18 août 2025 |

Ecrit par le 18 août 2025

La difficile mutation des relais routiers

Ils ont longtemps été des repères importants sur les routes nationales de notre pays. Points d’étapes incontournables pour les chauffeurs de poids lourds, les relais routiers étaient aussi prisés par les automobilistes et en particulier sur la route des vacances. Aujourd’hui, ils disparaissent un-à-un alors que ces restaurants populaires et conviviaux, aux prix très modérés, répondent à une vraie demande. Sur la Nationale 7, ils sont nombreux à avoir tiré le rideau. Mais quelques-uns font de la résistance et se réinventent comme le relais des Fumades à Orgon (13).

Si de grands axes routiers comme la N7, reliant Paris à Menton, ont donné naissance à quelques-unes de nos meilleurs tables étoilées : Troisgros, Bocuse, Point, Pic, Loiseau… on a également vu fleurir aux bords des routes nationales des établissements plus accessibles. Destinés à ceux qui « font la route », ces relais routiers ont émergés avec le développement du transport par camion dans les années 30. A l’époque, il fallait deux jours pour relier Paris à Marseille. Les autoroutes n’existaient pas et les camions n’avaient pas le confort ou la fiabilité de ceux d’aujourd’hui. Dans ces établissements, dignes héritiers des relais de poste d’avant la mécanisation, on peut y manger, y boire, y dormir, y prendre une douche… Et un garagiste n’était jamais loin. Au-delà des services proposés, ces établissements étaient avant tout des lieux de convivialité, où les routiers savaient qu’ils seront toujours accueillis et servis. Des relations d’amitiés se créaient souvent et ces établissements devenaient pour beaucoup comme une deuxième famille.

Camion dans les années 50 ©DR

La première édition remonte à 1934 avec cette promesse « la route facile », il était offert par la marque d’apéritif Saint-Raphaël

Imaginé par François de Saulieu le fondateur du journal « Les Routiers », le réseau des relais routiers a été créé en 1935. A l’origine il s’agissait de trouver un moyen de diffusion pour ce magazine destiné aux professionnels de la route. François de Saulieu a ainsi pensé que ces relais routiers pouvaient aussi être des « relais » pour son magazine, et pour ces établissements, un moyen d’attirer les chauffeurs. Ensuite, l’idée de créer un guide référençant tous ces établissements routiers s’est naturellement imposée. La première édition remonte à 1934 avec cette promesse « la route facile », il était offert par la marque d’apéritif Saint-Raphaël. La création de la marque « Les routiers » avec son macaron bleu et rouge est apparue peu après. Le premier à l’arborer a été Le cheval noir, à Champagne- au-Mont-d’Or, dans le département du Rhône. Ce guide des relais routiers existe toujours (www.relais-routiers.com).

François de Saulieu le fondateur du journal « Les Routiers » ©DR

L’arrêt dans les relais routiers n’est plus une nécessité, au risque de perdre en rencontres et convivialité

A son apogée, dans les années 60, le réseau des relais routiers comptaient 3 500 établissements. Aujourd’hui, on n’en dénombre 300. Les raisons de ce déclin sont multiples. Tout d’abord les autoroutes qui ont aspiré une grosse part de la trafic des camions. Et, sur les autoroutes il n’y a pas de place pour les relais routiers indépendants. Les équipements actuels des camions modernes permettent à leurs chauffeurs de vivre en quasi autarcie. L’arrêt dans les relais routiers n’est plus une nécessité, au risque de perdre en rencontres et convivialité. Ainsi, ces établissements ont vu leurs fréquentations baisser. Beaucoup ont tenté de survivre ou de trouver des repreneurs. Certains comme le relais des Fumades à Orgon en bordure de N7 cherchent à se réinventer.

La baisse de la fréquentation par les chauffeurs routiers a incité Helena Amourgis à s’ouvrir vers d’autres clientèles plus sédentaires

Helena Amourgis, est la patronne du relais des Fumades, à Orgon, depuis 21 ans. Son établissement, lui existe depuis plus de 50 ans. Il compte une douzaine d’employés et est ouvert 7 jours sur 7, de 6h00 à 23h00 (en semaine). Le samedi il ouvre à 7 h et le dimanche à 9h00. C’est un bar hôtel restaurant. La baisse de la fréquentation par les chauffeurs routiers a incité Héléna Amourgis à s’ouvrir vers d’autres clientèles plus sédentaires : les salariés des entreprises locales, les résidents du camping d’à côté ou encore les ouvriers du BTP travaillant à proximité…  Le dimanche midi, Helena propose un menu amélioré. Les familles et les groupes d’amis en recherche d’un bonne table à des prix accessibles s’y précipitent. « C’est copieux et c’est à petit prix » aime à dire Helena. En semaine le menu routier est proposé à 17,90 € avec un buffet d’hors-d’œuvre, un plat du jour (couscous aux trois viandes le 26 juin dernier), une crème brulée et une boisson au choix. Le restaurant a su élargir sa carte en proposant des pizzas et des grillades au feu de bois.

Helena Amourgis Relais des Fumades à Orgon ©DR

« Je pense que nous sommes en voie de disparation »

Helena Amourgis

Malgré cela Helena n’est pas totalement optimiste : « je pense que nous sommes en voie de disparation » dit-elle. Dans 3 ou 4 ans, Helena compte prendre une retraite bien méritée. La question de sa succession se pose déjà. Mais il y a peu de candidat. «  Il faut forcément un couple pour reprendre une affaire comme celle-là » précise-t-elle. « Mais je suis heureuse de faire ce métier, même si c’est beaucoup de travail » ajoute-t-elle. Surtout l’esprit des relais routiers d’antan demeure encore. La preuve ? Helena a été invité il y a quelque temps au mariage de l’un de ces clients chauffeur routier.

Relais routier historique Chez Mémére à Domont ©DR

L’avenir des relais routiers est peut-être alors dans les villes, loin des nationales d’antan

La recette à succès de ces restaurants populaires : des maxi assiettes faites à partir de produits simples et de qualité pour un prix mini, a peut-être trouvé un nouveau débouché. Il donne à Laurent de Saulieu, le petit-fils du créateur du réseau et du magazine, de bonnes raisons de voir s’inverser la tendance. Le 29 mars dernier, un restaurant arborant le fameux macaron bleu et rouge a ouvert ses portes dans le centre-ville de Troyes. Même scénario dans le très chic 16ème arrondissement de Paris, où un nouveau relais routier (les Marches) vient d’ouvrir ses portes. Le menu complet est à 25 €. Ici point de routiers mais beaucoup de touristes et de bobos en mal d’exotisme (comme chez Léon rue de l’Isly près de la gare Saint-Lazare ), et des habitants du quartier qui renouent ainsi avec la tradition des restaurants populaires. Ce mouvement n’est pas sans rappeler celui du grand retour des bouillons…

L’avenir des relais routiers s’inscrit peut-être dans les villes, loin des nationales d’antan.


La difficile mutation des relais routiers

En novembre dernier, nous consacrions, dans l’Écho du Mardi, un article à un restaurant solidaire de Cavaillon qui risquait de mettre la clé sous la porte. La propriétaire des lieux avait décidé de le vendre vide de tout occupant, ce qu’une disposition du bail lui permettait de faire. L’association, qui gérait ce restaurant depuis 5 ans, n’avait alors pas d’autre choix, pour continuer l’aventure, que l’acheter elle-même. Mais elle n’avait pas les fonds nécessaires…

Agnès Piller, la gérante des lieux et cuisinière de son état, nous confiait alors qu’elle cherchait à créer une coopérative qui aurait réuni les fonds nécessaires à l’achat de l’immeuble. Les appartements situées au-dessus de l’établissement étaient aussi à vendre. Il fallait trouver au moins 300 000 €, et cela en quelques semaines. Une gageure dans la période actuelle et de surcroits en fin d’année. L’article racontant cette histoire a beaucoup circulé et il a touché, au propre comme au figuré, de nombreuses personnes. Agnès et son équipe reçurent de nombreux témoignages de soutien. Une mobilisation s’est créé autour de l’avenir de ce restaurant solidaire et bio. Le Bios (c’est son nom ) est pour de nombreuses personnes en difficulté, un moyen unique pour se nourrir avec des produits de qualité et à petit prix, voir à pas de prix du tout…

Le placement du cœur en quelque sorte

Le miracle se produit. Des personnes privées sensibles à la cause, qui venaient de toucher un héritage, décidèrent de faire l’acquisition de l’immeuble pour faire en sorte que l’association en soit toujours le locataire. Le placement du cœur en quelque sorte. Le restaurant est sauvé. Il a même été décidé de concrétiser assez rapidement le projet de relance de la salle de spectacle attenante à celle du restaurant. L’idée d’Agnès est d’apporter aussi dans ce lieu de la nourriture culturelle.

Il serait bien présomptueux de faire le lien direct entre la parution de notre article et la décision des investisseurs, mais cette histoire montre que la presse locale peut jouer un vrai rôle social sur les territoires. Au-delà de sa fonction louable et nécessaire d’informer, elle participe à créer du lien social et à mobiliser les femmes et les hommes qui vivent et animent ces territoires. C’est pour nous une belle récompense et une fierté.

Contact : www.facebook.com/bioscavaillon


La difficile mutation des relais routiers

« On a tous le droit à une nourriture de qualité » c’est ainsi qu’on pourrait résumer la démarche d’Agnés Piller qui a ouvert il y a maintenant 5 ans un restaurant bio et solidaire à Cavaillon. Cette ancienne cuisinière a voulu mettre à profit ses compétences au service de tous et notamment des plus démunis, pour proposer tous les midis des repas de qualité et pas chers. Mais le futur de cette belle initiative est aujourd’hui remis en cause.

Dés qu’on franchit la porte du restaurant d’Agnès Piller on est accueilli avec le sourire et on vous explique comment la maison fonctionne. Ici pas de service à table mais de jolis buffets où vous attendent entrées, plats, desserts et tout est fait-maison. Chaque jour, une trentaine de clients viennent s’y restaurer. Beaucoup d’habitués dont de nombreuses personnes qui travaillent à proximité. On peut aussi y croiser des accidentés de la vie pour lesquels Agnès leur fait un tout petit prix… voir pas de prix du tout… Gérée par une association, ce restaurant a érigé comme maxime que le bien mangé devait être un droit fondamental. Ce restaurant fonctionne avec une salariée et plusieurs bénévoles. Il bénéficie également du soutien de plusieurs producteurs locaux. Leur apports sont essentiels, ils permettent de maintenir des prix bas pour les clients. « Mais nos clients viennent d’abord pour la qualité de la cuisine » précise Agnès.

© Didier Bailleux / L’Echo du Mardi

Malheureusement tous ces projets sont aujourd’hui menacés
Racheté par Agnès, il y a 5 ans, cet établissement, situé cours Gambetta à Cavaillon, est un ancien café-théâtre. Ainsi, en plus de la traditionnelle salle de restaurant il dispose d’une salle de spectacles permettant d’accueillir au moins une bonne centaine de personnes. Agnès compte pouvoir l’utiliser pour proposer des spectacles. Aujourd’hui elle la met à disposition d’associations ou de particuliers qui y organisent des fêtes de famille. Des projets Agnès en a beaucoup comme celui d’ouvrir également un magasin de producteurs bio. Malheureusement tous ces projets sont aujourd’hui menacés. La propriétaire du bâtiment souhaite le vendre vide de tout occupant et une disposition du bail lui permet de le faire.

de gauche à droite, Martine (bénévole), Agnès Piller et Mandy (salariée) © Didier Bailleux / L’Echo du Mardi

Ne reste plus qu’à Agnès la possibilité de racheter les murs de son restaurant. Pour cela elle compte sur le réseau des sociétés coopératives et participatives (SCOP) pour financer cette acquisition. Mais les jours sont comptés… Elle devra être en capacité de faire une offre pour le tout début d’année 2025… Il serait plus que dommage que ce lieu unique de partage et d’entraide ne puisse poursuivre l’aventure.

https://www.facebook.com/bioscavaillon
bioscavaillon@gmail.com


La difficile mutation des relais routiers

Après avoir expérimenté les restaurants gastronomiques de l’hexagone et de Corse, Quentin et Eloïse sont tombés amoureux de la Fourchette du Ventoux et font revivre ce café-restaurant depuis 2021. En sublimant la myriade de produits locaux qu’offre la région, ils ont emporté le label en 2022 et deviennent ainsi le dixième Bistrot de Pays du Vaucluse.

Au nord-est du Vaucluse, à la limite de la Drôme, à 24 km du sommet du Mont Ventoux et à 13 km de Vaison-la-Romaine, bienvenue à La Fourchette du Ventoux à Beaumont-du-Ventoux ! Dans cet environnement particulièrement préservé aux pieds du Géant de Provence, c’est une terrasse ombragée avec vue sur les massifs du Parc Naturel Régional du Ventoux qui vous accueille au bistrot.

Derrière les fourneaux, Quentin fait mijoter des plats de longue cuisson à basse température à l’image de son poulet farci à la truffe d’été qui en révèle toutes les saveurs. C’est aussi bon que beau. Les assiettes servies par Eloïse sont colorées et vous font saliver d’avance. Simple et raffinée à la fois, c’est une cuisine de saveurs locales. Le couple met un point d’honneur à cuisiner les produits locaux dans leur respect.

C’est en sublimant la myriade de produits locaux qu’offre la région que le couple a remporté le label Bistrot de Pays. Le café-restaurant La Fourchette du Ventoux, racheté en 2021 par le couple, devient ainsi le dixième Bistrot de Pays du Vaucluse.

Quentin et Eloïse de la Fourchette du Ventoux © DR

Le bistrot, cantine scolaire du village

Point de ralliement des habitants, la Fourchette du Ventoux fait aussi office de cantine scolaire pour les enfants de la commune. Chaque midi de semaine, le bistrot accueille les 17 enfants qui partagent la salle avec les clients du déjeuner.

En plus de satisfaire leur toute jeune clientèle, la cantine au bistrot trouve aussi ses adeptes chez les personnes âgées du village qui apprécient la compagnie des enfants. Une manière simple de lutter contre la solitude pour les anciens du village et de renforcer la cohésion sociale dans ces bourgs ruraux.

Travailleurs, retraités et écoliers se réunissent ainsi dans une ambiance étonnamment familiale. Cette initiative à la fois innovante et conviviale, favorise la rencontre multigénérationnelle et le brassage social.

Un sésame bien mérité

La Fourchette du Ventoux, candidat volontaire, après avoir validé les critères d’éligibilité, a bénéficié de l’aide de la Fédération Nationale des Bistrots de Pays dans le cadre du programme régional financé par la Région Suc et du soutien opérationnel du Parc naturel régional du Mont Ventoux.

Approvisionnement en circuits courts, optimisation de la carte, plan de communication de proximité, gestion… Des solutions concrètes ont pu être apportées à ces thèmes. L’ultime étape, la visite d’audit par un client-mystère a validé les efforts fournis.

La Fourchette du Ventoux, 32 route de Malaucène, Beaumont-du-Ventoux. Ouvert tous les midis du lundi au dimanche. Ouvert tous les soirs sauf le mardi et le dimanche. Fermé le mercredi.

J.R.

https://www.echodumardi.com/tag/cafe-restaurant/   1/1