6 mai 2024 |

Ecrit par le 6 mai 2024

Le CESER, miroir de notre société, scrute depuis 50 ans nos évolutions

Le CESER (Conseil Economique, Social, Environnemental et Régional) a 50 ans. Il a été institué par la loi du 5 juillet 1972 comme la 2ème Assemblée régionale (avec le Conseil Régional de la Région Sud Provence Alpes Côte d’Azur) et « il a la charge de donner son avis sur l’évaluation des politiques publiques. Ses réflexions nourrissent le débat d’idées et alertent les élus sur les attentes de la société civile dans sa grande diversité ».

Vendredi 8 juillet, la Commission Prospective du CESER Sud a auditionné Stéphane Lhermitte, polytechnicien, directeur-adjoint de l’INSEE (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques) de PACA. « Entre la prise de décision d’un infrastructure et sa réalisation, il se passe des décennies » disait en amont le président de la Commission, Patrick Heintz, « Par exemple, le tunnel qui traverse Toulon a pris 40 ans pour relier l’est et l’ouest de la ville. A Avignon, on parle de la LEO depuis 1987, et à ce jour, une seule petite portion a été construite, c’est dire si le long terme joue à fond, alors quelles sont les tendances lourdes pour la période 2020-2030? ».

Pour répondre à cette immense question, Stéphane Lhermitte a brossé l’état de la Région Sud, sa démographie, ses données socio-économiques, son territoire, les inégalités de sa population, ses richesses, les changements climatiques possibles et les enjeux à moyen terme.

« Avec 5 081 191 habitants à ce jour, notre région est la 7ème de France (derrière Ile de France, Auvergne-Rhône-Alpes, Nouvelle Aquitaine, Hauts de France, Occitanie et Grand Est). Elle concentre un maximum de population dans les grandes villes, les métropoles (Marseille, Toulon, Aix, Nice, Cannes, Avignon) le bord de mer, le couloir rhôdanien, 85% habitent en ville, seulement 15% en zone rurale. Nombre de retraités ont été attirés par la Provence, dans les Alpes-Maritimes, le Var, les Bouches-du-Rhône, le Vaucluse et les stations de ski, nous avons 29,3% de plus de 60 ans (+3 par rapport à la France), un chiffre qui est en pleine croissance. D’ailleurs, chez nous, 200 000 habitants ont plus de 80 ans, ce qui pose à terme la question de leur vieillissement, de leur maintien à domicile, des services à la personne âgée, du nombre de soignants, des structures de soins palliatifs, du nombre d’EHPAD (Etablissements hébergeant des personnes âgées dépendantes), d’urbanistes et architectes pour mettre toutes ces données en perspective dans l’organisation de la société ».

Autre caractéristique du Sud, les inégalités : 17% de la population est pauvre (+2,5% que l’hexagone), 25,4% des enfants également (21% en France) et une famille monoparentale sur 3. Nous sommes la 3ème région après l’Ile de France et la Corse à afficher de tels taux mais nous attirons aussi des personnes fortunées à Saint-Tropez, dans le Luberon ou sur la Promenade des Anglais. 510 000 personnes habitent dans des QPV (quartiers prioritaires de la ville) ce qui représente 10% de la population (contre 7,4 en France), notamment des jeunes qui n’ont fait ni études, ni apprentissage et qui sont sortis du système scolaire sans diplôme. Ils ont donc des difficultés d’insertion et des problèmes pour se loger, d’autant que taux de chômage s’élève à 8,3% en général (7,4% en France) avec des pointes pour les jeunes et les femmes.

Ce qui débouche logiquement sur le problème du foncier en Région Sud, le mètre carré est rare donc cher, sans parler de la concurrence des résidences secondaires, occupées quelques semaines par an par leurs propriétaires, ce qui explique le peu de disponibilité d’appartements et de maisons, sans parler des HLM qu’on construit insuffisamment.

Autre préoccupation qui se pose avec une acuité grandissante, le changement climatique et les phénomènes extrêmes que nous constatons d’année en année, inondations, sècheresse, canicule, feux de forêt. « Notre région émet 7,4 tonnes de gaz carbonique par habitant (+7% que la France) en raison de l’industrie (pourtour de l’Etang de Berre, Fos sur Mer, Miramas, raffineries, pétrochimie), d’immenses bateaux de croisière qui mouillent du matin au soir au large de l’Estaque sans couper leurs moteurs. Quant aux zones inondables elles concernent 1 million d’habitants dont 42 000 en risque très élevé.

La pollution due aux embouteillages prend sa part dans la qualité de notre environnement. Par exemple, chaque jour 290 000 personnes prennent leur voiture pour aller travailler, entre Aix, Martigues, Aubagne et Marseille, mais il faut noter qu’en 10 ans le nombre de véhicules électriques ou hybrides qui affichent la vignette Crit’Air 1, est passé de 5% à 31%, ce qui est un progrès sensible.

Pour être positif, il nous faut aussi parler de la richesse de notre région. Elle est en augmentation grâce à sa diversification même si le tertiaire (les services) domine avec 83%, notamment dans le secteur du tourisme. N’oublions pas, par exemple, que le Vaucluse (570 000 habitants) accueille 4 millions de visiteurs chaque année, attirés par la qualité du paysage, le patrimoine, les festivals, les musées, les vignobles, le beau temps. La recherche aussi est l’une de nos pépites, la 3ème de France pour ses efforts de recherche, avec les équipes du CNRS à Marseille, les scientifiques de nos universités, Sophia Antipolis dans les Alpes-Maritimes, le technopôle de Château-Gombert, l’INRAE à Avignon et ses 700 chercheurs, ITER aux confins du Vaucluse, du Var, des Alpes-de-Haute Provence et des Bouches-du-Rhône.

Toutefois, des questions restent posées : quels sont les métiers d’avenir? Comment protéger la biodiversité? Quelle sera notre ressource en eau avec la fonte régulière des glaciers? Comment maintenir la présence d’agriculteurs alors que la terre est grignotée sans cesse par les ronds-points, les logements, les zones d’activité en attendant la fin de l’artificialisation des sols? Et surtout quand certains prévoient qu’il y aura 1 milliard de migrants dans le monde d’ici 2050, poussés par la famine, les séismes, la hausse de températures ou la montée des eaux, où iront-ils? A coup sûr, des milliers arriveront sur nos rives méditerranéennes, il est temps de réfléchir ensemble pour anticiper leur impact sur la vie de nos enfants.

« Le CESER est le miroir de notre société » a dit Marc Pouzet, son président lors du 50ème anniversaire. De son côté, Renaud Muselier, patron de l’exécutif régional a salué cet « Atout essentiel pour que notre action se fasse en lien avec les attentes de la population et la réalité du terrain ».


Le CESER, miroir de notre société, scrute depuis 50 ans nos évolutions

Aménagement du Territoire : David Géhant vient d’être auditionné par la Commission ‘Prospective’ du Ceser Provence-Alpes-Côtes d’Azur.

A 32 ans, David Géhant, maire LR de Forcalquier, président de la Communauté de Communes Pays de Forcalquier-Montagne de Lure est aussi, depuis la nouvelle mandature de Renaud Muselier, 5e vice-président du Conseil régional en charge de l’aménagement du territoire et de l’aide aux communes et intercommunalités.
Il a témoigné devant les élus de la Commission du Ceser (Conseil économique, social et environnemental de la région Sud) : « Ce territoire incarne l’avenir. Il est attractif avec ses atouts majeurs : 300 jours de soleil par an, qualité de vie, pureté de l’air, diversité des paysages avec sa mer, ses lacs, ses montagnes, ses collines, ses grands ports, ses 2 aéroports internationaux – Nice et Marseille Provence – son TGV, son flux logistique entre Espagne et Italie. C’est un domaine hétérogène, avec une densité différente entre métropoles et arrière-pays rural. »
« C’est la deuxième région de France après la Bretagne où 70% de la population est fière de son histoire » poursuit-il. « La crise sanitaire a accéléré certains phénomènes, l’envie de mieux manger, d’avoir un cocon familial plus confortable, plus doux, l’envie de terrasses, de campagne, de nature, de jardins, de grands espaces, loin des pôles urbains. Des biens qui étaient à la vente depuis 10 ans ont été acquis en quelques mois mais 30% plus cher. Ils ont donc besoin de mobilité, de services publics de proximité, de crèches, de maisons de santé et de travail. »

Le rôle de la Région
L’élu insiste sur le rôle de la Région Sud : « Elle doit être le partenaire des collectivités locales, aider les plus petites communes en fonction des contraintes du territoire, pas forcément du nombre d’habitants. Quand un salarié est payé 2 000€, il coûte 3 150€ à son entrepreneur, c’est dire le poids des charges, le coût du travail. Trouver un médecin, un gynécologue ou un ophtalmologue relève trop souvent du parcours du combattant. Il nous faut avancer ensemble dans le cadre du ‘Plan climat’ ou du ‘Plan cancer’. D’ailleurs, Forcalquier est une ville pilote où l’on interdit de fumer à proximité des écoles et des jardins municipaux. Il faut savoir que 35% des enfants de 10-15 ans ont déjà fumé. Ce n’est pas l’idéologie qui nous guide mais le pragmatisme. »

« Ce n’est pas l’idéologie qui nous guide mais le pragmatisme. »

Autre sujet abordé par Davie Géhant : le foncier. « Il devient rare, et avec la loi sur l’interdiction d’artificialisation des sols d’ici 2050, il sera impossible aux entreprises de s’agrandir, d’installer de nouvelles zones d’immobilier industriel ou commercial. Sans parler des risques d’incendies, des PPRI (Plans de Prévention des Risques d’Inondation) qui gèlent des centaines d’hectares en raison de possibles crûes. De moins en moins de permis de construire seront donnés. Nous devons donc trouver une autre forme d’urbanisme, d’architecture, sur pilotis pour pallier tout risque de submersion. »

L’atout tourisme
Le tourisme est un atout majeur de la région : 23 millions de visiteurs en 2019 avant le coup d’arrêt induit par le Covid. « Il n’y a pas que le ski l’hiver et la plage l’été. Le tourisme représente 40% du PIB (Produit intérieur brut) des Alpes de Haute-Provence. Nous devons nous professionnaliser, développer une attractivité sur 4 saisons avec des loisirs adaptés, des offres culturelles et sportives tout au long de l’année, pas seulement pendant les vacances scolaires » conseillera David Géhant. Et le président de la commission ‘Prospective’ du Ceser, Patrick Heintz de conclure ainsi la séance : « Le tourisme doit monter en gamme, sortir de la saisonnalité pour attirer encore plus de monde et surtout développer l’emploi en Provence-Alpes-Côte d’Azur ».


Le CESER, miroir de notre société, scrute depuis 50 ans nos évolutions

C’est ce qui ressort du ‘Baromètre 2020’ publié par le Dros (Dispositif régional d’observation sociale) et présenté tout récemment aux membres de la commission ‘Prospective’ du Ceser-Sud (Conseil économique, social et environnemental régional de Provence Alpes Côte d’Azur).

Cette étude de l’année écoulée analyse les données des Caisses d’allocations familiales (Caf), des conseils départementaux, des communautés d’agglomérations, des communes, des associations et des experts sur le terrain.

De forte inégalité en Paca
Premier constat : la pauvreté frappe des territoires déjà fragilisés avant la crise. 17% des ménages vivent sous le seuil de pauvreté (soit 860 000 personnes, dont 25% de jeunes de moins de 30 ans), le revenu mensuel médian s’élève à 1733€ par ménage, 1041€ par personne et la Provence est la 2e région métropolitaine la plus inégalitaire de France avec une densité plus marquée dans les bassins de vie du Grand Avignon, du Ventoux, du Comtat et d’Arles, mais aussi des Métropoles (Aix-Marseille-Provence et Nice).

Impact sur le marché du travail
La crise induite par le coronavirus a eu un impact direct sur le marché du travail avec une hausse généralisée des demandeurs d’emploi, notamment chez les hommes (+6,5%) et les jeunes de moins de 25 ans (+9%). Du côté des employeurs, réduction des embauches et recours aux dispositifs d’activité partielle. 241 000 personnes ont été privées d’emploi pendant le confinement, dont 3% dans l’industrie (-5 300 emplois), 2,4% dans le tertiaire (-22 200 emplois) et 7,8% dans la construction (-9 300 emplois). Avec la baisse des touristes, nombre d’emplois saisonniers n’ont pas été pourvus. A signaler qu’un milliard d’euros a été versé aux entreprises pour les aider à survivre pendant cette crise.

Fracture numérique avec le RSA ?
Forte hausse également du nombre de bénéficiaires du RSA (Revenu de solidarité active) : +9% (9,3% dans le Vaucluse, soit 17 798). Cette aide solidaire a touché 313 205 allocataires, avec leurs familles cela représente 716 000 personnes. Mais il faut savoir par exemple que d’après le Secours Catholique, un tiers des personnes accueillies sont éligibles au RSA et ne le perçoivent pas car elles n’ont pas d’ordinateur et ne savent pas faire de demande dématérialisée par internet.
La précarité alimentaire aussi s’est nettement accrue. 4 tonnes en plus d’aliments ont été distribués à 12 000 bénéficiaires supplémentaires, en raison notamment de la fermeture des cantines scolaires, de la paupérisation des étudiants, des personnes âgées et des familles monoparentales. Pourtant, là aussi l’Etat a mis la main à la poche, apportant 5,7M€ d’aides au lieu d’1M€.

Jeunes et seniors en première ligne
Les jeunes ont été particulièrement touchés par cette crise sociale et économique. Dans le Sud-Est, 100 000 d’entre eux ont moins de 25 ans et sont sans qualification, sans emploi, ni en études, ni en formation. « Le risque de chômage prolongé par la crise pourrait les plonger dans une précarité permanente, voire les exclure de la vie sociale » explique Julie Bertrand, directrice du Dros. Faute de petits boulots, ils ont du mal à se nourrir, se vêtir, se soigner, payer le loyer, les charges, ils ont recours aux Restos du Cœur et aux colis alimentaires pour survivre.
Autre génération fragilisée, celle des personnes âgées. Les plus de 75 ans représentent 11% de la population de Provence Alpes Côte d’Azur et 40% d’entre elles vivent seules. 17% d’entre elles n’ont pas mis le nez dehors pendant des mois par peur du virus notamment. Or le confinement social aggrave l’état psychologique et conduit souvent à une perte d’autonomie et à une plus grande vulnérabilité. A noter que dans le Vaucluse certaines associations se sont mobilisées, autour de Vaison et du Ventoux, par exemple, pour appeler régulièrement les seniors, prendre de leurs nouvelles, leur livrer des denrées alimentaires et des médicaments.

Sous le radar des aides
Enfin, cette crise sanitaire a aggravé une crise sociale déjà existante. Jeunes décrocheurs, étudiants précaires, saisonniers au chômage (tourisme, agriculture, BTP), demandeurs d’asile, SDF, personnes âgées isolées, micro-entrepreneurs qui n’ont pas de revenus antérieurs et donc passent sous le radar des aides.
Le chiffre le plus parlant de cette période difficile concerne la mise à l’abri des plus vulnérables. En 2019, il y avait chaque jour environ 620 places d’hôtel à la disposition des plus démunis pour passer la nuit sous un toit. On est passé à 2 433 en 2020, quatre fois plus, soit une augmentation de 293% et 6 centres d’hébergement d’urgence ont été ouverts pour faire face à la demande. Avant c’étaient des personnes seules, maintenant ce sont des familles entières et des sans abri qui affluent.
Le Dros conclut son rapport par une mobilisation exceptionnelles des professionnels, des élus de tous bords, une aide immense des associations, des bénévoles, une solidarité accentuée, des élans de générosité insoupçonnés, la mise en place de dispositifs transversaux au plus près des populations. Et un esprit d’innovation pour détecter les tendances émergentes fortes, anticiper et intervenir encore plus efficacement à l’avenir pour lutter contre toutes les formes d’exclusions.

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