18 juin 2025 |

Ecrit par le 18 juin 2025

56e édition du Festival Off d’Avignon, tout sur le bilan 2022

La 56e édition de 2022 du Festival off d’Avignon a signé le retour de 1 570 spectacles dans 138 lieux. En 2021 les spectacles étaient au nombre de 1 070 dans 116 lieux. En revanche la fréquentation du plus grand théâtre du monde a chuté passant de 300 000 à 270 000 spectateurs. Un chiffre à mettre en rapport avec la désaffection des salles culturelles au niveau national impacté de 20 à 30% pour certains, par les alertes canicules et la propagation du covid pour d’autres et, sans doute aussi, d’une inflation galopante de 6,1% en juillet 2022 contre 2,2% en 2021.

Les membres du bureau d’AF&C, de gauche à droite Raymond Yana, Laurent Rochut, Laurent Domingos, Harold David,  Hugues Leforestier, Jérémy Bourges

La fréquentation du Festival Off
«En 2019 AF&C avait estimé à 300 000 le nombre de spectateurs venus assister aux spectacles pour 1,7 million de billets délivrés resitue Harold David co-président de AF&C. Bien que les chiffres ne soient pas encore remontés des théâtres d’Avignon et des compagnies, puisque nous n’y avons pas accès. Si on s’appuie sur le nombre de cartes off nous pensons que 270 000 spectateurs étaient au rendez-vous de cette 56e édition pour 1,5 million de billets délivrés.»  

La carte off
«Nous avons vendu cette année 59 000 cartes du off contre 67 000 (-8 000) en 2019, déplore Laurent Domingos, co-président du Festival off. Près de 16% des détenteurs de cette carte résident dans le Vaucluse et 11% ont entre 12 et 25 ans. Cette carte off permet de bénéficier d’un tarif réduit de 30% sur les spectacles, d’entrer dans des lieux culturels et patrimoniaux de la Ville à petit prix, d’assister aux concerts, au bar du off ainsi qu’à d’autres événements sur le territoire national. Ce chiffre fait écho, en 2022 à la baisse de fréquentation des scènes sur l’ensemble du territoire de l’ordre de 20 à 30%.»

+15% de Ticket’Off
«L’année est record pour les Ticket’off –la billetterie solidaire- avec 116 268 places achetées ce qui a permis d’abonder le Fonds de soutien à la professionnalisation à hauteur de 116 268€ pour les années 2022 et 2023, a entamé Harold David, précisant que 90% des spectacles présentés y figuraient. C’est aussi l’endroit où les spectateurs peuvent faire leur choix de spectacles. Nous pensons que cette hausse du nombre d’utilisateurs de Ticket’off est due à de nouvelles pratiques préférant le digital en réaction à la crise sanitaire.»
«En 2019 nous étions en dessous des 100 000 billets,» a précisé Laurent Rochut.

Harold David Co-président du off

Les accréditations professionnelles
«En 2019 près de 2 647 personnes avaient été accréditées Festival Off dont 610 pour la presse, détaille Harold David. Cette année nous avons délivré 1 928 accréditations dont 420 accréditations pour la presse. Nous avons reçu moins de programmateurs sans doute à cause du Covid. Le nombre d’accréditation est inférieur à celui de 2019. Cela est volontaire de notre part puisque nous avons voulu sélectionner de manière plus drastique les professionnels qui demandent une accréditation car nous pensons que par le passé, il y a peut-être eu un certain laisser-aller, ce qui fait que beaucoup de cartes étaient données à des personnes qui  n’avaient pas forcément de rôle professionnel à jouer vis-à-vis des compagnies. Nous avons comptabilisé pour le moment plus de 2 000 retombées presse ainsi que beaucoup d’articles parus au national et à l’international, dont beaucoup de papiers de fond sur Avignon Festival et Compagnie, notamment sur le projet que nous portons.»  

Déplacement géographique du Village du Off
«
Le village du off est désormais près d’un axe central d’Avignon à l’école Bouquerie, 6 rue Pourquery de Boisserin (Ndlr : en face de la Scala, ancien Pandora pour cause de travaux dans l’école Simone Veil –ancienne école Thiers, rue des écoles) détaille Laurent Domingos. 7 000 personnes par jour fréquentent le Village du off dont 800 personnes le soir, lors des concerts. Le village du off est devenu une maison commune où public, artistes et professionnels se rencontrent vraiment. 150 évènements y ont été organisés : conférences, tables rondes, ateliers, concerts.» « Il nous reste beaucoup de travail à faire afin de rendre plus uniforme la fréquentation du lieu, notamment pour les tables rondes. Le déplacement géographique du Village du Off a joué en faveur de sa visibilité, notamment envers le public, qui a mieux identifié cet espace et y a passé plus de temps, s’y restaurant, s’y attardant…» a relevé Harold David.

Le fonds de soutien à la professionnalisation
«En 2022, 82 spectacles ont été identifiés comme bénéficiaires, précise Harold David, 262 artistes -126 hommes, 136 femmes et 2 personnes en situation de handicap- soutenus pour 1 569 représentations et un montant total 180 546€.»

Le partenariat avec la Maison Jean-Vilar-BNF
«La Maison Jean Vilar qui est également à l’année l’antenne de la BNF (Bibliothèque nationale de France) collecte, comme chaque année, programmes, dossiers de presse, affiches et autres supports des compagnies du Off et est partenaire avec AF&C du concours de la plus belle affiche.» 

La Nouvelle majorité
«Nous sommes issus d’une nouvelle majorité élue en avril 2022, cette édition est donc un test, même un crash test d’après certains, relate Harold David. L’ADN du Off est l’indépendance alliée à l’intelligence collective. Nous voulons valoriser et préserver la richesse et la diversité de la création artistique ; soutenir et accompagner ceux qui font le festival, les acteurs du off et permettre à tous d’accéder au festival.»

L’expérience avignonnaise
«Ce qui compte, c’est de travailler en amont avec les compagnies pour qu’elles sachent si elles peuvent ou pas faire Avignon, expose Laurent Domingos. Qu’elles puissent être mieux préparées, mieux formées par rapport à leur budget prévisionnel, à l’ensemble des subventions qu’elles pourraient toucher et être parrainées par des compagnies plus expérimentées. Nous mettrons en place ce dispositif dès la rentrée. L’expérience avignonnaise doit devenir positive.»

Laurent Domingos, co-président du Off

Promouvoir les compagnies étrangères
«J’ai été surpris par le rayonnement du Festival off à l’international, reprend Laurent Domingos. Des compagnies sont venues de Taïwan, de la Corée, du Brésil, de Québec, de la Suisse, de Belgique et des pays frontaliers. » « Nous avons reçu des délégations officielles et d’autres plus informelles, a complété Harold David, venues s’enquérir de la façon de collaborer ensemble dans la durée. Nous avons évoqué la meilleure façon d’accompagner les compagnies étrangères. Si nous voulons être à la hauteur il nous faudra nous donner les moyens pour recevoir de façon beaucoup plus professionnelle ces compagnies de l’autre bout du monde. Nous allons organiser un bureau d’accueil dévolu aux compagnies étrangères pour les accompagner sur les lieux, la réalité du festival, mais aussi sur le franchissement des frontières. Notre rôle sera de lever les difficultés. Nous travaillerons à offrir une meilleure visibilité du théâtre étranger, via un tiré à part et le Village du Off avec un pool ‘international’.» 

Concevoir un parcours Off à l’export
«Nous pourrions imaginer une réciprocité avec un parcours du Off à l’export, observe Harod David. La question : Comment faire lorsqu’ AF&C n’est pas le programmateur du festival off ? Peut-être passer par un appel à projets, à candidatures, entrer dans un dispositif de résidence… Si une vingtaine de pays accueillaient 5 compagnies alors 100 spectacles pourraient partir faire le tour du monde… »

Un projet triennal 2023-2026 pour structurer l’accompagnement du Off
«Nous abordons un projet triennal : 2023-2026 dont nous ferons la présentation à la rentrée, révèle Harold David. Il s’érige autour de 5 piliers en accord avec la nouvelle ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, qui nous a rendu visite le 9 juillet dernier ainsi que la Drac Paca (Direction régionale des affaires culturelles Provence-Alpes-Côte d’Azur), les collectivités territoriales et partenaires du Off.»

Les 5 piliers
«Nous voulions un projet structurant de conviction et politique demandant un engagement financier rappelle Harold David. Un tour de table avec les institutionnels et les professionnels sera mis en place à la rentrée pour une charte rédigée avant la fin de l’année. Les 5 piliers sont :
1. Une gouvernance reposant sur l’indépendance et l’intelligence collective ;
2. L’éco-responsabilité et sa phase opérationnelle ;
3. La professionnalisation avec un accompagnement et revisiter le fonds de professionnalisation qui n’atteint pas encore ses objectifs notamment auprès des compagnies émergentes ;
4. Le modèle économique avec comment passer d’une économie saisonnière à une économie hors saison en faisant d’Avignon et de ses territoires une fabrique des arts vivants avec nombre de théâtres qui souhaitent s’ouvrir aux résidences associées, à la réception des publics et travailler à une filière du théâtre indépendant, une Cinecittà d’un théâtre à la française ;
5. La diffusion qui est une vraie problématique du spectacle en France. S’il y a 1 570 spectacles proposés dans le Off c’est qu’il y a un vrai besoin des compagnies de montrer leur travail. Le festival donne un cadre à la relation commerciale avec un équilibre des forces. Cette régulation passera par le développement de nouvelles pistes, notamment en accompagnant mieux et plus les programmateurs au niveau national et international.»

Chloé Suchel, responsable de la communication AF&C

Le Plan média
«Nous avons fait le choix de la régionalisation plutôt que de la ‘parisianisation’ de l’information pour le plan média du festival Off, précise Harold David. Nous travaillons sur deux logiques : en amont et sur la dernière semaine du festival, indique Chloé Suchel, responsable de la communication. Depuis plusieurs années nous organisons un affichage à partir du mois de juin dans les 120km autour d’Avignon : Lyon, Montpellier, Marseille. L’idée ? Toucher les personnes qui peuvent facilement se déplacer, une journée ou deux pendant le festival. Nous nous implantons aussi sur le calendrier d’autres manifestations culturelles comme Les rencontres photographiques d’Arles puisque nous sommes sur les mêmes publics cible, nous recherchons des événements connexes. De début juin à fin juillet nous totalisons 800 faces en affichage urbain. Nous avons un partenariat avec France Télévision lors d’une campagne signée pour la dernière semaine de juillet afin de souligner qu’après le In il y a toujours le off. Nous avons des spots publicitaires avec France Bleu Vaucluse et France Bleu au national. Nous ciblons également les 12-25 ans via des médias spécifiques.»
«Nous avons mis en place des échanges de valorisation avec des supports papiers comme Télérama, Le Parisien, précise Harold David. Pour 2023, la question est prématurée. Nous prendrons en compte les résultats de cette année. Cela fera partie des sujets à aborder à la rentrée.»

La conférence de presse au Village du off lors du pré-bilan du Festival off d’Avignon

56e édition du Festival Off d’Avignon, tout sur le bilan 2022

Pour la 16ème année consécutive, les critiques du Club de la presse Grand Avignon Vaucluse viennent de remettre les prix ‘Coups de Cœur’ du Festival Off à quatre spectacles.

Parmi dix spectacles sélectionnés, le Jury du Club de la presse Grand Avignon-Vaucluse a attribué les prix ‘Coups de Cœur du #OFF2022’ à quatre spectacles. Les critères de sélection étaient basés sur le texte, la créativité, la qualité scénique, l’implication et le talent des artistes.

‘Le journal intime d’adam et eve’ (Sham’s bar théâtre), par Cie Family Francis Grisol

Très loin du mythe religieux, c’est une œuvre unique en son genre : l’adaptation, pour la première fois en français, de trois livres de Mark Twain. Nous y suivons les deux premiers habitants de la Terre à travers leur rencontre, leur histoire d’amour et leur découverte du monde. De nombreux thèmes comme la peur , le pardon, le langage, la sexualité, la naissance, mais aussi la mort sont abordés en douceur tout au long de la pièce. Une écriture limpide et féministe, touchante et équilibrée entre des considérations profondes et un humour affiché. La mise en scène épurée n’en demeure pas moins riche de sens par le choix des postures et des costumes. Comme enfermé dans une boule de neige, le duo interagit avec subtilité avec son public tout en maintenant un jeu de comédien équilibré et sensible. Pièce émouvante, touchante et poétique.

‘Believers’ (Théâtre Le Grand Pavois), par la Compagnie Le 6’Thèmes Théâtre

Une histoire à la fois triste et belle, profonde et touchante, qui se compose à quatre mains pour un seul jeune couple que l’on voit s’aimer, se construire, fonder une famille… Une mise en scène étonnante et créative dans laquelle le décor tourne autour d’un seul objet : un lit, symbole du nid, de l’îlot dans lequel on se réfugie pour l’amour ou quand rien ne va plus. Des sujets forts : l’amour, la mort, la croyance, la responsabilité parentale, l’espoir bien sûr aussi… Et s’Il existe, Dieu, où est Il dans tout ça ? Pour qui ? Pourquoi ? Avec en filigrane la philosophie de Kierkegaard … et le Wonderful word de Black / Colin Vearncombe, si troublant ! De jeunes comédiens merveilleux et percutants, inoubliables, dans ce rôle trop sérieux de jeunes parents affectés par le handicap d’un enfant. Une terrible et belle leçon de vie.

‘Bienvenue au Bel Automne’ (La Luna), par la Compagnie Cavalcade

Avec ce spectacle, on est face à la vieillesse, certes, mais pour débloquer les portes du silence, rompre les tabous et célébrer la vie. Sylvia Bruyant, auteure et metteuse en scène de la pièce, saisit avec une plume au réalisme incisif et à l’humour tendre l’univers d’un EHPAD et crée avec talent un lien fort entre la grande vieillesse et les vieux en devenir que nous sommes. Elle dit elle-même aimer écrire sur les sujets qui la dérangent. On peut même dire « sur les sujets qui dérangent ». Dans cette pièce, donc, qualifiée par l’auteure de « fantaisie douce-amère », on retrouve Virginie, aide-soignante, qui vient d’être mutée à la maison de retraite « Le Bel Automne ». Parce qu’elle cherche désespérément à avoir un enfant, elle pense soulager sa douleur en passant des nouveau-nés aux vieillards. Avec elle, on découvre les autres membres de cette petite communauté : Maïté l’autre aide-soignante encartée CGT, la directrice quelque peu hystérique mais bienveillante, Dolorès infirmière misanthrope, le docteur, mais aussi toute une galerie de portraits des résidents, des lieux et des visiteurs, tous plus attachants les uns que les autres. Et ce combat pour devenir maman, comme un fil rouge, fait écho à ces fins de vie qui nous racontent tellement la vie. Qu’est-ce que le théâtre sinon une succession d’instants hilarants de tendresse qui nous amènent à questionner le monde et sa réalité parfois si cruelle ? Qu’est-ce que le théâtre sinon ce grand éclat de rire qui nous assaille comme une vague bienfaitrice et bouleversante ? ‘Bienvenue au Bel Automne’ est en cela un grand moment de théâtre. Parce qu’on en ressort grandi d’émotion et secoué du rire qui nous réconcilie avec la vie.

‘Der Menschen fresser Berg… ou la montagne’ (Episcène), par La Compagnie des Vrais Majors

Un spectacle de rue adapté à la scène, présentant une sortie de résidence du montage de l’adaptation du film allemand de 1930, ‘Der Menschen Fresser Berg’. Un spectacle qui casse le 4ème mur en invitant parfois le public à participer, qui casse tous les codes en intégrant également ceux qu’on oublie et qui sont dans l’ombre des pièces: metteur en scène et technicien. La mise en scène est folle, part dans tous les sens, toute la salle est sollicitée par les 4 comédiens qui semblent jouer leurs propres rôles avec une grande justesse. Un festival désopilant de foutraque bien monté, où tout vole en l’air, une bouffée d’air frais montagnard !


56e édition du Festival Off d’Avignon, tout sur le bilan 2022

Avec Délit d’Errance, Faïza Kaddour rend hommage à la grande chanteuse injustement oubliée Colette Magny

Mais qui connaît Colette Magny ? Colette Magny décédée en 1997 est injustement méconnue même si son tube « Mélocoton » refait surface grâce au rap français. Elle avait le talent de mélanger le blues à la poésie, le free jazz à la révolte….On l’a souvent comparée à un Léo Ferré au féminin, à une Janis Joplin à fleur de peau. Elle laisse pourtant une œuvre foisonnante, pas toujours audible quand elle «ouvrait sa gueule ». Des chansons certes mais aussi des collages, des tracts sonores, des actualités slamées de mai 68.

Faïza Kaddour fait sienne sa révolte

Faïza Kaddour n’a jamais rencontré Colette Magny mais quand elle découvre cette voix particulière, ses textes engagés, sa révolte -qui est toujours d’actualité envers l’environnement, la guerre, le racisme- elle se reconnaît dans ce combat et dans cette démarche artistique. Avec délit d’errance elle nous offre un spectacle qui n’est pas seulement un concert même si elle convoque des chanteurs que Colette n’aurait pas renié : Claude Nougaro, HK et les Saltimbanks, Daniel Balavoine, Barbara.

Elle s’adresse à Colette, l’interpelle pour mettre en valeur son engagement au moment de l’Algérie. Tout cela est très joyeux, simple avec juste un brin de folie comme pouvait l’avoir Colette Magny quand elle se passionne pour la pintade, animal indomptable et rêve d’un opéra en son honneur «Kévork et le Délit d’errance ».

Jusqu’au 30 juillet. 20H30. 10 et 15€. Théâtre des Amants .1 Place Grand Paradis.06 33 13 78 07.


56e édition du Festival Off d’Avignon, tout sur le bilan 2022

Olympe de Gouges, cette femme de lettres qui était aussi femme politique fut, durant la révolution de 1789, de toutes les avancées sociales. Pourtant elle fut guillotinée le 3 novembre 1793. Elle avait 45 ans. Pourtant les historiens turent très longtemps la femme exceptionnelle qu’elle fut. Une pièce de théâtre lui rend hommage : Olympe de Gouges plus vivante que jamais, à aller voir au théâtre de l’Episcène. Magnifique.

C’est avec passion que la comédienne, Céline Monsarrat, nous fait découvrir cette femme d’exception dont le destin, tragique fut même poussé dans les oubliettes par les historiens. Pourquoi ? Sans doute parce qu’elle incarne bien avant l’heure, l’émancipation féminine, la liberté et l’altruisme.

Si des rues portent son nom,
nous sommes beaucoup à ne pas avoir en tête ce que furent ses combats. Pour nous les rappeler, Joëlle Fossier, l’auteur de la pièce et Céline Monsarrat déploient les derniers instants de la vie d’Olympe de Gouges, alors qu’elle attend de passer en jugement à la conciergerie. Nous sommes à l’époque de la terreur où la guillotine règne en maître.

Elle sait que l’issue sera fatale.
Mais avant de se présenter à l’échafaud, Olympe de Gouges déroule son existence, retrace son parcours, fustige la violence et les procès arbitraires vilipendant les bouchers-révolutionnaires qui lui font face. Elle égratigne avec force ceux que l’on a croisés dans nos livres d’histoire : Marat, Robespierre et Fouquet Thionville dont elle dénonce la folie stérile et meurtrière.

Ce qu’elle voulait pour la France ?
Une nation ouverte à la différence qui protègerait les plus humbles. Elle se bat contre l’esclavage et les droits des personnes de couleur, les droits des enfants mulâtres, des droits de reconnaissance des enfants naturels ; le soutien aux mères célibataires, la création d’une caisse patriotique… Bref, tout ce qui existe aujourd’hui.

Elle demande
l’égalité des droits civils et politique pour les deux sexes et l’instauration du divorce. Elle met au point un système de protection maternelle et infantile, réclame la création de maternités pour que les femmes accouchent dans de meilleures conditions. Elle prône la création d’ateliers nationaux –organisation pour l’emploi- au profit des chômeurs ; des foyers pour mendiants. Celle qui est considérée comme la 1re féministe de France est aussi une figure de la révolution française… Plus reconnue à l’étranger qu’en France !

(Re) découvir Olympe de Gouges
La pièce est rondement menée, rythmée, saisissante. On connaissait le talent de Céline Monsarrat –la voix, entre autres, de Julia Roberts- qui incarne avec force cette femme aux antipodes de la virago, mais fine, subtile et infiniment courageuse. On aime l’écriture raffinée et intelligente de Joëlle Fossier. Un très beau spectacle qui donne l’envie de retrouver l’héroïne, très vite, pour en savoir toujours plus sur cette époque de la terreur et sur les hommes et les femmes qui la vécurent.

Les infos pratiques
Olympe de Gouges, plus vivante que jamais. Jusqu’au 30 juillet. Relâche le 25 juillet. 13h10. Théâtre l’Episcène. 5, rue Ninon Vallin. Avignon. Réservation 04 90 01 90 54.


56e édition du Festival Off d’Avignon, tout sur le bilan 2022

Alors vous êtes venus?
Fidèle du festival, Pépito Matéo commence toujours ainsi ses spectacles. Oui nous, les fidèles de ce conteur hors pair, venons toujours pour comprendre et réentendre les malentendus de notre langue française.

Mais où sommes nous ?
Dans une salle de classe ou dans un centre de rétention de demandeurs d’asile ? Qu’importe ! Cette leçon concerne tout le monde, langue française ou pas. Nous partons en voyage à travers le monde et les cultures et découvrons les multiples sens de la langue, ses aberrations,faux amis et ses incohérences parfois.

Les mots pour le dire
« un auxiliaire devrait t’aider ce qui n’est pas le cas d’avoir », pourquoi squelette est masculin alors que tous les mots en ‘ette’ sont féminins ? Le Covid ou La Covid ? Etc.. Aucun répit dans une traque humoristique de l’usage de notre langue et celles de nos voisins.

Les langues se délient , les langues se délitent, les langues expriment notre penser et nous font changer de point de vue.

On s’étonne, on rit , on remue des souvenirs, et on en redemande en fournissant à la sortie du spectacle quelques pépites personnelles qui pourront peut-être intégrer la prochaine leçon de Pépito qui ne voulait peut-être rien nous enseigner mais qui nous a beaucoup appris dans la bonne humeur.

Le spectacle est joué jusqu’au 16 juillet au théâtre Artéphile. A l’année prochaine j’espère Mr Matéo.  www.pepitomateo.fr


56e édition du Festival Off d’Avignon, tout sur le bilan 2022

Entre l’actrice Anissa et le metteur en scène Ahmed Madani, c’est déjà toute une histoire.
Depuis 2012, Madani Compagnie s’intéresse au destin de la jeunesse des quartiers populaires. Le metteur en scène Ahmed Madami est régulièrement présent au Festival Off. Nous avons pu notamment apprécier : Illumination(s) en 20202, Incandescences en 2021 ou F(l)ammes qui tourne depuis 2016. C’est d’ailleurs à l’occasion de ce dernier spectacle qu’Ahmed Madani remarque Anissa qui est l’une de ses interprètes et apprend son histoire : elle n’a jamais connu son père et le recherche.

Anissa n’a pas su dire non
Ahmed Madani, fasciné par cette histoire, propose à Anissa de partir à la recherche de cet homme sans nom et d’en faire un spectacle. Après bien des hésitations, Anissa pose des conditions que le spectateur va découvrir, accepte celles d’Ahmed qui est d’être filmée et de monter un spectacle.

Spectacle ou conte de fée?
Anissa, qui n’est pas une actrice professionnelle (dit-elle) mais qui est à l’aise dans sa cuisine choisit de cuisiner tout au long du spectacle des chouchous et des gâteaux au chocolat. C’est bon, ça sent bon, et ça permet de modéliser le temps écoulé de cette en-quête criante de vérités et de rebondissements. Le père retrouvé va-il dire oui ou non?

Un spectacle interactif bluffant
On peut ne pas aimer les sollicitations à participer. Elles sont peu nombreuses et toujours bienveillantes. Le procédé a pourtant du sens car il est à mon avis sincère et  permet de nous immiscer dans cette histoire en faisant des ponts avec notre propre histoire.  Il nous permet de participer à cette quête du père et d’ouvrir le champ des possibles avec les différents points de vue des spectateurs sans être voyeurs. Le suspense est maintenu et nous passons de l’émotion au rire ou sourire tout en confiance.

Jusqu’au 29 juillet. 9H50. 8 à 20€. Relâche les 19 et 26 juillet. Le 11. 11 boulevard Raspail. 04 84 51 20 10. www.11avignon.com


56e édition du Festival Off d’Avignon, tout sur le bilan 2022

Les fans de Valérie Perrin, autrice du best-seller ‘Changer l’eau des fleurs’ étaient au rendez vous dans la salle du Chêne Noir archi-comble.

Envie de réentendre cette belle histoire, curieux de découvrir l’adaptation de ce roman à succès qui se range dans la catégorie des romans « feell good», ceux qui font du bien car quoi qu’il arrive, l’envie de vivre triomphe.

Quand on a accepté les règles de ce genre d’histoire on se laisse porter par la belle actrice qu’est Caroline Rochefort tout en simplicité soulignée par son accent volontairement prononcé, qui pousse «droite» comme elle dit et surtout qui avance tout en refusant -car trop tard -de vivre un nouveau grand amour. Michaël Chirinian et Morgan Perez sont également très touchants de sincérité.

Pour ceux qui ne connaissent pas l’histoire
L’action se déroule dans un cimetière en Bourgogne. Violette en est la gardienne, elle connait tout de ses «pensionnaires » qui morts ne posent plus aucun problème. Pourtant elle aussi a un secret qu’on découvre peu à peu à l’occasion de la visite d’un inconnu…

Changer l’eau des fleurs. Jusqu’au 30 juillet. Relâche les 11, 18 et 25 juillet. 15H15. 16 et 23€. Théâtre du Chêne Noir. 8 bis, rue Sainte-Catherine. Avignon. 04 90 86 74 87. Réservation ici. contact@chenenoir.f


56e édition du Festival Off d’Avignon, tout sur le bilan 2022

On aime la programmation du Chêne noir pour son éclectisme. Pourquoi ? Parce que c’est toujours rafraîchissant de picorer ci et là la pensée de grands auteurs, de les découvrir autrement que sous la forme de mots imprimés sur du papier. Alors que le texte épouse le souffle des comédiens la magie s’empare de l’homme et nos esprits s’ouvrent comme des nénuphars sur un étang.

Il y a, tout d’abord, Les chaises de Ionesco.
L’histoire ? Un couple de vieillard vit dans une mansarde battue par le vent et les embruns. Tous deux sont au crépuscule de leur vie. Lui a préparé tout au long de sa vie un discours qu’il souhaite infuser au monde entier par l’intermédiaire d’un grand orateur. Elle le révère ce mari idéal, le phare de sa vie qui la retient encore un peu à la raison alors que sa mémoire s’enfuit. Ils se préparent à recevoir tous les grands de ce monde pour délivrer le message d’une vie.
Avis
Nous avons adoré les décors, les masques, la faconde des comédiens, leur jeu tourbillonnant, virevoltant retraçant la vie qui file dans un monde qui tourne. Ionesco enfin à portée de compréhension ça n’est pas commun. L’exercice pourtant difficile paraît là un jeu d’enfant. Un très bon moment de spectacle où tout concorde : mise-en-scène, dynamisme des comédiens. Il ne reste plus rien du théâtre de l’absurde alors que le metteur en scène et les comédiens nous offrent la compréhension de notre vie. D’un seul coup on comprend Ionesco et ils nous ont même appris à l’aimer.
Les infos pratiques
Jusqu’au 30 juillet. 10h15. Théâtre du Chêne noir. Relâche 11, 18 et 25 juillet. 8 bis, rue Sainte-Catherine à Avignon. 04 90 86 74 87. Tout le programme ici. Réservation ici.

DR

Lettres à un ami allemand
Qui a réussi à ne pas tomber amoureuse d’Albert Camus, le sale gosse d’Alger qu’un instituteur, de grande vocation, sauva du ruisseau ? Les professeurs des écoles sont les héros invisibles de notre société d’images sans paroles. Ici, un homme s’apprête à faire un discours pour la Paix aux Nations Unies. Il va relire Lettres à un ami Allemand d’Albert Camus pour s’en inspirer. mais peut-on écrire mieux que Camus ?
Avis
La silhouette et le phrasé de Didier Flamand s’inscrivent depuis des décennies dans la mémoire collective française pour son élégance et qu’il porte Albert Camus sur scène nous donne déjà des frissons. L’auteur qui fut raillé en son temps pour des prises de positions jugées trop tièdes –notamment pendant la guerre d’Algérie- est depuis bien longtemps salué pour son acuité, sa verticalité, son humanisme tout autant que sa propension à la discrétion en toute chose. Lettres à un ami Allemand se déguste tout au long de la soirée. On apprécie le décor, les projections vidéo, bien sûr le propos continue de résonner aux portes de l’Europe alors que le conflit s’enlise dans une Ukraine à genoux. Une magnifique pièce portée par un comédien de talent.
Les infos pratiques
Jusqu’au 30 juillet. Lettres à un ami Allemand. 11h45. Théâtre du Chêne noir. Réservation ici.

DR

Le jeu du président
Julien Gélas a écrit le Jeu du président pendant le confinement, alors qu’il est complètement captivé par l’exercice du pouvoir d’Emmanuel Macron. Non pas qu’il le révère mais plutôt l’examinant à la tâche. Quel est cet homme qui s’empare du pouvoir, sortant de nulle part et n’ayant, auparavant, jamais exercé de mandat politique ? Quel est son rapport à lui-même et aux autres ?
Avis
Julien Gélas, l’auteur, imagine les arcanes du pouvoir, le jeu subtil des conseillers du président en coulisses. Des hommes –et une femme- sortes d’archétypes, affables et voraces à la fois courtisans et stratèges. Leur ambition ? Rester le plus longtemps possible sous les ors de la République. Pendant ce temps les Luttes intestines font et défont les réputations, réduisant des vies à leur plus simple appareil. Dispose-t-on encore de son destin aux côtés de Machiavel ? De son narcissique miroir le président jouit des petits jeux sadiques en son palais. Bien malin qui saura qui trahi qui. Mais Machiavel lui, reste intemporel.
Les infos pratiques
Jusqu’au 30 juillet. Le jeu du président. Relâche les 11, 18 et 25 juillet. 17h15. Théâtre du Chêne noir. Réservations ici.


56e édition du Festival Off d’Avignon, tout sur le bilan 2022

«J’aurais pu te faire naître durant les Trente glorieuses, la Belle époque… non, toi ce sera extinction de masse, un truc assez rare qui n’arrive que toutes les 30 millions d’années; mais c’est super de voir la fin du film !»
Il était une fois Audrey Vernon. Une maman faussement candide qui écrivait à son enfant à naître. Elle lui décrit le monde, à sa façon, retranscrivant des faits historiques, décryptant les postures des grands de ce monde, la machine du ‘capital’, la terre, les espèces animales… Une épopée très documentée tissée dans la partition mondiale. Ça pourrait être triste, cynique, froid et pourtant c’est tout le contraire : terriblement humain, rigolo, déjanté et intelligent. Audrey en vraie intellectuelle de gauche et lanceuse d’alerte sait très bien faire passer les messages et on en redemande. Un spectacle intelligent, mené à un train d’enfer qui concerne absolument tout le monde.

La Factory. Billion dollar baby. Seule en scène à partir de 14 ans. Audrey Vernon. Jusqu’au 17 juillet Relâche le 11 juillet. Chapelle des Antonins à 21h50. 5, rue Figuière à Avignon. Réservation des places ici.

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