29 avril 2024 | Châteauneuf-du-Pape : les raisins de la colère des viticulteurs contre les carrières du Lampourdier

Ecrit par Andrée Brunetti le 16 février 2021

Châteauneuf-du-Pape : les raisins de la colère des viticulteurs contre les carrières du Lampourdier

Depuis une dizaine d’années, les carrières du Lampourdier (Lafarge Granulats et Delorme) grignotent le terroir de l’un des vins les plus réputés de la planète : le Châteauneuf-du-Pape (3 200 hectares de terroir entre safres, galets et sables, 320 exploitants et près de 100 000 hl de vin classés AOC – Appellation d’origine contrôlée).

Ce qui a mis le feu aux poudres ? C’est la demande d’extension de la superficie, de la durée et du volume d’extraction, au-delà de l’exploitation actuelle par la société Delorme pour une durée supplémentaire de 30 ans. « L’enquête d’utilité publique s’est déroulée en pleines vendanges (17 août-16 octobre 2020) quand les vignerons sont débordés. Le commissaire enquêteur a donné un avis favorable » dénonce Michel Blanc, directeur du Syndicat des producteurs de Châteauneuf-du-Pape.
« En 15 ans, le volume de calcaire extrait du Lampourdier a été multiplié par deux avec une montée en puissance de la pollution, des nuisances sonores induites par les tirs de mine, la circulation ininterrompue de poids-lourds, les vibrations, la poussière et l’impact sur la biodiversité, la faune, la flore et nos vignobles. »

Une Paix des braves en 2017
Pourtant, en 2017, le préfet de Vaucluse d’alors, Bernard Gonzalez, se félicitait d’une ‘Paix des braves’ entre carriers et vignerons : « ils ont enterré la hache de guerre ». Un accord avait été trouvé pour transporter les granulats par péniche sur le Rhône et non accumuler les camions sur la route : deux silos étanches de stockage avaient été aménagés, 1 600 mètres de convoyeurs à bande implantés pour maîtriser les émissions de poussière, une aspersion des pistes et des brumisateurs avaient été installés, les camions devaient être bâchés… Mais au fil du temps, les bonnes habitudes se sont relâchées, trafic fluvial trop onéreux, camions sans bâche dont on renifle les poussières quand on les suit avec les vitres ouvertes de son véhicule…
Christine Freslard, directrice de l’ODG. (Organisation de défense et de gestion) de l’AOC Châteauneuf-du-Pape suppose que la demande de matériaux de construction est en augmentation. « Mais ce n’est pas une raison pour donner libre court à une extension totale dans le temps, la superficie et le volume. »

Avis défavorable de la commune
Plus d’un millier de vignerons, riverains et défenseurs de l’environnement ont déjà signé la pétition mise en ligne sur change.org afin d’interpeller la ministre de la Transition écologique afin qu’elle stoppe l’appétit insatiable des carriers du Lampourdier. Le conseil municipal de Châteauneuf a voté un avis défavorable lors de la séance publique du 4 décembre dernier, alors que celui d’Orange a émis un avis positif.

La balle est dans le camp du préfet
La balle est désormais dans le camp du préfet de Vaucluse qui a jusqu’au 19 avril au plus tard pour publier un arrêté. Espérons que l’environnement et le bon sens l’emporteront, contrairement à ce qui se passe dans les Bouches-du-Rhône, où depuis des décennies, les boues rouges de la mine de bauxite de Gardanne se déversent matin, midi et soir, nuit et jour en pleine mer Méditerranée, dans un site classé, donc théoriquement protégé, du Parc naturel régional des Calanques entre Marseille et Cassis… Tout cela pour préserver l’emploi et les intérêts économiques aux dépens de la biodiversité et de la nature.

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