6 mai 2024 |

Ecrit par le 6 mai 2024

En attendant les melons et les pêches…

On attends toujours quelque chose ou quelqu’un. Parfois l’attente est délicieuse, comme en ce début de printemps où les premières récoltes saisonnières de fruits et légumes annoncent le retour de la belle saison. Mais en fait, savons-nous encore vraiment attendre ?

Tout, tout de suite, aujourd’hui c’est la règle. Et dans tous les domaines. Manger des tomates toute l’année, pouvoir joindre tout le monde à tout moment, commander une pizza à 2 heures du matin, regarder un film quand je veux où je veux… (en mangeant la pizza), la liste est sans fin. Rapidité et immédiateté sont devenues des obsessions. Une course sans fin qui nous éloigne du plaisir de l’attente et sans doute aussi quelque part d’apprécier ce qui est attendu ou convoité. Les marchands du temple sont aussi complices dans cette course au temps. La rentrée scolaire se prépare maintenant en juillet et la galette (ou gâteau) des rois se consomme dès décembre. On se calme Ginette !

C’est la nouveauté qui fait le plaisir

Les premières fraises, et pas uniquement celles de Carpentras, ont forcément un goût exquis. C’est la nouveauté qui fait le plaisir, comme la première gorgée de bière ou encore le premier verre de rosé bu à l’ombre des platanes un soir d’été. C’est là que Proust convoque aussi sa madeleine !

Savoir attendre c’est savoir apprécier chacun de ces moments. Quel intérêt d’avoir des fraises pour noël ? L’attente ne fait-elle pas aussi partie des plaisirs ?

Comme l’amoureux transit qui attend le retour de sa belle, ou l’inverse (surtout si elle s’appelle Ginette). Aujourd’hui on ne sait plus beaucoup attendre. On est vite impatient et surtout on veut maitriser et tout décider. Mais avec la nature ce n’est pas tout à fait la même histoire. Même si on cherche toujours à la maîtriser c’est elle qui décide, in fine. Et si ce n’était pas suffisant les conditions météo pourraient bien vous remettre à votre place et vous rappeler qui est le patron. C’est la nature qui donne le tempo et joue les chefs d’orchestre. Elle nous enseigne la patience et le respect du temps.

« Il faut laisser le temps au temps »

Donc pour les asperges et les fraises il faut attendre mars… C’est ainsi. « Il faut laisser le temps au temps » comme disait le lettré François Mitterrand, qui savait comme nul autre se montrer le maître des horloges. Il faut bien reconnaître qu’en Provence et peut être plus qu’ailleurs la nature peut insuffler le bon rythme. Donc en attendant les melons et les pêches sachons apprécier les asperges et les fraises de Provence, bien sûr.


En attendant les melons et les pêches…

Après les laves linges et les réfrigérateurs, la normalisation européenne s’est attaquée à la classification des produits alimentaires, avec le fameux nutri-score. Même si aujourd’hui l’alimentation est devenue une question de santé publique, fallait-il en passer par là et mettre au piloris nos produits du terroir jugés trop salés, trop sucrés ou trop caloriques ?

La mise en œuvre à l’échelle européenne du nutri-score, en 2017, visait d’abord les produits alimentaires transformés et pas forcément nos quelques 800 produits locaux classés en AOP / AOC ou IGP. Mais les mystères des algorithmes de cette classification nous donnent des résultats bien étonnants. Les céréales pour le petit-déjeuner, ultra-transformées, obtiennent une meilleure note que notre Roquefort national. Un comble ! Ces produits qui font toute la fierté et l’identité de nos terroirs se trouvent ainsi sur la sellette.

Les céréales pour le petit-déjeuner, ultra-transformées, obtiennent une meilleure note que notre Roquefort national.

Il n’en fallait pas plus pour agiter tout le landerneau des producteurs et des défenseurs des terroirs. Même Carole Delga, la présidente de la région Occitanie, est montée au front. Totalement dans son rôle, elle a demandé que les fromages d’appellation d’origine ne soient pas soumis aux normes nutritionnelles des produits industriels transformés. Il faut savoir quand même séparer le bon grain de l’ivraie.

Certains ayatollahs du nutri-score sont même allés sur le terrain politique en n’en faisant une question de lutte des classes. Avec d’un côté le bourgeois terroir, décomplexé et de l’autre les prolétaires condamnés à la malbouffe. Ainsi, au nom de l’égalité tous les produits doivent être soumis au même traitement, à la même classification. Il fallait oser.

Notre fameux melon de Cavaillon pourrait être jugé trop sucré

A vouloir trop de normes de classification on frise parfois le ridicule (voir chronique de la semaine passée). Ainsi notre fameux melon de Cavaillon, toujours en attente de sa classification IGP, pourrait être jugé trop sucré, alors que c’est justement cela qui le distingue (entre autres). Je ne vous parle même pas des cerises du Ventoux ou de Saint-Didier. Rien que d’en parler j’en salive. Non, on ne pas mettre tous ces productions uniques et issues des terroirs dans le même sac, avec de vulgaires paquets de chips industrielles ou des lasagnes congelés, fabriqués avec des lingots de viande à la provenance douteuse.

Certes l’étiquetage du nutri-score n’est pas obligatoire et reste encore volontaire. Mais jusqu’à quand ? Les lobby industriels sont à la manœuvre. Et les partisans de son obligation sont nombreux. Même si le discours officiel est de dire qu’il ne s’agit pas de proscrire ces aliments mais d’inciter à la modération, avons-nous besoin là encore qu’on nous tienne la main ?

Le Roquefort existait bien avant que le nombre d’obèses et le nombre d’accidents cardio-vasculaires n’explosent. Non ? Une époque formidable disais-je !


En attendant les melons et les pêches…

A chaque produit remarquable, sa capitale. Les calissons sont forcément d’Aix, les bêtises de Cambrai, les noix de Grenoble (quoique le Périgord est aussi sur le coup), les cerises du Ventoux (ça c’est plus récent, faut enfoncer le clou), les cocos de Paimpol (qui l’eut cru ?), les oignons de Roscoff, le piment d’Espelette (évidemment), les rillettes du Mans (incontournables), les anchois de Collioure (quoique pêchés pour la plus part dans l’Atlantique eh oui…), les lentilles du Puy, les citrons de Menton (vraiment exceptionnels) etc, etc… Mais pour le melon ? Quelle ville peut prétendre au titre de capitale ?

De nombreux prétendants
Tout d’abord il convient de faire, dans un premier temps, un choix régional. C’est essentiel et fondateur. Il existe, en France, 5 départements producteurs de cette cucurbitacée. Trois sont dans le sud : Tarn-et Garonne, Hérault et Vaucluse ; et deux quasiment dans « le Nôôrd » : les Deux-Sèvres et la Vienne. Nous avons écarté les productions espagnoles et marocaines. Pour le Maroc, nouvel entrant sur les étals de nos primeurs, il est à noter qu’il est inscrit sur les étiquettes de certains d’entre eux (obligatoires merci l’Europe) Melon Charentais…produit au Maroc. On pourrait  comprendre qu’il s’agit d’une variété et non un lieu de production mais en l’espèce comme les deux se confondent il y a de quoi y perdre son latin. Le consommateur en parfait comptable de ses deniers pourrait se dire : « Tiens des melons charentais au prix du marocain, voilà la bonne affaire ! ». On n’est pas loin de la tromperie. Mais bon.

Méditerranéenne ou atlantique ?
Revenons en France et au dilemme qui nous occupe, le melon doit-il être sous influence méditerranéenne ou atlantique ? On peut imaginer ce que pensent les uns des autres.
Rappelons cependant qu’il faut beaucoup, beaucoup  de soleil (et accessoirement aussi beaucoup d’eau) pour faire un bon melon et qu’entre les deux climats il n’y a pas photo. Signalons à toutes fins utiles que le melon nous vient, à son origine, d’Afrique, continent où chacun sait, et sans faire injure aux habitants de la Vienne et des Deux-Sévres, que le soleil y est particulièrement présent.

« Melon de Cavaillon ça sonne quand même mieux que melon de Castelsarrasin ou de Béziers. »

Un melon sans capitale
Comme nous sommes un poil chauvin, et que nous l’assumons totalement, on va donner le point aux départements sudistes. Une fois ce pré requis, les zones de production étant tellement larges qu’il nous faut zoomer un peu plus. Sur ces 3 départements quelle ville peut se revendiquer d’être la capitale du Melon ? On aurait tendance à dire « naturellement » Cavaillon tout d’abord pour la rime. Melon de Cavaillon ça sonne quand même mieux que melon de Castelsarrasin ou de Béziers.
Si Cavaillon l’emporte à l’indice de « notoriété spontanée » c’est que l’histoire et la tradition y sont pour beaucoup !
Alexandre Dumas (le père), nous dit-on, appréciait tellement les melons de Cavaillon qu’il a passé un deal avec la municipalité de l’époque. En échange du don d’un exemplaire de la totalité de son œuvre gigantesque (près de 400 ouvrages) à la bibliothèque de la ville il a reçu sous forme d’une rente viagère 12 melons par an. La date de cet accord remontant à 1864 et celle de la mort de l’auteur du comte de Monte-Cristo à 1870 on peut dire la bibliothèque de Cavaillon n’a pas fait une mauvaise affaire. 72 melons contre l’intégralité de l’œuvre de Dumas je prends aussi !
Et c’est à partir de cette histoire, nous dit-on toujours que la confrérie des chevaliers du Melon de Cavaillon serait née. Défense de sourire ce n’est pas plus bête que la confrérie des goustiers d’andouille de Guémené. Entre l’andouille et le melon… je vous laisse choisir.

Cavaillon s’est naturellement imposée
De par sa position géographique Cavaillon s’est vite imposée comme une capitale de production maraichère. La richesse de ses terres, son ensoleillement et son système d’irrigation et puis au début du XIXe  l’arrivée du train jusqu’à Paris ont fait de Cavaillon ‘The capitale of the Melon’. En effet, les parisiens voyant arriver les melons de Cavaillon, ils les ont naturellement appelé « de Cavaillon ». S’ils avaient embarqué à Orgon, autre gare maraichère de la région, l’histoire en aurait été sans doute différente… Comme quoi cela tient pas à grand-chose…

Ancien directeur général et directeur de la rédaction de Mirabelle TV (télévision régionale en Lorraine), Didier Bailleux a été auparavant consultant dans l’audiovisuel et à travaillé sur plusieurs projets : TNT, SVOD, services en ligne, création de TV locales. En tant que directeur marketing, il a participé, dans les années 1990 et 2000, à la création de plusieurs chaînes thématiques : Canal J, Voyage et Pathé-Sport. Aujourd’hui, il vit en Vaucluse et travaille sur la production de documentaires consacrés aux terroirs.


En attendant les melons et les pêches…

La municipalité de Cavaillon organise samedi 3 juillet 2021, dans le cadre de la manifestation ‘Melon en fête’, un concours culinaire amateur qui a pour objet la réalisation de recettes sucrées ou salées avec pour thème imposé le ‘melon de Cavaillon‘.

Trois beaux prix à gagner, en présence de Jean-Jacques Prévôt :

  • 1er prix : un repas pour 2 personnes à la Maison Prévôt d’une valeur de 200 €
  • 2ème prix : un robot de cuisine d’une valeur de 150 €
  • 3ème prix : une mallette et/ou des ustensiles de cuisine d’une valeur de 80 €

Nombre de places limité,téléchargez le formulaire d’inscription et le règlement. Les plats devront être préparés à l’avance mais dressés sur place au moment du concours. Ils feront l’objet d’une évaluation par un jury composé de 4 personnes. Les formulaires d’inscriptions sont à retourner à l’accueil de la mairie ou bien à envoyer par e-mail à commerce@ville-cavaillon.fr avant le mercredi 30 juin à 17h.

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