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Quelles conséquences pour notre économie ?

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*Au 25 mars 2020, près de 100 000 entreprises ont fait une demande d’activité partielle et 1,2 million de salariés sont concernés, pour un montant total de près de 4 milliards d’euros. En deux jours, ce sont donc plus de 500 000 salariés et 60 000 entreprises supplémentaires qui ont été pris en charge par le nouveau système de chômage partiel mis en place par le Ministère du travail. Depuis le début de la crise, seules 28 demandes de chômage partiel ont été refusées par les Direccte sur tout le territoire. Les nouvelles règles mises en place donnent aux entreprises 30 jours pour déposer leur demande, avec effet rétroactif. De plus, l’absence de réponse au bout de 48h vaut désormais acceptation de la demande. Cependant, au-delà de ces mesures d’urgences, qu’elles peuvent être les conséquences de la pandémie sur l’économie française ? Malgré des conditions de travail difficiles, l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) tente déjà d’évaluer cet impact, secteur par secteur.

L’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) vient de publier sa première évaluation de la situation économique et de la perte d’activité liée à la crise sanitaire en cours.

« Les résultats que nous présentons aujourd’hui sont fragiles, susceptibles d’être révisé, prévient Jean-Luc Tavernier, directeur général de l’Insee. D’abord parce que nos méthodes dans une telle situation ne sont pas éprouvées : c’est inédit dans l’histoire de l’Insee. C’est fragile aussi parce que la situation elle-même est très évolutive : dans certains secteurs industriels et dans les travaux publics, l’activité reprend après s’être interrompue ; dans d’autres secteurs, par exemple dans les services aux entreprises, le creux n’est sans doute pas encore atteint. A l’heure actuelle, nous estimons cependant que l’activité est à environ 65 % de la normale et qu’en matière de consommation, nous évaluons que la consommation totale des ménages français s’établit actuellement aussi à 65 % de la normale, avec des différences sectorielles très marquées. »

Une perte d’activité évaluée actuellement à 35 %

Les premières estimations de la perte d’activité économique liée à la crise sanitaire en cours présentent de fortes disparités selon les branches. En moyenne, cette dernière est actuellement évaluée à 35 % par rapport à une situation ‘normale’. Toutefois, si les activités agricoles (-4 %) devraient se poursuivre seulement un peu en-deçà de cette situation habituelle il n’en est pas de même pour les services non marchands (-14 %), les services marchands (-36 %), les industries – hors agro-alimentaires bien moins impacté que le reste du secteur – (-52 %) et surtout la construction (-89 %).

« Parmi les services marchands, certaines branches sont très sévèrement touchées (transports, hôtellerie, restauration, loisirs, etc.) tandis que d’autres le sont sans doute beaucoup moins (télécommunications, assurance, etc.), explique l’Insee. Par ailleurs, les versements de loyers immobiliers sont inertes et donc peu affectés à court terme pour la plupart. Les deux tiers de l’activité des services marchands seraient ainsi maintenus.

Pour ce qui est des services non marchands, leur prise en compte en comptabilité nationale retient le plus souvent l’hypothèse d’une valorisation par leurs coûts de production, principalement salariaux, ce qui les rend très inertes par nature. Le recul de l’activité y est donc moins marqué. Néanmoins, certaines activités des services non marchands baisseraient fortement (crèches, garderies, bibliothèques, activités sportives par exemple).

Baisse de la consommation d’électricité

Au total, la perte d’activité ‘instantanée’ est estimée à environ un tiers. Cet ordre de grandeur semble cohérent avec les premières informations disponibles sur la situation des salariés, dont un tiers environ serait en activité sur le lieu habituel de travail, un tiers en télétravail et le dernier tiers en chômage partiel. Ce chiffrage semble également compatible avec la diminution observée de la consommation d’électricité, actuellement d’environ un cinquième par rapport à un fonctionnement normal de l’économie. En effet, seule une partie de cette consommation réagit à la baisse d’activité, les ménages continuant notamment d’en consommer à leur domicile.

Diminution de la consommation des ménages

A partir des mesures mises en place pour le confinement (liste des commerces pouvant restés ouverts), des remontées des fédérations professionnelles ainsi que des données quotidiennes liées aux transactions par cartes bancaires, l’Insee constate un repli de la consommation des ménages de l’ordre de -35 %.

La plus forte contribution à cette baisse résulte de l’effondrement de la consommation de nombreux biens de l’industrie manufacturière (-60 %), qui compte pour 18 points de cette baisse. Certaines dépenses de consommations se sont réduites au minimum, entre -100 % et -90 % (matériel de transport, textile, habillement). D’autres se maintiennent (électricité, eau), voire augmentent légèrement (industrie pharmaceutique avec +5 %).

La consommation de services marchands a également diminué, d’environ 33 %, contribuant à la baisse totale de la consommation à hauteur de 15 points. Toutefois, en écartant les dépenses de logement qui, par nature, sont peu affectées à court terme, la baisse est autour de 55 % et particulièrement massive dans les secteurs de la restauration, de l’hébergement et des transports. Dans le même temps, la consommation de services non marchands baisserait de 34 %, contribuant à hauteur de 2 points à la baisse d’ensemble. Du fait de la suspension des travaux de rénovation, la consommation des ménages dans la branche de la construction baisserait de 90 %, contribuant à une baisse de 1 point de la consommation totale des ménages. A contrario, du fait du confinement et de la baisse de la consommation dans la restauration, la consommation des ménages en produits agricoles et agro-alimentaires augmenterait de 6 %, réduisant la baisse totale de la consommation de 1 point.

1 mois de confinement = 3 % de Pib annuel

Comptablement, un confinement d’un mois aurait un impact de l’ordre d’une douzaine de points de Pib (Produit intérieur brut) trimestriel en moins, soit 3 points de Pib annuel. Si le confinement devrait être prolongé d’un mois supplémentaires, c’est encore 3 points de moins pour le Pib annuel hexagonal.

Toutefois l’Insee précise que l’évolution de ces estimations est très étroitement liée au scénario de sortie de la crise sanitaire. Or l’Insee ne dispose pas de capacités de prévision à ce sujet. Par ailleurs, trop d’inconnus sont encore en suspens. Quel sera le comportement des agents économiques dont la confiance dépendra de l’amélioration de la situation sanitaire ? Malgré les mesures de soutien visant à empêcher que ce choc brutal mais a priori temporaire ne laisse des cicatrices permanentes trop profondes, les ménages et les entreprises procéderont ensuite à un retour à la normal immédiat ?

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