17 juin 2025 |

Ecrit par le 17 juin 2025

Pic de chaleur et tenue vestimentaire : que peut-on imposer aux salariés ?

Lorsqu’il fait chaud et même très chaud, les salariés, qui ont pour certains déjà tendance à relâcher leur apparence depuis l’explosion du télétravail, ressortent logiquement des tenues légères. Or celles-ci peuvent parfois sembler inappropriées à l’employeur. Mais jusqu’où peut-il poser des limites : interdire un short ou des tongs est-ce possible par exemple ? 

Tenue vestimentaire : une liberté individuelle
Chaque salarié est en principe libre de se vêtir comme il l’entend en télétravail comme au bureau. Mais l’entreprise peut apporter des restrictions à cette liberté individuelle à condition que celles-ci soient :

  • justifiées par la nature de la tâche à accomplir  ;
  • proportionnées au but recherché.

En pratique, deux cas de figure peuvent aboutir à des restrictions : des impératifs d’hygiène ou sécurité et l’image de l’entreprise.

Imposer une tenue pour des raisons d’hygiène ou sécurité
L’employeur ne court aucun risque à imposer une tenue de travail à ses salariés lorsqu’il existe des raisons d’hygiène et de sécurité. Par exemple une blouse dans le milieu médical ou des équipements de protection individuelle sur les chantiers. Il est même indispensable d’imposer une tenue protectrice et de veiller à ce que les salariés la portent. Particulièrement en été où ils ont tendance à troquer leurs EPI (chaussures de sécurité, casques, vêtements de protection) contre des tongs, shorts, chapeaux ou casquettes.
Si le port d’une tenue de travail ou d’un uniforme est imposé, il est toutefois préférable de le prévoir dans le contrat de travail, et dans le règlement intérieur ou dans une note de service.

La délicate question de l’image de l’entreprise
Concernant l’autre cas de figure qui peut amener à restreindre la liberté des salariés de se vêtir, à savoir l’image de l’entreprise, les choses sont un peu plus compliquées. Il est en effet plus difficile d’apprécier les restrictions qui peuvent être imposées car elles dépendent de chaque entreprise et du collaborateur concerné.  Ainsi, il paraît justifié d’imposer des règles aux commerciaux ou aux salariés en contact avec la clientèle. La Cour de cassation a déjà jugé que le port d’un bermuda, s’agissant d’un employé pouvant être mis en contact avec la clientèle, constitue une tenue vestimentaire incompatible avec ses fonctions et ses conditions de travail. En revanche, il paraît plus difficile d’imposer des limites aux salariés qui travaillent dans des bureaux et ne sont pas amenés à rencontrer des clients.

Dans tous les cas, l’employeur peut parfaitement exiger une tenue décente (il est logique d’interdire à un salarié de se pointer au travail en maillot de bain !) et qui ne soit pas contraire aux bonnes mœurs.
Il doit toutefois prendre garde au risque de discrimination : difficile par exemple de tolérer le short ou les tongs pour les femmes et pas pour les hommes…

Par Anne-Lise Castell, juriste en droit social et rédactrice au sein des Éditions Tissot pour Réso hebdo éco – www.reso-hebdo-eco.com

Anne-Lise Castell, juriste en droit social et rédactrice au sein des Éditions Tissot. © Gilles Piel

Pic de chaleur et tenue vestimentaire : que peut-on imposer aux salariés ?

Les salariés acquièrent des congés payés pour chaque période de travail effectif. Ils doivent ainsi bénéficier de ceux acquis chaque année, lors de périodes définies et communiquées en amont. Ils formulent pour cela des demandes. Et il est fortement recommandé d’y répondre ! A défaut, l’employé pourrait se passer de l’autorisation de son entreprise sans que cela ne constitue une faute pouvant donner lieu à sanction.

Les règles relatives à la prise de congés
Les salariés acquièrent 2,5 jours ouvrables de congés payés par mois de travail effectif (ou 2,08 jours ouvrés). Ces derniers doivent être pris chaque année, lors d’une période définie par accord collectif d’entreprise, d’établissement ou, à défaut, de branche ou par les soins de l’employeur, après avis du comité social et économique. Cette période doit, dans tous les cas, obligatoirement inclure les mois courant du 1er  mai au 31 octobre.
Les congés payés acquis doivent être pris de manière continue jusqu’à 12 jours ouvrables. Au-delà, ils peuvent être fractionnés avec l’accord de l’employé, ou être pris en continu dans la limite de de 24 jours ouvrables (sauf exception). L’entreprise doit établir l’ordre des départs et tenir compte des critères suivant à défaut d’accord collectif : situation de famille des bénéficiaires et durée de services dans l’entreprise ainsi que de l’activité exercées au sein d’autres sociétés.
L’employeur doit informer ses salariés de la période de prise des congés au moins deux mois avant son ouverture. Et communiquer à chaque collaborateur l’ordre des départs par tout moyen au moins un mois avant le début de ses vacances. A défaut, il devra l’indemniser du préjudice subi s’il ne peut pas  prendre ses congés.
En pratique, si l’entreprise n’impose pas à ses employés les dates de leurs congés payés, celles-ci sont définies au regard des demandes qu’ils auront formulées. L’employeur pourra alors les accepter ou les refuser si certains motifs le justifient (par ex. en raison de l’ordre des départs en congés).
Il peut également modifier l’ordre et les dates de départs en respectant les délais fixés par accord collectif. À défaut d’accord, il ne peut les modifier moins d’un mois avant la date de départ prévue, sauf en cas de circonstances exceptionnelles.
Mais que se passe-t-il s’il ne répond pas à une demande de congés payés formulée par un salarié ? Celui-ci peut-il considérer que son souhait est accepté ? Ou doit-il venir travailler sous peine de commettre une faute et de s’exposer à une sanction ? La Cour de cassation a été amenée à répondre à cette interrogation récemment.

L’absence de réponse à une demande peut valoir acceptation
Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, un salarié avait formé une demande de congé payé d’une journée. Il n’avait pas reçu un accord verbal mais il avait considéré que tel était le cas car « au vu de la loi le silence vaut acceptation ». Résultat : il a reçu un avertissement de son employeur pour avoir pris ce jour sans avoir obtenu l’autorisation préalable.
Le salarié a alors saisi le conseil de prud’hommes pour solliciter l’annulation de cet avertissement. Et la cour d’appel a fait droit à sa demande. Elle a considéré que la nécessité d’obtenir un accord exprès préalablement à la prise de congé était équivoque. Cela résultait des termes mêmes de la lettre d’avertissement. Et la société ne justifiait d’aucune autre consigne précise en ce sens. L’employeur a contesté cette décision. Il considérait que sauf stipulation particulière, disposition conventionnelle ou usage contraire, le salarié ne peut fixer lui-même les dates de ses congés payés.
La Cour de cassation a donné raison à la cour d’appel. Le salarié avait demandé l’autorisation de s’absenter et l’employeur n’avait pas expressément formulé un refus. Le collaborateur avait donc pu considérer que sa demande était acceptée. La cour d’appel pouvait donc en déduire une absence de faute commise par l’employé. 

Important : Les tribunaux apprécient souverainement le caractère fautif d’un départ en congés sans autorisation. Ils considèrent généralement que l’inexécution par l’employeur de ses obligations en matière d’organisation des congés payés et d’information des salariés peut exonérer le salarié de sa responsabilité. Mais le départ en congés sans autorisation peut selon les cas constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, voire un motif de licenciement pour faute grave.

Cour de cassation, chambre sociale, 6 avril 2022, n°20-22.055 (les tribunaux peuvent décider qu’un salarié qui n’a pas reçu de refus exprès de son employeur à sa demande de congés payés peut la considérer acceptée, sans commettre de faute).

Par Amélie Gianino, juriste en droit social et rédactrice au sein des Éditions Tissot pour RésoHebdoEco – www.reso-hebdo-eco.com


Pic de chaleur et tenue vestimentaire : que peut-on imposer aux salariés ?

En l’absence de disposition conventionnelle, la date de départ en congés payés ne peut pas être modifiée moins d’un mois avant, sauf circonstances exceptionnelles. Isabelle Vénuat, juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot, nous rappelle que cette règle s’applique à tous les congés payés légaux et conventionnels.

Prise et ordres des départs en congés en application d’un accord collectif…
Les congés payés sont pris dans une période comprise entre le 1er mai et le 31 octobre. Cette disposition est d’ordre public. Il n’est donc pas possible d’y déroger même par accord. 
La période de prise des congés est portée à la connaissance des salariés, deux mois avant son ouverture. Et l’ordre est communiqué à chaque collaborateur un mois avant son départ (Code du travail, art. D. 3141-5 et D. 3141-6).
La période de prise des congés, l’ordre des départs et les délais à respecter pour modifier ces différents éléments peuvent être fixés par accord d’entreprise, ou à défaut, par la convention collective.
À défaut de disposition conventionnelle, il revient à l’employeur, après avis du comité social et économique, de définir la période de prise et l’ordre des départs en congés payés (Code du travail, art. L. 3141-16).

…et sans accord collectif
En l’absence d’accord collectif, fixant les règles relatives au changement des départs en congés payés, l’employeur peut modifier les dates. Pour cela, il faut vérifier au préalable les dispositions conventionnelles applicables à l’entreprise. Mais il ne peut le faire moins d’un mois avant la date de départ prévue, sauf circonstances exceptionnelles comme des difficultés économiques ou des raisons impératives particulièrement contraignantes (Code du travail, art. L. 3141-16). En cas de litige, ces circonstances sont appréciées au cas par cas par les juges.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 3 mars 2022, précise que cette règle de modification des dates de départ s’applique sans distinction aux congés payés légaux comme aux congés d’origine conventionnelle. Ainsi que ce soit pour les quatre premières semaines de congés payés, la cinquième semaine ou des congés conventionnels, il faut respecter ce délai de prévenance d’un mois avant le départ.
Dans l’affaire ayant conduit à l’arrêt du 3 mars 2022, l’employeur avait imposé, à compter du 1er janvier 2018, à des salariés non-grévistes de prendre des congés payés les deux premières semaines de janvier en raison de la paralysie du site liée à une grève. Pour le syndicat Force ouvrière, cette mesure était illicite. L’employeur imposait des congés payés sans respecter le délai de prévenance fixé par la loi.
Pour sa défense, l’employeur soutenait que les dispositions légales encadrant la prise des congés payés n’étaient pas applicables, sauf dispositions conventionnelles contraires, aux congés d’origine conventionnelle. Il pouvait donc imposer la prise de ces congés sans respecter un délai de prévenance. Moyen rejeté, les dispositions de l’article L. 3141-16 du Code du travail ont une portée générale. Elles s’appliquent aux congés payés d’origine légale et aux congés d’origine conventionnelle.

Rappel
La date à prendre en compte (un mois avant le départ) est celle à laquelle le salarié est informé du report de ses congés payés et non celle où est envoyée la lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) l’informant de ce report. Il est conseillé d’informer le salarié par écrit, en cas de modification de sa date de départ pour des raisons de preuve.

Isabelle Vénuat, juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot pour Réso hebdo éco


Cour de cassation, chambre sociale, 2 mars 2022, n° 20-22.261 (à défaut de disposition conventionnelle, l’employeur ne peut pas modifier l’ordre et les dates de départ moins d’un mois avant la date de départ prévue, y compris la 5e semaine)


Pic de chaleur et tenue vestimentaire : que peut-on imposer aux salariés ?

Une entreprise peut individualiser la rémunération de ses salariés en instaurant une part variable qui peut prendre la forme de primes versées en contrepartie de leur activité. Elles s’acquièrent alors proportionnellement à leur temps de présence explique Amélie Gianino des Editions Tissot.

L’employeur est tenu de rémunérer ses salariés pour le travail fourni. La rémunération versée peut être fixe, auquel cas elle est due dès lors que les collaborateurs effectuent un travail, peu importe sa qualité. Mais l’entreprise peut substituer, ou adjoindre, une part variable. La rémunération versée dépend alors du niveau de performance réalisé, individuellement ou collectivement.

Quels sont les dispositifs ?
Il est possible d’opter pour différents dispositifs de rémunération variable : commissions, bonus, prime sur objectif (qualitatif ou quantitatif), etc. Ils doivent dans tous les cas reposer sur des critères objectifs, réalisables et indépendants de la volonté du dirigeant.
Lorsque la variation de salaire est liée à des objectifs, il est recommandé de ne pas les faire figurer dans le contrat des salariés. Il faudrait sinon obtenir individuellement leur accord pour pouvoir les modifier.
En cas de fixation unilatérale par l’employeur, il faut porter les objectifs à la connaissance des salariés en début d’exercice. À défaut, l’entreprise pourrait, en cas de contentieux, être condamnée à payer l’intégralité de la part variable même si les buts n’ont pas été réalisés !

Comment s’acquiert la partie variable du salaire liée à l’activité des salariés ?
La réponse est plus ou moins évidente en fonction du dispositif mis en place.

  • les dispositifs qui valorisent la réalisation d’une action particulière : la partie variable s’acquiert à chaque fois que l’action valorisée est effectuée (par ex. les commissions sont dues pour chaque vente ou commande réalisée par les salariés).
  • les dispositifs qui reposent sur la réalisation d’objectifs dans un certain délai (trimestre, année, etc.) : la partie variable s’acquiert au regard de la réalisation des objectifs par les salariés à l’issue du délai qui leur est imparti pour les atteindre.

Comment calculer la rémunération due à des salariés qui quittent l’entreprise avant l’expiration de la période accordée pour atteindre les objectifs ?
La Cour de cassation a été amenée récemment à répondre à cette question. Dans l’affaire qui lui était soumise, une société avait embauché une salariée en cours d’année. Son contrat de travail instaurait une prime sur objectif annuelle. Il précisait que la prime était ‘proratisée’ au titre de son année d’embauche. Mais il n’évoquait pas de prorata en cas de départ en cours d’année
Or, la salariée a été licenciée au cours de l’année suivante. Après avoir dépassé les objectifs qui lui avaient été fixés au titre de celle-ci. Elle n’avait cependant pas perçu l’intégralité de la prime sur objectif. Mais seulement une partie, calculée au prorata de sa durée de présence. Elle a donc saisi le tribunal pour solliciter le solde. La Cour de cassation a considéré que la prime n’était due qu’en proportion du temps de présence de la salariée au cours de l’exercice. Elle indique à cet égard que « lorsqu’une prime constitue la partie variable de la rémunération versée au salarié en contrepartie de son activité, elle s’acquiert au prorata du temps de présence du salarié dans l’entreprise au cours de l’exercice ».
Peu importe donc que la proratisation de la prime en cas d‘embauche ou de départ en cours d’exercice ne soit pas mentionnée dans le contrat de travail. Ou que le salarié ait atteint la totalité des objectifs fixés lors de son départ. Dans tous les cas, la prime liée à son activité ne lui est due qu’au prorata de son temps de présence dans l’entreprise au cours de la période fixée pour atteindre les objectifs.

Cour de cassation, chambre sociale, 9 février 2022, n° 20-12.611 (lorsqu’une prime constitue la partie variable de la rémunération versée au salarié en contrepartie de son activité, elle s’acquiert au prorata du temps de présence du salarié dans l’entreprise au cours de l’exercice).

Par Amélie GianinoJuriste en droit social et rédactrice au sein des Éditions Tissot


Pic de chaleur et tenue vestimentaire : que peut-on imposer aux salariés ?

L’entretien d’évaluation permet de faire le point avec le salarié sur l’année écoulée. Mais attention si, lors de cet échange, l’employeur reproche au salarié des agissements fautifs en lui demandant de changer immédiatement de comportement, on se rapproche plus de la mesure disciplinaire que du bilan de l’année écoulée.                                 

Les limites de l’entretien d’évaluation
L’entretien d’évaluation permet d’apprécier les compétences du salarié, d’identifier ses points forts et ses difficultés afin de trouver des solutions pour les lever. Cela peut également être le moment où l’employeur fixe les objectifs pour l’année à venir.
Afin d’assurer le suivi de ces entretiens d’une année sur l’autre, la rédaction d’un compte-rendu est fortement conseillée. Mais attention à son contenu. En effet, dans certaines situations, cela peut vite changer sa dénomination.
Lorsque l’employeur dresse le bilan de l’année, il doit être vigilant s’il formule des griefs précis et profite de cet entretien pour inviter son collaborateur à changer immédiatement de comportement. Dans une telle situation, le compte rendu de l’entretien d’évaluation peut constituer une sanction disciplinaire. Et en agissant ainsi, le dirigeant épuise son pouvoir disciplinaire. Il ne pourra plus sanctionner le salarié. Pour rappel, en principe, une même faute ne peut pas faire l’objet de deux sanctions successives.

L’employeur ne peut pas sanctionner deux fois la même faute, sauf si :

  • de nouveaux faits se sont produits depuis la première sanction,
  • le salarié persiste et continue à avoir son comportement fautif.

Les limites du pouvoir disciplinaire
Si un fait fautif est sanctionné deux fois, le salarié peut demander l’annulation de la sanction.
C’est ce qui vient d’arriver à un employeur qui avait licencié un salarié pour faute grave. Le salarié a contesté : les faits reprochés pour justifier son licenciement avaient, selon lui, déjà été sanctionnés par un avertissement.

En effet, lors de son entretien d’évaluation, on lui avait présenté différents motifs de mécontentement :

  • plainte de collaborateurs en souffrance liée à son attitude dure et fermée aux changements ;
  • anomalies et problèmes récurrents dans son travail constituant des dysfonctionnements graves liés à la sécurité électrique ;
  • non-respect des normes réglementaires et leur application par un pilotage rigoureux des équipes, etc.

Dans le compte rendu de l’entretien d’évaluation, il est reproché au salarié des griefs précis. On l’invite de manière impérative à un changement complet et total de son savoir-être et savoir-faire, et ce, sans délai.

Mais dans la lettre de licenciement, il est également reproché au salarié :

  • ses écarts de comportement avec des collègues ou subordonnés ;
  • son taux élevé de défauts électriques ;
  • son défaut de respect des process en vigueur.

Pour les juges, le compte rendu d’entretien d’évaluation comportait des griefs précis. Il sanctionnait le comportement considéré comme fautif du salarié et constituait un avertissement. Et si un avertissement a été infligé au salarié, les mêmes faits ne pouvaient pas justifier son licenciement. Il est donc sans cause réelle et sérieuse.

Cour de cassation, chambre sociale, 2 février 2022, n° 20-13.833 (le compte rendu d’un entretien d’évaluation peut constituer une mesure disciplinaire lorsqu’il formule des griefs précis et invite le salarié à un changement de comportement immédiat)

Par Isabelle Vénuat, juriste en droit social et rédactrice au sein des Éditions Tissot pour Réso hebdo éco – www.reso-hebdo-eco.com


Pic de chaleur et tenue vestimentaire : que peut-on imposer aux salariés ?

Un salarié qui cause un accident de la circulation avec un véhicule de l’entreprise peut, dans certains cas, être sanctionné. Qu’en est-il si le salarié provoque l’accident au retour d’un salon professionnel ?

Accident de la route avec un véhicule de fonction : pas de sanction pécuniaire
Si un salarié endommage son véhicule de fonction en faisant une erreur de conduite, l’employeur ne peut pas lui demander de payer les réparations. Il s’agit en effet d’une sanction pécuniaire interdite (Code du travail, art. L. 1331–2). Même si le collaborateur propose spontanément de rembourser les frais, il n’est pas possible de retenir sur son salaire les sommes correspondantes.
L’entreprise ne peut pas non plus prévoir, dans le contrat de travail, une clause prévoyant le paiement d’une franchise par le salarié en cas d’accident responsable ou sans tiers identifié, survenu avec le véhicule fourni par la société. Une telle clause serait en effet nulle et non avenue et l’on fait comme si elle n’existait pas.
Par exception, il existe un cas de figure dans lequel la responsabilité pécuniaire du salarié peut être engagée : la faute lourde. Néanmoins celle-ci ne pourra pas résulter d’une simple erreur de conduite, ni d’une contravention. En effet, il faut prouver que le collaborateur avait l’intention de nuire à l’entreprise. Ce qui sera le plus souvent très difficile à établir.

Accident de la route avec un véhicule de fonction : le licenciement disciplinaire est possible en cas de comportement fautif
L’employeur ne peut pas sanctionner un salarié au simple motif qu’il a eu un accident de la circulation ou a commis une erreur de conduite avec un véhicule de l’entreprise.
Par contre, s’il a eu un comportement fautif ayant provoqué un accident, une sanction disciplinaire allant jusqu’au licenciement pour faute grave est alors envisageable.
C’est ce qu’a rappelé la Cour de cassation dans une affaire où l’employé conduisait sous l’emprise de lalcool son véhicule de fonction, au retour d’un salon professionnel. Il a tenté de faire valoir que le licenciement disciplinaire n’était pas justifié car le sinistre relevait de sa vie personnelle, s’étant produit en dehors du temps de travail. Les juges n’ont pas suivi. Les faits reprochés se rattachaient bien à la vie professionnelle du salarié qui a manqué à une obligation découlant de son contrat de travail en provoquant un accident avec son véhicule de fonction après avoir bu, alors qu’il rentrait d’un salon où il s’était rendu sur instruction de son employeur. Le licenciement pour faute grave a, en l’espèce, été jugé justifié.
Une décision qui s’inscrit dans la lignée de précédents arrêts, la Cour de cassation ayant déjà notamment jugé qu’en cas de défaut du port de la ceinture de sécurité et d’excès de vitesse, le licenciement pour faute grave pouvait se justifier (Cass. soc., 15 décembre 2016, n° 15–21.749).

Cour de cassation, chambre sociale, 19 janvier 2022, n° 20-19.742 (se rattachent à la vie professionnelle du salarié les faits commis, alors qu’il conduisait sous l’empire d’un état alcoolique son véhicule de fonction, au retour d’un salon professionnel, où il s’était rendu sur instruction de son employeur).

Anne-Lise Castell, juriste en droit social et rédactrice au sein des Éditions Tissot pour Réso hebdo éco


Pic de chaleur et tenue vestimentaire : que peut-on imposer aux salariés ?

Maladie, congé maternité… Tous les salariés seront un jour absents de leur travail pour un motif légitime. Mais quelles conséquences ces absences justifiées occasionnent-elles sur leurs droits à congés payés ? Amélie Gianino, juriste aux Editions Tissot, éditeur spécialiste du droit social, répond aux trois questions les plus fréquentes.

Qu’advient-il de mes congés payés si je tombe malade ou si je suis victime d’un accident ?
Lorsque vous êtes en arrêt de travail pendant vos congés payés, vous vous demandez certainement si vous pourrez profiter de ces congés à la fin de votre arrêt maladie ou s’ils sont malheureusement perdus.

Tout dépend de la date de début de votre arrêt maladie :

  • si votre arrêt maladie a débuté avant que vous ne soyez en congés payés : les congés payés qui coïncident avec votre arrêt maladie seront reportés. Vous pourrez donc bénéficier de ces congés payés à la fin de votre arrêt maladie. Ces congés devront en principe être pris avant la fin de la période de référence fixée dans votre entreprise pour la prise des congés payés.
  • si votre arrêt maladie a débuté au cours de vos congés payés : les congés payés qui coïncident avec votre arrêt maladie ne seront pas reportés. Vous cumulerez les indemnités journalières de sécurité sociale avec une indemnité de congés payés versée par votre employeur. Celui-ci ne sera toutefois pas tenu de vous verser d’indemnité complémentaire liée à votre maladie.

Et si je suis absent pour un autre motif ?
Les congés payés que vous n’auriez pas pu prendre en raison d’un congé de maternité ou d’adoption sont reportés. Vous pourrez donc en bénéficier à l’issue de votre congé de maternité ou d’adoption.

Si vous décidez par la suite de prendre un congé parental d’éducation et que vous ne soldez pas vos congés payés en amont, vous pourrez en perdre le bénéfice selon votre date de reprise du travail :

  • si votre congé parental prend fin avant l’expiration de la période de référence fixée dans votre entreprise pour la prise des congés payés : vous pourrez bénéficier des congés payés que vous n’avez pas utilisés avant le début de votre congé parental ;
  • si votre congé parental prend fin après l’expiration de la période de référence fixée dans votre entreprise pour la prise des congés payés : les congés payés que vous n’avez pris avant le début de votre congé parental seront perdus.

En cas de mise à pied à titre conservatoire par votre employeur, vous devriez conserver le bénéfice de vos congés payés, ces deux périodes ne pouvant se superposer.

Est-ce que je continue à acquérir des congés payés pendant mes périodes d’absence ?
Vous acquérez des congés payés en contrepartie du travail effectif que vous fournissez pour votre employeur. Donc, lorsque vous ne travaillez pas, vous ne pouvez pas solliciter le bénéfice de congés payés.

Certaines absences sont toutefois assimilées à du travail effectif pour l’acquisition de congés payés. Vous acquérez donc des congés payés pendant ces périodes au cours desquelles vous ne travaillez pas. Sont notamment concernées les absences suivantes :

  • congés payés de l’année précédente ;
  • congé de maternité, de paternité et d’adoption ;
  • repos accordés en contrepartie de la réalisation d’heures supplémentaires ;
  • RTT.

Les périodes d’arrêt maladie ne sont pas assimilées à du travail effectif pour l’acquisition des congés payés. Vous n’acquérez donc pas de congés payés pendant ces périodes.
Si votre arrêt de travail est occasionné par un accident de travail ou par une maladie professionnelle, vous acquérez par contre des congés payés pendant une année.

A noter : les conventions collectives peuvent prévoir des droits plus favorables pour les salariés.

Par ailleurs, les tribunaux tendent à appliquer la directive européenne 2003/88/CE du 4 novembre 2003 qui comporte des dispositions beaucoup plus favorables pour les salariés. Elle permet en effet aux salariés d’acquérir des congés payés pendant leurs périodes d’absence, notamment pour maladie, et de reporter les congés non pris, notamment en raison d’absences liées à une maladie ou à un congé parental.

Amélie Gianino, juriste aux Editions Tissot


Pic de chaleur et tenue vestimentaire : que peut-on imposer aux salariés ?

Pendant ces derniers mois et l’explosion du télétravail, bon nombre de personnes ont pris l’habitude de s’habiller avant tout confortablement. Alors que le retour partiel au bureau a sonné et que les températures commencent à grimper, certains salariés risquent donc d’être tentés de venir par exemple travailler en short et en tongs. Un comportement que l’employeur peut juger mal approprié avec l’activité professionnelle. Mais a-t-il le droit de faire quelque chose ?

Tenue vestimentaire des salariés : une liberté soumise à exception
En principe, un salarié est libre de s’habiller comme il le souhaite pour venir travailler.

Il s’agit en effet d’une liberté individuelle à laquelle l’employeur ne peut apporter des restrictions qu’à condition que celles-ci soient :

  • justifiées par la nature de la tâche à accomplir ;
  • proportionnées au but recherché.

En pratique, deux cas de figure peuvent ainsi aboutir à des restrictions : des impératifs d’hygiène ou de sécurité et l’image de l’entreprise.

Tenue vestimentaire des salariés : zoom sur les restrictions envisageables
L’employeur ne court aucun risque à imposer une tenue de travail à ses salariés lorsqu’il existe des raisons d’hygiène et de sécurité. Par exemple une blouse dans le milieu médical ou des équipements de protection individuelle sur les chantiers. Il est même indispensable pour lui d’imposer une tenue protectrice et de veiller à ce que les salariés la portent. Particulièrement en été où ces derniers ont tendance à troquer les chaussures de sécurité, casques, vêtements de protection contre des tongs, shorts, chapeaux ou casquettes.
Si l’employeur souhaite imposer le port d’une tenue de travail ou d’un uniforme, il est préférable de le prévoir dans le contrat de travail, ainsi que dans le règlement intérieur ou dans une note de service. Rappelons d’ailleurs que, dans ce cas, c’est à lui de prendre en charge leur entretien.
Bien évidemment, en cette période de crise sanitaire, il existe un élément qui doit être obligatoirement porté et sur lequel l’entreprise ne doit pas transiger : le masque ! Il reste pour le moment obligatoire dans les lieux de travail partagés et clos. Il est recommandé de faire usage, a minima, d’un masque grand public de catégorie 1.

Des adaptations sont toutefois possibles. Par exemple pour les employés qui travaillent seuls dans un bureau.

Concernant l’autre cas de figure qui peut amener l’employeur à restreindre la liberté de ses salariés de se vêtir comme bon leur semble, à savoir l’image de l’entreprise, les choses sont un peu plus compliquées.

Il est en effet plus difficile d’apprécier les restrictions qui peuvent être imposées car elles dépendent de chaque entreprise et du personnel concerné.

Ainsi, il paraît justifié d’imposer des règles aux commerciaux, aux salariés en contact avec la clientèle.

Par exemple, la Cour de cassation a déjà jugé que le port d’un bermuda, s’agissant d’un salarié pouvant être en contact avec la clientèle, constitue une tenue vestimentaire incompatible avec ses fonctions et ses conditions de travail. De même pour une salariée d’une agence immobilière, elle aussi en contact avec la clientèle, il a été jugé que son employeur pouvait lui interdire de se présenter au travail en survêtement.
En revanche, il paraît plus compliqué d’imposer des restrictions aux employés qui travaillent dans des bureaux et ne sont pas amenés à rencontrer des clients.
Dans tous les cas, l’employeur peut parfaitement exiger de ses salariés une tenue décente (il est logique d’interdire à un salarié se pointer au travail en maillot de bain !) et qui ne soit pas contraire aux bonnes mœurs.
Dernier point de vigilance pour l’employeur (et non des moindres) : le risque de discrimination. Si le port du short est autorisé pour les femmes, difficile de l’interdire aux hommes…

Anne-Lise Castell. Juriste en droit social et rédactrice au sein des Éditions Tissot. pour RésoHebdoEco.

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Pic de chaleur et tenue vestimentaire : que peut-on imposer aux salariés ?

La réforme du congé de paternité et de l’accueil de l’enfant s’applique aux naissances qui interviennent à compter du 1er juillet 2021 et à celles qui étaient prévues à partir de cette même date. Une partie du congé paternité devient obligatoire. Sa durée est également allongée.

La réforme du congé de paternité et de l’accueil de l’enfant a été mise en place par la loi de financement de la Sécurité sociale 2021. Les nouvelles dispositions s’appliqueront aux enfants nés ou adoptés à compter du 1er juillet 2021, ainsi qu’aux enfants nés avant cette date, mais dont la naissance était supposée intervenir à compter du 1er juillet. Le droit au congé de paternité de l’accueil de l’enfant est ouvert au père, le cas échéant, au conjoint ou concubin de la mère ou la personne liée à elle par un PACS. Les deux principales mesures de cette réforme sont l’allongement de la durée du congé de paternité et surtout une partie de ce congé qui devient obligatoire, sauf exception. Ainsi, pour les naissances prévues à partir du 1er juillet 2021, le congé de paternité et d’accueil de l’enfant est de 25 jours calendaires, 32 en cas de naissances multiples.

Le congé est composé :

  • d’une période obligatoire de quatre jours calendaires consécutifs immédiatement prise après le congé de naissance. Lorsque l’état de santé de l’enfant nécessite son hospitalisation immédiate après la naissance dans une unité de soins spécialisée, cette période de quatre jours consécutifs est prolongée de droit, à la demande du salarié, pendant la période d’hospitalisation, dans la limite d’une durée maximale de 30 jours consécutifs ;
  • d’une période de 21 jours calendaires fractionnable (ou 28 jours en cas de naissances multiples).

Le délai dans lequel les jours de congé doivent être pris, ainsi que les modalités de fractionnement de la période de congés de 21 jours (ou 28) ont été fixés par décret.

Allongement du délai de prise du congé
Le décret allonge le délai durant lequel le congé de paternité et d’accueil de l’enfant peut être pris.Ainsi, pour les naissances prévues jusqu’au 30 juin 2021, le congé doit être pris dans les quatre mois suivant la naissance, sauf exception.
Pour les naissances prévues à compter du 1er juillet 2021, le congé de paternité et d’accueil de l’enfant peut être pris dans les six mois suivant la naissance.

Il peut être reporté au-delà des six mois dans les cas suivants :

  • hospitalisation de l’enfant. Le congé est pris dans les six mois (au lieu de quatre) qui suivent la fin de l’hospitalisation ;
  • le décès de la mère. Le congé est pris dans les six mois (au lieu de quatre) qui suivent la fin du congé dont bénéficie le père dans une telle situation.

Communication de la date prévisionnelle d’accouchement
Le salarié doit respecter un délai de prévenance pour communiquer à l’employeur la date prévisionnelle de l’accouchement. Ce délai est d’au moins un mois avant la date prévue de l’accouchement.
Mais si la naissance intervient avant cette date, le salarié peut, s’il le souhaite, débuter la ou les période(s) de congé au cours du mois suivant la naissance. Pour cela, il doit informer son employeur sans délai de son choix.

Fractionnement du congé de 21 jours (ou 28 jours)
La période de congé de 21 ou 28 jours peut être fractionnée en deux périodes d’une durée minimale de cinq jours chacune.
Le salarié doit informer son employeur des dates de prise et des durées de la ou des périodes de congés au moins un mois avant le début de chacune des périodes.
Sauf exception, il est interdit d’employer le salarié pendant le congé de naissance de trois jours ouvrables minimum et pendant la première période de congé de paternité et d’accueil de l’enfant de quatre jours calendaires. Si la naissance de l’enfant intervient alors que le salarié a pris des congés payés ou un congé pour évènements familiaux, l’interdiction d’emploi débute à l’issue de cette période de congés. Attention, l’interdiction d’emploi n’est pas applicable au congé de paternité et d’accueil de l’enfant lorsque le salarié ne peut pas bénéficier des indemnités journalières.

Source : Décret n° 2021-574 du 10 mai 2021 relatif à l’allongement et à l’obligation de prise d’une partie du congé de paternité et d’accueil de l’enfant, Jo du 12

Isabelle VenuatJuriste en droit social et rédactrice au sein des Éditions Tissot pour Réso Hebdo Eco

Isabelle Venuat

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