur ayant eu recours à un PGE, les établissements de crédit pourront donc faire face aux impayés en se tournant vers l’Etat. Mais pas en totalité : « les banques portent 10% des montants prêtés » modère Philippe Gassend. « Pour notre établissement, ce n’est pas neutre. Car le taux de refus sur les demandes de crédit est de 2%, 3% au plus. Nous observons cependant que les entreprises sont très matures et prudentes et n’empruntent que ce dont elles ont besoin ». Tout le monde joue donc le jeu, pour le moment.

 

Des solutions humaines pour des problèmes inédits

Les entreprises ont de quoi voir venir pour les 4 ou 5 mois. Rien à rembourser la première année, à l’issue de laquelle la durée d’amortissement sera choisie, entre 1 et 5 ans. La souplesse du dispositif est telle que 100 milliards ont déjà été sollicités à la mi-mai. « C’est une bonne chose. Souvenons-nous de 2008 qui était une crise de confiance dans laquelle les liquidités ne circulaient même plus entre les banques». Aujourd’hui l’argent coule à flots et ne coûte plus rien, les banques affichent des bilans plus sains et une meilleure solvabilité, le public a retrouvé confiance. « Il n’y a pas eu de flambée sur les retraits dans les distributeurs en dehors des 2 ou 3 premiers jours », constate Philippe Gassend.

« La crise que nous traversons nous a – au contraire – ramené des chefs d’entreprise dans les agences. »

« Toutes nos agences sont restées ouvertes. Nous avons organisé un roulement d’un jour sur deux. Au lieu d’accentuer les usages numériques comme on pouvait s’y attendre, la crise que nous traversons nous a – au contraire – ramené des chefs d’entreprise dans les agences. Ils sont montés au créneau pour mettre en place des solutions avec des collaborateurs qui ont rarement l’occasion d’avoir des contacts à ce niveau ». C’est que le contact humain n’a pas d’équivalent. Pour rassurer et établir un plan d’action clair et complet. Bref, faire un peu de stratégie et se projeter au-delà des difficultés présentes.

La banque des robots ne fait pas face à l’imprévu, ni à une crise économique. « Le problème c’est qu’il n’y a plus véritablement de marché, c’est à-dire de rencontre entre l’offre et la demande. Après avoir atteint un prix négatif, le prix du baril de pétrole est à 20 dollars. L’argent ne vaut plus rien. Mais on ne fera pas boire un âne qui n’a pas soif. Ça tient au moral. On voit qu’il y a une montée des dépôts avec – ce n’est pas si rare – des comptes qui fonctionnent a minima ou même plus du tout parce que les gens ont peur de dépenser et de ne pas avoir de rentrées».

 

Les conditions d’une reprise ne sont pas réunies

Ouvrir les vannes de la liquidité de manière à ce que les entreprises et les ménages puissent obtenir les financements dont ils ont besoin est tout à fait nécessaire, mais loin d’être suffisant. « La question qui se pose pour le moment est de savoir comment fera-t-on pour arrêter de répondre par la dette à cette séquence » faite de mesures temporaires et d’urgence. Car l’heure approche : l’Etat va serrer progressivement la vis du très coûteux chômage partiel, et demander aux entreprises de payer leurs charges et salaires. « Si elles étaient viables avec 50% d’activité, ça se saurait », proteste Philippe Gassend, faisant allusion aux mesures dites de distanciation sociales qui ne permettront pas aux restaurateurs, bar et autres établissements recevant du public de remplir suffisamment leurs caisses. La saison touristique reste donc largement hypothéquée par un principe de précaution dont on peut aujourd’hui mesurer l’ampleur et demain les conséquences. « Avec cette catastrophe sanitaire, nous sommes sur une ligne de crête qui matérialise un risque économique mais aussi un risque social. » Car une chose est sûre : ce n’est pas parce que les taux sont bas que l’on prêtera à tout le monde. Il serait vain de créer des montagnes d’impayés qui finiront par peser sur les distributions futures de crédit.

 

 

Comment va la Banque Pop ?

« Les banques flamboyantes n’existent plus ». Malgré un bilan 2019 honorable au cours duquel la Banque populaire Méditerranée améliore légèrement son activité (372 M€ de PNB) et redresse son résultat net à 52 M€ (+14%), la banque régionale est résignée à vivre, à l’instar du secteur, avec des taux durablement proches de zéro. Pour longtemps encore, les banques auront donc de très faibles revenus d’activité d’intermédiation. Lorsque les marges ne viennent plus du métier de gestion de stock mais des commissions, le risque pris sur chaque emprunt est minimisé parce qu’il ne rapporte que très peu de revenus.

« Quant aux commissions, il y a celles qui sont encadrées par la loi et qui concernent les particuliers et celles que l’on peut négocier de gré à gré auprès d’entreprises particulièrement bien équipées et vigilantes. » Peu à gratter, même si tout paraît très cher aux yeux de la clientèle qui reproche aux banques d’être trop sélectives.

« Il nous reste donc à trouver une nouvelle clientèle et à fabriquer de la valeur ajoutée. C’est ce que nous avons tenté avec l’ouverture de deux agences (Nice, Marseille) “Banque populaire, banque privée” qui apportent des services pointus depuis un an à quelque 6 000 clients. Nous aurons du mal à garder le modèle de banque traditionnelle. Nous le rénovons de la cave au grenier », conclut Philippe Gassend.

Quitter la version mobile