12 mai 2024 |

Ecrit par le 12 mai 2024

Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation : L’enjeu du juste prix

« La hausse en qualité ne peut se faire sur le dos de la rémunération de nos agriculteurs », estime le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Julien Denormandie, dans un entretien accordé à Reso hebdo éco*. Conscient que « tout le monde se renvoie la balle », il plaide pour une contractualisation tripartite (agriculteurs, industriels, distributeurs) et des prix non négociables une fois l’accord conclu en premier lieu avec l’agriculteur.

Chaque année, la fixation des prix fait l’objet de tensions entre distributeurs, fournisseurs et agriculteurs. La loi EGalim (2019) avait notamment pour but de pallier ce problème, sans grand succès. Le rapport Papin (fin mars 2021) préconise un calcul du prix des produits agricoles par rapport à leur coût de production. Que comptez-vous mettre en place ?
« Deux choses tout d’abord : premièrement, il n’y a pas d’agriculture sans agriculteurs. Notre souveraineté agro-alimentaire en dépend. Deuxièmement, notre modèle agricole est fondé sur la qualité. La guerre des prix qui perdure est antinomique avec cet ADN. Pour ces deux raisons, la priorité donnée au juste prix payé à l’agriculteur est d’une importance majeure. »
« La loi EGalim a instauré la “marche en avant” du prix, c’est-à-dire établi à partir du coût de la production agricole. C’est absolument nécessaire, mais force est de constater que ce n’est pas suffisant. On assiste aujourd’hui à un jeu de dupes : la relation agroalimentaire est une relation à trois (agriculteurs, industriels, distributeurs) et tout le monde se renvoie la balle et la responsabilité. Il faut renforcer EGalim en allant vers la généralisation de ce qui existe et qui marche : la contractualisation tripartite, des prix non négociables une fois l’accord conclu en premier lieu avec l’agriculteur. Je soutiens la proposition de loi en ce sens du député Grégory Besson-Moreau qui sera présentée en juin à l’Assemblée nationale puis au Sénat. Elle prévoit également d’accroître la transparence du prix d’achat de la matière première agricole par l’industriel et de créer un comité de règlement des différends commerciaux. Sa mise en place pourrait intervenir à l’automne. »
« Il faut sortir de cette injonction d’aller vers toujours plus de qualité et la payer toujours moins chère. La hausse en qualité ne peut se faire sur le dos de la rémunération (déjà faible pour une profession qui travaille énormément) de nos agriculteurs. »

La qualité justement, comment concilier son maintien et la relocalisation de certaines activités de production dans une logique de circuits courts, plébiscitée par les consommateurs pendant la pandémie ? Va-t-on vers d’une part des agriculteurs “industriels” et d’autre part des producteurs-vendeurs ?
« Il faut arrêter d’opposer nos agricultures. Notre agriculture est incroyablement diverse du fait de la diversité même de nos territoires. C’est une richesse. Et même si nous avons plusieurs modèles en France, la taille moyenne de nos élevages reste bien inférieure à celle de la plupart de nos voisins européens ou ailleurs dans le monde. Par exemple, l’élevage porcin français regroupe en moyenne 190 truies en France, contre 10 000 aux États-Unis. »
« La France se caractérise par une agriculture de proximité, une ferme de territoires. Le point commun qui doit être notre unique boussole, c’est la qualité et elle n’est pas synonyme de taille. La crise de la Covid a remis en avant cette priorité. « Le premier médicament, c’est l’alimentation », disait Hippocrate. »

« Il faut arrêter d’opposer agriculture et environnement. »

Le projet de loi Climat et Résilience, voté le 4 mai, prévoit plusieurs mesures pour limiter l’impact de l’agriculture et de l’alimentation. Parallèlement, les agriculteurs veulent être des acteurs moteurs de la transition écologique. Comment conjuguer les enjeux ?
« Il faut là encore arrêter d’opposer agriculture et environnement. Les agriculteurs vivent de l’environnement, chérissent le sol, subissent les effets de la météo comme le gel il y a quelques semaines… Ils sont les premiers à subir les effets du changement climatique et leur prise de conscience est totale. Les transitions agro-écologiques sont déjà là de manière forte dans notre pays. Si on veut continuer de les faire croître, il faut aussi qu’elles soient créatrices de valeur pour les agriculteurs. Plus les produits seront rémunérés comme tel, plus vite les transitions seront importantes. Il faut trouver le bon équilibre. Je le redis, je veux bouger fortement sur la qualité. La loi Climat, qui vient d’être adoptée à l’Assemblée nationale, renforce d’ailleurs significativement aussi cette obligation de qualité dans les produits servis dans la restauration collective. Actuellement, un fruit et légume sur deux est encore importé en France, et plus de 50 % de la viande servie en restauration collective l’est aussi. Demain, le projet de loi prévoit qu’au minimum 60 % des viandes et des produits de la pêche proposés devront être issus de labels de qualité. »

L’artificialisation des terres agricoles est un problème dans nombre de régions françaises. La loi climat évoque cette question – on doit notamment prouver que tout nouveau projet empiétant sur les terres agricoles n’avait pas d’autres possibilités -. Quelles sont les autres alternatives ?
« Aujourd’hui, cette artificialisation a deux impacts, agricole et environnemental contre lesquels il faut lutter. Notre gouvernement a d’ores et déjà limité la construction de grands centres commerciaux à la périphérie de nos communes, à la fois néfaste pour l’environnement, l’agriculture et l’âme de nos villes. Actuellement, les friches industrielles se développent sur notre territoire. Une enveloppe de 300 millions d’euros est prévue, dans le cadre du plan France Relance, pour leur redonner vie. Et ce, afin qu’elles puissent accueillir de nouveaux projets de construction plutôt que ceux-ci soient implantés sur des terres agricoles. La loi est de bon sens sur cette question. »

Installation : « Je crois beaucoup au système de portage foncier »

Ce qui est rare devient cher… Comment pallier la question du coût des terres qui, dans certaines régions, est un véritable frein à l’installation ?
« Aujourd’hui, il faut avoir en tête que 50 % des agriculteurs vont partir à la retraite dans les cinq à sept prochaines années. C’est un défi colossal. Or c’est un métier où l’on commence d’abord par s’endetter massivement pour s’installer. »
« Le 25 mai, le député Sempastous présentera une proposition de loi qui prévoit de mieux encadrer la cession des terres agricoles. Au-delà du droit, il y a un vrai sujet que l’on travaille avec la Banque des Territoires et la Safer (NDRL : Société d’aménagement foncier et d’établissement rural) et dans lequel je crois beaucoup : le système de portage foncier. La Safer et la Banque des Territoires conservent la propriété du terrain et l’agriculteur en a l’usufruit le temps d’avoir une assise financière et de pouvoir l’acheter au prix fixé dès le départ. C’est donc une puissance publique qui porte le foncier pendant dix, quinze ou vingt ans et qui a l’obligation de le vendre, le moment venu, à l’agriculteur qui le cultive. Les travaux sont en cours et j’ai bon espoir de pouvoir mettre ce dispositif en place rapidement à l’heure où les offices fonciers solidaires émergent un peu partout. »
« Aujourd’hui, on a un prix du foncier qui est plus bas que chez nos voisins européens. Nous devons veiller à préserver cet avantage compétitif trop peu valorisé. Spéculer sur le foncier serait une erreur. Et tout le monde doit prendre les responsabilités qui sont les siennes. »

Le bio a le vent en poupe. De nouvelles mesures sont-elles prévues pour soutenir la filière ?
« Le bio, c’est important. Nous renforçons les moyens d’accompagnement et, à la fin du quinquennat, la surface agricole bio aura progressé de 50 % dans notre pays. Il est important de soutenir aussi l’agriculture à haute valeur environnementale (NDRL : qui garantit que les pratiques agricoles utilisées sur l’ensemble d’une exploitation préservent l’écosystème naturel et réduisent au minimum la pression sur l’environnement) pour lequel un crédit d’impôt a été créé en janvier 2021 dans le cadre du plan France Relance. Je crois beaucoup également à l’agriculture de conservation des sols. Trop peu le savent, mais les sols restent le premier endroit, avant même les arbres de nos forêts, où l’on capte le carbone sur terre. Ce sont toutes ces agricultures que je veux développer et soutenir sans jamais les opposer. »

PAC : « Aucune option n’est arrêtée »

La réforme de la Politique agricole commune (PAC) doit entrer en vigueur le 1er janvier 2023. On parle d’un redéploiement d’une partie des subventions européennes pour les producteurs de protéines végétales au détriment des éleveurs. Comment comptez-vous concilier les intérêts divergents des uns et des autres ?
« Aujourd’hui, nous sommes toujours dans les phases de consultation et de concertation. Aucune option n’est arrêtée quant à la répartition de l’enveloppe de 9,5 milliards d’euros validée pour la France par l’Union Européenne. Une enveloppe dont nous avons réussi à maintenir le montant. Ce n’était pas gagné d’avance, mais c’était un enjeu majeur. Le président de la République s’est battu pour. Et nous avons obtenu cette préservation. »
« A ce jour, nous travaillons donc bien à la répartition des budgets et c’est toute la difficulté de l’exercice. Toutes les filières font remonter leurs demandes et mon rôle est de trouver le bon équilibre. Je souhaite une PAC de producteurs, qui permette à la France d’être une vraie puissance agricole. Il n’y a pas de pays fort sans agriculture forte, c’est une conviction que j’ai chevillée au corps. Une PAC de qualité, tournée vers les filières, une PAC des territoires qui prenne en compte leurs spécificités et une PAC qui accompagne les transitions, notamment agro-écologiques. »

« Il faut sortir de cette injonction d’aller vers toujours plus de qualité et de la payer toujours moins chère. »

Et à propos du suicide des agriculteurs ?
« Il y a d’importants travaux parlementaires sur ce sujet qui est une terrible réalité avec des détresses qui se transforment en drame. Parmi les causes, la question des rémunérations est centrale, d’où ma détermination à aller plus loin sur la loi EGalim. C’est un sujet de fond qui dépasse les politiques publiques d’accompagnement. Il faut consolider ce qui marche (réseau Sentinelle, Mutualité Sociale Agricole, Chambres d’agriculture), humaniser davantage les comportements, comme ceux des institutions financières notamment, aller à la rencontre des agriculteurs en difficulté plutôt que d’attendre leur appel… C’est tout cela que nous prenons en compte dans la feuille de route en cours d’élaboration. »

Propos recueillis par Hélène Vermare

*ResoHebdoEco est une association qui regroupe 27 titres régionaux de presse économique en France. www.reso-hebdo-eco.com.


Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation : L’enjeu du juste prix

Le président du Conseil départemental de Vaucluse vient d’annoncer qu’il ne sera candidat à sa propre succession. Après un demi-siècle passé en tant qu’élu local, ce dernier tire sa révérence autant pour raison de santé que par sentiment du devoir accompli.

Elu municipal en 1971, maire de Gordes pendant 32 ans, entré au Conseil général de Vaucluse en 1994, puis président du Conseil départemental depuis 2015, l’ancien professeur de mathématiques ne briguera plus aucun mandat, il vient de l’annoncer.

Au service de tous les Vauclusiens
« Depuis mon AVC (accident vasculaire cérébral) en mai dernier, j’ai quelques problèmes de vue. Mais je n’ai pas démissionné, je suis resté à mon poste pour continuer mon travail au service de tous les Vauclusiens. »
Et le président sortant d’égrainer ses 6 ans de mandat sous forme de bilan. « Je suis fier, avec les élus qui ont travaillé d’arrache-pied avec moi, d’avoir mis en œuvre une solidarité au cœur de tous les territoires, avec un maillage de 18 lieux d’accueil, au plus près des habitants, pour leur apporter aide et accompagnement, notamment aux plus fragiles avec des équipes professionnelles et disponibles. Avec le ‘Plan Départemental de l’Habitat 2016-2022’, nous contribuons au développement de 4 000 logements supplémentaires par an. »

« La solidarité, c’est l’ADN de notre action. »

« La solidarité, c’est l’ADN de notre action, c’est aussi une série de contrats avec les villages, les villes et les intercommunalités. Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin. On a pu concrétiser nombre de projets qui n’auraient pas pu aboutir autrement. Comme la rénovation de la piscine de Cavaillon, le nouveau pôle multi-accueil à Valréas, la reconstruction du gymnase Génicoud à Avignon, le centre médical de proximité de Saint-Christol d’Albion. Près de 27M€ ont été votés pour soutenir toutes les communes, quelle que soit leur taille ou leur couleur politique. »
Le THD (Très haut débit) initié par la précédente mandature (ndlr : celle du socialiste Claude Haut) a été développé à la vitesse grand V. Près de 170M€ ont ainsi été injectés pour aider au développement des entreprises y compris dans les zones rurales.
« Investir, c’est assurer l’avenir. Depuis 2015, grâce à une gestion rigoureuse, nous empruntons moins, nous nous désendettons et nous avons investi près de 700M€ (691 exactement) : 21M€ pour la déviation d’Orange, 6,2M€ pour la déviation sud de Carpentras, 7,8M€ pour le giratoire ‘Spirou’ à Monteux. »
Côté collèges, (41 établissements publics en Vaucluse), 20M€ ont permis de réhabiliter le Collège Jean Giono d’Orange, 17M€ pour Anselme Mathieu à Avignon, 7,2M€ pour Vallis Aeria à Valréas, 5,8M€ pour celui du Thor et à la rentrée de septembre, tous les collégiens et leurs professeurs recevront un ordinateur gratuitement.
Le Président Chabert continue son inventaire à la Prévert : « nous avons fait le maximum pour préserver les joyaux de notre territoire mais aussi le petit patrimoine qui fait la beauté de nos paysages. Comme la réhabilitation du Palais des Papes, sa Chapelle Benoît XII, sa Tour de la Campane. A Carpentras, l’Hôtel Dieu qui abrite la magnifique Bibliothèque d’Inguimbertine. Nous avons également lancé le déménagement des archives départementales vers Agroparc avec un pôle de conservation offert aux historiens, généalogistes, archéologues, étudiants (33M€). »
Enfin, « pour sécuriser le flux des 700 000 promeneurs, randonneurs, cyclistes qui fréquentent le mont Ventoux chaque année, nous avons lancé un plan de requalification (3,4M€) pour sauvegarder ce site unique de biodiversité qu’est notre Géant de Provence. »

« Un gaulliste-pompidolien qui veut tourner la page. »

Maurice Chabert n’est pas candidat aux scrutins des Départementales des 20 et 27 juin prochains: « Il faut savoir tourner la page, j’ai eu une vie heureuse, à 77 ans je vais me consacrer à ma famille, ma femme, mes amis. Je ne ferai plus de grands voyages comme avant (en Chine, au Japon, au Guatemala), mais les capitales européennes, ce n’est pas si mal ! »
Mais le président sortant montre des signes d’inquiétude si l’extrême droite enlève le Vaucluse fin juin. « La culture, la vie associative et sportive ne sont pas sa priorité. Si je me suis retrouvé président du Département au bénéfice de l’âge, moi qui suis gaulliste-pompidolien, j’ai géré en bonne intelligence avec la gauche, dans l’intérêt des Vauclusiens, personne n’a voté contre le budget, certains se sont abstenus, c’est tout. »
Et s’il ne veut pas se lancer pas dans un jeu de pronostics pour sa succession, il espère qu’une majorité claire se dégagera. « Je ne veux surtout pas d’une élection au bénéfice de l’âge », insiste-t-il alors que 3 des 4 derniers président l’ont été.
« J’espère simplement que les 34 élus, quels qu’ils soient, s’entendent aussi bien que nous », conclut-il.
Depuis 1970, Maurice Chabert est le 5e homme à présider l’Assemblée départementale (après Jean Garcin 1970-92 / Régis Deroudilhe 1992-98 / Jacques Bérard 1998-2001 / Claude Haut 2001-15). La première femme à avoir fait son entrée dans l’hémicycle de la Rue Viala est la socialiste Michèle Fournier-Armand en 1998. A quand une femme à la tête de l’exécutif vauclusien ? En 2021 ?

Pour rappel : les résultats des précédentes élections départementales de 2015
1er tour (participation 54, 43%) :
Front National 37,40% / PS 31, 46% / UMP 27%
2e tour (participation 57,40%) :
FN 39,50% / PS 31,42% / UMP 23, 16%
Assemblée élue : majorité 12 sièges / opposition de Gauche 12 sièges / opposition extrême droite 10 sièges


Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation : L’enjeu du juste prix

Vice-présidente du conseil départemental de Vaucluse, Dominique Santoni, également maire d’Apt et vice-présidente de la communauté de communes du Pays d’Apt Luberon, prendra part aux prochaines élections départementales en juin prochain. En cas de reconduction de sa majorité, celle qui est à la tête de son groupe politique départemental pourrait être la première femme à présider le Département de Vaucluse.

La date des élections départementales vient enfin d’être fixée aux 20 et 27 juin 2021 (ndlr : en même temps que les régionales). C’est un délai très court par rapport aux élections précédentes ?
« Nous sommes dans un contexte un peu particulier qui ne va pas permettre de mener une campagne ‘normale’. On dit que cela peut être un atout pour les sortants. Encore faut-il qu’ils aient fait ce qu’ils avaient à faire durant les années où ils ont été élus. »

Vous estimez que durant le mandat de la majorité actuelle ce travail a été fait ?
« Je pense que nous présentons un bon bilan, notamment sur les Finances. Aujourd’hui, on dégage un investissement record avec plus de 114 M€ en 2021. Je crois que c’est cela la véritable mission du Département. C’est d’arriver à dégager de l’investissement, car c’est cette investissement qui sert à tous les Vauclusiens. »

Qu’entendez-vous par tous les Vauclusiens ?
« Quand je dis tous les Vauclusiens, c’est tous les cantons car nous avons œuvré d’une manière que l’on ne peut pas qualifier de partisane. Tous les cantons ont profité de cette augmentation de l’investissement. Toutes nos compétences ont été assurées. Et cela malgré une majorité qui n’était pas très large. C’est pour cela qu’il a fallu être consensuel avec cette idée d’agir pour notre territoire, avec équité, au profit de tous ses habitants. Il faut aussi reconnaître que c’est la première fois qu’une majorité dispose de 6 ans pour travailler – avant, il y avait renouvellement par moitié tous les 3 ans – cela évite le clientélisme. »

Quels sont ces investissements ?
« D’importants travaux ont été menés au niveau des routes notamment et il y a encore de gros projets qui seront réalisés dans une éventuelle seconde mandature. Il y a eu aussi l’extension du Très haut débit (THD) à l’ensemble du territoire d’ici 2022 au lieu de 2036. De quoi faire gagner 14 ans au département qui aura consacré 170 M€ à ce projet depuis 2012. C’est un pari que l’on a fait avec les intercommunalités d’accélérer ce déploiement dans l’ensemble du Vaucluse qui est un département particulièrement adapté à cette technologie car c’est un territoire attractif où l’on peut valoriser le télétravail. »
« Il y a aussi d’autres projets qui ont été engagés mais qui ne sont pas encore visibles car ils seront menés à leurs termes dans les années à venir : le réaménagement de Bonpas, la déviation de Coustellet, l’échangeur d’Orange, la nouvelle MDPH (Maison départementale des personnes handicapées), les archives dans la zone d’Agroparc… »

Vous êtes aussi vice-présidente du conseil départemental en charge des collèges ?
« Nous avons déjà réhabilité plus de 25 % des collèges vauclusiens et cela continuera dans les années à venir. Nous avons aussi mené un gros travail sur la restauration dans les cantines des collèges sur le gaspillage, la qualité des produits et la mise en place d’approvisionnement privilégiant les circuits courts comme Agrilocal84 par exemple. Par ailleurs, dès la rentrée prochaine nous allons équiper les élèves de 6e ainsi que tous les professeurs en distribuant des ordinateurs. »
« Mais au-delà de l’éducation, on a aussi travaillé sur l’insertion avec la plate-forme job-vaucluse ainsi que sur l’agriculture, avec, là-aussi, la volonté de mettre en avant la consommation locale. Et cela bien avant la crise du Covid. »

Avec Agrilocal84, le Département a fait le choix, depuis longtemps, de privilégier les circuits courts de distribution des produits agricoles locaux, notamment dans les cantines des collèges de Vaucluse.

Le Département s’est aussi largement impliqué dans le domaine environnemental ?
« Ici, on a la chance de compter désormais 2 parcs naturels régionaux : celui du Luberon et tout récemment celui du Ventoux. Les Espaces naturels sensibles (ENS) font aussi partie de notre ADN car le Vaucluse est un département un peu différent de ses voisins. Les gens qui viennent ici ne recherchent pas la même chose que ceux qui vont sur la Côte d’Azur. Le développement durable c’est un domaine très transversal. Nous ne sommes pas ‘verts’ mais aujourd’hui tout le monde l’est. »

Durant ce mandat, le Département a aussi perdu la compétence transport au profit du Conseil régional à partir de 2017 ?
« Je regrette vraiment que nous ayons perdu cette compétence car je trouve que nous avions fait pas mal de chose comme lorsque nous avons négocié les DSP (Délégation de service public), le transport à la demande…. La mobilité est un vrai enjeu en Vaucluse et il y a encore beaucoup de choses à faire sur ce sujet-là. Donc c’est vrai, on a perdu des compétences. Mais ensuite, il faut savoir travailler tous ensemble, comme avec la Région, pour obtenir et mettre en place ce qui est utile aux Vauclusiens comme la résorption des points noirs routiers par exemple. »

« Le Département reste pour moi un échelon où l’on est encore sur le terrain. »

Comment arrive-t-on à faire avancer son territoire, y compris dans des compétences qui ne sont pas les vôtres, comme cela été le cas avec la santé avec la crise du Covid-19 ?
« Je crois beaucoup au travail d’équipe pour un territoire. C’est important d’arriver à assembler les différents acteurs en collaborant avec les Intercommunalités, la Région, l’Etat, l’Europe. Avec pour seul objectif : l’intérêt général. Une fois qu’on est élu, on ne doit avoir que l’intérêt général en tête. »
« C’est dans cet esprit collectif que nous développons notamment ‘Vaucluse Ingénierie’. Cette plateforme vise ainsi à accompagner les communes et les intercommunalités dans leurs projets. Cet outil devrait fonctionner d’ici quelques mois en apportant du conseil, de l’expertise et même de l’assistance à maîtrise d’ouvrage aux porteurs de projets. Et bien sûr, on ne le fait pas seuls dans notre coin mais en lien avec une vingtaine de structures expertes dans leur domaine, comme le Caue84, Vallis habitat ou encore les parcs naturels du Luberon et du Ventoux. Ce sera simple d’utilisation : imaginons qu’une petite commune souhaite revitaliser son cœur de village, elle trouvera sur Vaucluse ingénierie un premier niveau d’information et pourra ensuite entrer en contact rapidement avec un opérateur qui mobilisera l’ensemble des partenaires pour faire avancer le projet en question. La plateforme couvrira tous les types de projets, de la valorisation du patrimoine jusqu’à la protection des milieux naturels en passant par l’adaptation de son parc locatif aux besoins des personnes handicapées ou la promotion touristique. En tout, une trentaine de thématiques seront proposées. Ce sera un très bel outil, au service de tout le territoire, et donc au final de tous les Vauclusiens. C’est comme ça qu’on peut faire avancer le Vaucluse, en mobilisant toutes les énergies. »

Pour revenir aux prochaines élections départementales, nous sommes dans un cas de figure particulier avec Maurice Chabert, un président sortant qui n’a pas encore fait part de sa décision de continuer ou pas ?
« Le président est assez serein. Il sait ce qu’il va faire et pour ne rien vous cacher je sais ce qu’il va faire. Maintenant, il attendait de savoir quand auraient lieu les élections. Désormais, c’est à lui qu’il faut poser la question. Mais aujourd’hui Maurice Chabert est président du Département et il le sera jusqu’à ce qu’il y ait des élections. Dans tous les cas, j’ai de très bons rapports avec le président. Je pense qu’il a fait un très bon travail en ayant su emmener cette équipe avec lui dans un contexte qui n’était pas très facile quand nous sommes arrivés aux affaires. »

« Faire de la politique, c’est le moment avant d’être élu. Après c’est l’inverse, on devient l’élu de tout le monde. »

Avec un RN (Rassemblement national) fort et des blocs politiques assez équivalents, ne pensez-vous que l’on risque (ndlr : le président sortant a été élu au bénéfice de l’âge à l’issu d’une égalité) de se trouver, à nouveau, avec une majorité difficile à déterminer ?

« Nous avons une équipe sortante qui présente un véritable bilan. On peut donc imaginer qu’il y aura peu de changements dans cette équipe. Par ailleurs, nous travaillons dans les cantons où il pourrait sortir de bons candidats afin que l’on puisse éviter de se retrouver dans ce cas de figure. Mais effectivement, si l’on peut s’abstenir de se retrouver dans cette situation incertaine… »
« Aujourd’hui, on a cependant l’impression que le RN plafonne, qu’il y a des ‘guéguerres’ un peu partout dans les cantons et que la Ligue du Sud connaît un certain recul. Dans tous les cas, on travaille en amont pour éviter cela. En fait, on travaille depuis un certain temps déjà, comme si les élections devaient avoir lieu demain. »
« Mais faire de la politique c’est la campagne électorale. C’est le moment avant d’être élu. Par contre, une fois élu c’est l’inverse de la vie politique, on devient l’élu de tout le monde. Je suis très pragmatique. Au final, ce qui m’intéresse c’est de mener des actions concrètes qui se voient sur tous les territoires. »

Justement, le fait de disposer d’une majorité plutôt fragile dès le début du mandat, vous a-t-il poussé à faire preuve d’encore plus de pragmatisme ?
« Comme je l’ai déjà dit, une fois élus, nous sommes au service de tous les Vauclusiens mais il est clair qu’il est plus facile de travailler avec certains élus que d’autres. Dans tous les cas, je suis une élue de proximité et j’aime voir les choses se faire. Et le Département reste pour moi un échelon où l’on est encore sur le terrain. »

Dans un département où les présidents sont régulièrement des hommes élus au bénéfice de l’âge (ndlr : 3 sur les 4 derniers présidents) est-il envisageable d’imaginer une présidente en cas de reconduction de la majorité actuelle ?
« On peut tout imaginer, mais pourquoi pas une femme à la tête du Département ? L’essentiel n’est cependant pas d’être sur la photo, l’important c’est que lorsque l’on s’en va on voit le changement. On voit ce qui a été fait. Le véritable engagement politique c’est cela. »

Vous êtes maire, vice-présidente de l’intercommunalité du Pays d’Apt, vice-présidente du Département, que vous ont appris ces mandats ?
« Il faut s’inscrire sur la durée. Avoir une feuille de route et s’y tenir. On n’est pas là pour être aimé. On est là pour le bien collectif. Prenons l’exemple de la place de la mairie à Apt, on l’a refaite parce que l’on avait dit qu’on la referait. Puis avec le Covid cela a tout décalé cette année, lors d’une année de scrutin municipal. Certains on dit que l’on allait perdre car on ne faisait pas de grand chantier avant les élections. Moi, je trouve malhonnête que sous prétexte qu’il y ait des oppositions, on le décale de 1 an juste à cause des élections. Si les gens ne veulent pas voter pour moi parce que l’on a changé un sens de circulation ou que l’on a bouleversé les habitudes du commerce et bien tant pis ! Il faut avoir le courage de se projeter et savoir avancer. Quand on pense avoir pris la bonne décision, on l’applique. Pas dans 3 semaines, 6 mois ou 1 an, mais maintenant. Qu’on m’aime ou qu’on ne m’aime pas, je fais ce que je dis. »

« Qu’on m’aime ou qu’on ne m’aime pas, je fais ce que je dis. »

Et pour le Département ?
« Il faut avoir une vision. Il faut travailler sur l’attractivité du Vaucluse. Aujourd’hui, nous sommes un département un peu à part. On a pu avoir certaines difficultés, car nous sommes un territoire qui s’est fortement paupérisé, mais qui a aussi la chance d’avoir de belles entreprises. Le fait d’avoir amené le THD dans nos territoires doit permettre d’attirer des populations différentes qui pourraient travailler à distance ou implanter des entreprises dans les secteurs du développement durable, des nouvelles technologies, de l’ESS (Economie sociale et solidaire)… Nous devons miser sur nos atouts comme le tourisme, avec la politique vélo notamment, et puis travailler parallèlement sur l’amélioration de la qualité de vie. Il est important de capter de nouvelles populations qui vont amener du pouvoir d’achat, du renouveau, du développement économique, de la fréquentation touristique. Le Très haut débit doit permettre d’attirer ces gens en télétravail, tout en offrant une qualité de vie exceptionnelle.

Prenons le cas d’Apt, comment concilier développement économique et préservation du cadre de vie ?
« Nous avons la chance d’avoir de très belles industries avec des gens qui ont fait le choix de vivre à Apt. Leur principal problème aujourd’hui, c’est des salariés qui ne veulent pas forcément résider sur ce territoire et qui cherchent des écoles, de la culture, des lieux de vie et des commerces. Il faut donc travailler sur tout ceci. C’est pour cela que nous, à Apt, on a choisi un créneau qui est celui de la ‘Silver économie’ en se disant qu’il fallait ramener des gens dans le centre-ville en proposant des commerces, des services afin de favoriser le développement de l’activité. L’idée est de faire revenir des gens de 55 ans et plus avec un fort pouvoir d’achat. Des ‘jeuniors’, les vieux des jeunes ou les jeunes des vieux selon l’âge que l’on a, qui pourraient s’investir dans la ville pour y passer 3 mois, 6 mois ou 1 an. Pour cela, nous travaillons avec le groupe SRS, investisseur dans les secteurs sanitaires et médico-sociaux en France, pour rénover notre centre-ville. »

En quoi consiste ce projet de renouvellement urbain ?
« Nous sommes confrontés, comme beaucoup de communes de Vaucluse, à des propriétaires d’immeubles qui ne les ont pas rénovés pour des raisons économiques avec des commerces installés en rez-de-chaussée privant d’accès les logements situés au-dessus. Cela participe à la détérioration et au dépeuplement de nos cœurs de ville. L’idée est que cet investisseur achète ces logements à la commune ou au privé, mais uniquement des bâtiments aujourd’hui désaffectés : Comme la Caisse d’épargne, un très beau bâtiment qui est sur la place principale de la ville, ou l’ancienne usine de fruits confits Rambaud, tombé en désuétude et dont la réhabilitation demanderait un budget énorme. Il s’agit donc de rénover tout cela au standing actuel. Pour démarrer, il faut au minimum 300 appartements. Nous en sommes à 280 aujourd’hui. Mais attention, il ne s’agit pas de faire une ville de vieux. Ce n’est pas un Ephad (Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) à ciel ouvert. Il n’y a aucun service médicalisé mais des services de proximité qui se développeront avec cette nouvelle présence. Il y a donc un travail à faire pour réintégrer les commerces en centre-ville. Pour cela, il faut embellir. C’est fondamental d’embellir la ville et le territoire pour créer l’envie de s’y installer. Je crois que le ‘beau’ est essentiel. Par ailleurs, une partie de ces logements devrait être accessible aux salariés qui voudraient s’installer sur le territoire. Ce qui est intéressant en cas de succès ? C’est que ce modèle pourrait être dupliqué dans le département. »

« Il est fondamental d’embellir le territoire pour créer l’envie de s’y installer. »

Est-ce que la notion de ‘beau’ n’a pas été un peu trop oubliée dans le département, notamment parce qu’il dispose de nombreux atouts dans ce domaine ?
« On a tout. Nous avons un département naturellement beau. Un climat très agréable. Deux parcs naturels régionaux. On a beaucoup de force mais il faut parfois aussi être là où l’on ne nous attend pas. On a parlé d’embellir, il faut aussi être innovant, créatif. Avoir envie et être malin. C’est pour cela qu’il faut réfléchir ensemble à comment construire le Vaucluse de demain : autour des compétences du Département mais aussi de toutes les forces vives de ce territoire. Par exemple, essayer de transformer une partie de ces résidents secondaires -chefs d’entreprise, artistes, écrivains etc- en résidents permanents et en acteurs locaux. Plein de gens ayant connu des réussites en France où dans le monde ont choisi de vivre 1 à 3 mois dans le Vaucluse et nous voudrions qu’ils restent 6 mois ou 1 an ici. Nous avons d’ailleurs sollicité une partie d’entre eux dans le cadre d’un groupe de réflexion afin qu’ils travaillent avec nous sur des idées que nous n’aurions peut-être pas. »

Le domaine de la Culture en fait partie ?
« La Culture elle est à Avignon, c’est formidable. Elle est à Orange, c’est formidable. Mais je pense qu’elle doit être partout. Nous sommes un petit département où il est plutôt facile de se déplacer. Donc, il faudrait que la Culture irrigue tout le Vaucluse. Ici, ‘Terre de festivals’, le slogan de la Région Sud, prend tout son sens. C’est pour cela qu’il y a une forte implication du département dans ce secteur alors que ce n’est pas une de ses compétences directes. »

Et en termes de développement économique, notamment les problématiques de manque de foncier pour garder nos entreprises et en attirer de nouvelles ?
« L’idée c’est de conserver les entreprises du territoire en répondant à leurs besoins fonciers et aller chercher des entreprises exogènes qui n’ont pas forcément besoin de beaucoup d’espace. Il faut donc aller chercher ces entreprises et ces domaines d’activités qui pourraient être pertinents chez nous. VPA (Vaucluse Provence attractivité) fait déjà un très gros travail, mais il faut peut-être donner encore plus de moyen. Par contre, je ne suis pas sûre qu’il faille essaimer des petites zones qui se ressemblent pour se faire concurrence entre les territoires. Il faut plutôt se compléter selon les spécificités des uns et des autres en organisant le territoire : la logistique vers la vallée du Rhône et ses autoroutes A7 et A9, l’agro-alimentaire vers le Comtat et le long de la Durance, les activités de pleine nature, le sport, le tourisme vert et le cinéma vers l’intérieur du département. Les élus doivent aussi être les ambassadeurs du territoire et ensuite les services techniques doivent concrétiser ces démarches dans le cadre de missions bien précises pour que ce développement que l’on cherche à mettre en place profite à tout le territoire. »

Quand on voit le nombre de Parisiens qui abandonnent tout pour venir s’installer dans la Région, le Covid peut être une chance pour ce département ?
« Il faut effectivement saisir cette opportunité et tirer le positif de cet événement. Ne pas se contenter que des mauvaises choses. Nous sommes à un tournant et il ne faut pas hésiter à capitaliser sur la notoriété du ‘Vaucluse’. Le Vaucluse aujourd’hui est une marque reconnue. Quand on parle du Vaucluse, on sait de quoi on parle. Pour autant, pour attirer tous ces personnes, il faut leur donner les moyens de s’installer et c’est le haut débit qui entraîne tout le reste. »

« C’est aux élus de s’impliquer pour faire changer les choses. »

Vous semblez particulièrement motivée à la perspective d’un second mandat ?
« Un vrai travail de fond a été fait. Cela va se voir. Souvent le second mandat est important, car c’est un peu court pour réaliser les choses. Il est donc important d’avoir une continuité quels que soient les élus. Toutefois, il faut des élus suffisamment intelligents pour continuer ce qui a été entrepris. Les politiques qui arrivent et qui changent tout pour changer cela n’a pas de sens. Il faut de la constance mais il faut aussi accepter que l’on travaille pendant 6 ans et que s’il on est battu, quelqu’un d’autre en tirera les lauriers. L’important est de voir aboutir ses projets. »
« Je peux avoir des idées assez arrêtées mais je suis une femme de consensus. Il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles. Quand on prend le temps d’expliquer pourquoi il faut faire les choses de telles ou telles manières, in fine, ils l’acceptent beaucoup plus facilement. Par contre, c’est beaucoup de temps et d’énergie, c’est pour cela qu’il faut également être très persuadé de ce que l’on veut faire. Il faut y croire. »

Justement, comment gère-t-on cette dépense de temps et d’énergie quand on vient du privé où le rythme de la prise de décision n’est pas forcément le même que dans l’action publique ?
« Oui, c’est toujours trop lent pour moi qui vient de la société civile (ndlr : elle a travaillé dans plusieurs agences de communication depuis 1987 avant de définitivement revenir sur Apt en 2006). Et c’est vrai que lorsque j’ai été élue, dans les premiers temps, j’ai eu du mal à m’acclimater à ce rythme. Il faut cependant comprendre que les procédures sont très lourdes et que lorsque l’on parle de l’échangeur de Bonpas ou du contournement de Coustellet il y a des études à faire en amont. On n’a pas forcément conscience de toutes les étapes nécessaires qu’il faut respecter lorsque l’on passe au niveau départemental ou régional. Mais c’est vrai qu’il pourrait y avoir un peu de simplification dans les process. Au final, je trouve que le temps est long et ce d’autant plus que mandat est court. »

On peut aussi avoir le sentiment que les administrations, les services de l’État, la réglementation constituent des freins à l’action de l’élu local ?
« Il y a le rôle des élus, avec d’un côté le politique, et de l’autre, l’administration, qu’il ne faut pas mélanger. En revanche, entendons-nous bien : ce sont les élus qui décident des politiques et qui impulsent les projets. Les services sont ensuite là pour les mener à bien. Les élus doivent fédérer mais aussi manager en suivant les projets pour s’assurer qu’ils seront menés à terme sans pour autant s’immiscer dans la bonne marche des dossiers. Je crois vraiment que c’est aux élus de s’impliquer pour faire changer les choses, même doucement. C’est aussi à eux d’aller défendre les dossiers car il ne faut pas que l’administration se substitue aux élus comme cela peut-être le cas dans certains grands services de l’Etat. En fait, pour moi, le politique dit où l’on va et l’administration dit comment on y va.»
« Quand je suis arrivée à la mairie un fonctionnaire m’a dit ‘ici nous sommes les murs et vous, vous êtes les meubles’. Je n’ai pas vocation à être là tout le temps. Douze ans à la mairie c’est bien pour porter les projets mais je n’ai pas que cela dans la vie. »

Propos recueillis par Laurent Garcia


Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation : L’enjeu du juste prix

Maurice Chabert, président du Conseil départemental de Vaucluse et Claude Haut, ancien Président du Conseil général, ont dévoilé une plaque en hommage à Jacques Berard, homme politique engagé au service de son territoire. Celle-ci se situe dans la cour d’honneur de l’hôtel du Département.

Jacques Berard, né à Bédarrides s’éteignait un dimanche 1er juin 2014, à l’âge de 84 ans. Gaulliste fervent, cet avocat a été élu en 1958, sous la bannière de l’UNR (Union pour la Nouvelle République), plus jeune député de France à l’âge de 29 ans.

Député (1958-1967 et 1968-1978), conseiller général (1967- 2004) du canton d’Orange, maire d’Orange (1971-1977), sénateur du Vaucluse (1986-1995), président du Conseil général (1998-2001), membre du Conseil économique et social (1996-1998) : ses mandats ont marqué l’histoire du Vaucluse.

Conseiller général pendant 37 ans, Jacques Berard a été le Président de l’Assemblée départementale entre 1998 et 2001. Il quitte le Conseil général en 2004. Entre autres, il inaugure le nouveau collège André-Malraux à Mazan en 2020 ou l’aménagement du carrefour d’Avignon nord, une réalisation très attendue sur ce qui était déjà l’axe le plus fréquenté du département. C’est également lui qui, en remettant à la Ville d’Avignon les clefs de l’hôtel de Caumont, propriété du Département, offre un lieu d’exception à la Collection Lambert.

C’est également sous la présidence de Jacques Berard que la Ville d’Avignon a concouru pour devenir Capitale Européenne de la Culture en 2000. Une candidature que l’ancien président a soutenue avec l’engagement qui pouvait le caractériser. Etant très attaché aux questions de culture et de patrimoine, cette démarche était évidente pour celui qui fut secrétaire de la commission des affaires culturelles du Sénat.

Lors de son allocution, Maurice Chabert a souligné l’engagement et la popularité auprès des habitants de Jacques Berard : « l’hommage des Vauclusiens, c’est dans les urnes qu’il l’a reçu. Sa longue carrière et ses nombreuses victoires démontrent à quel point nos concitoyens étaient attachés à lui. Dans ce lieu, c’est l’hommage de ses pairs qu’il va recevoir aujourd’hui. »


Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation : L’enjeu du juste prix

5, 4, 3, 2, 1, 0… la commune de Carpentras vient de procéder au lancement du ‘Big bang de la démocratie municipale’. La ‘fusée’ de ce nouveau dispositif inédit de participation citoyenne comprend 4 étages : une convention citoyenne, un budget participatif, un droit d’amendement et un référendum d’initiative citoyenne.

La Convention citoyenne
Dans un premier temps, la municipalité va constituer une ‘Convention citoyenne’ composée de 35 personnes tirées au sort sur les 19 000 Carpentrassiens inscrits sur les listes électorales de la commune. Le tirage au sort a été réalisé le 17 février dernier sous contrôle d’huissier de justice, de manière aléatoire et en tenant compte des critères de représentativité (résidence, âge, sexe,…). Les personnes désignées sont depuis contactées afin de savoir s’ils souhaitent, ou non, intégrer cette Convention. S’ils refusent, la commune, qui s’est constituée un ‘vivier’ de 350 citoyens tiré au sort, passe à la personne suivante.
L’objectif est d’installer les membres, sélectionnés pour une durée de 1 an non-renouvelable, d’ici le mois d’avril prochain. Leur mission sera alors d’informer la Ville des besoins des citoyens, de sélectionner les projets du budget participatif et de prendre connaissance des projets de délibération soumis au conseil municipal.

«Une promesse de campagne.»

Auparavant, ces bénévoles qui disposeront toutefois d’un statut juridique de ‘Collaborateurs occasionnels’ auront bénéficié d’une session d’information donnée par un professeur de l’université d’Avignon sur le fonctionnement de la municipalité. La Convention se réunira ensuite une fois par mois ou davantage si nécessaire. « La mise en place de cette Convention était une promesse de campagne », insiste Serge Andrieu, maire de Carpentras, soucieux de renouveler le fonctionnement de la vie démocratique municipale.

 

Un budget participatif de 700 000€
Histoire de donner du concret à l’ensemble de l’initiative, la Ville a aussi décidé de mettre en place un budget participatif doté de 700 000€.
« Le but n’est pas seulement de donner la parole aux habitants mais de leur donner les outils pour agir », poursuit Serge Andrieu.
Dans ce cadre, la Convention citoyenne sera en charge de récupérer les doléances des Carpentrassiens de plus de 16 ans d’ici juillet prochain.
« Pour déposer un projet, il suffira de se connecter à la plateforme dédiée ou de remplir un formulaire papier en prenant bien soin de répondre aux critères de recevabilité des projets, détaillés sur le site web, précise le maire. Evidemment, seules les propositions relevant des compétences de la Ville seront retenues. »
Pour la commune, qui dispose d’un budget investissement de l’ordre de 10M€ par an, l’enveloppe n’est pas neutre. « Cela représente une somme 25€ par habitants, contre 12€ en moyenne dans les 150 communes françaises qui ont mis en place ce type de budget participatif », complète Yvette Guiou, première adjointe à l’Enfance et à la Démocratie locale.
La Convention, en collaboration avec les services municipaux, examinera ensuite durant l’été la recevabilité, la faisabilité et le coût des projets déposés. Les propositions retenues seront soumises aux votes des habitants en octobre ou novembre prochains. Les propositions ayant récoltées le plus de votes seront inscrites dans le budget de la ville qui s’engage à les réaliser en 2022.
« Bien évidemment, il s’agit de privilégier les dossiers d’intérêt public et pas les projets privés », rappelle Serge Andrieu.

«Le droit d’amendement est désormais donné pour la première fois aux Carpentrassiens.»

Création d’un droit d’amendement
Si les deux premiers dispositifs existent déjà par ailleurs dans le firmament des outils de la proximité démocratique, Carpentras va se doter également d’un ‘Droit d’amendement’ inédit.
Désormais, chaque citoyen pourra déposer un amendement sur une délibération future du conseil municipal. Concrètement, deux semaines avant chaque conseil, la note de synthèse sera publiée sur le site de la Ville. Si un habitant souhaite proposer une modification, il lui suffira de le faire via la plateforme dédiée. Le projet d’amendement sera alors soumis au vote des citoyens et ils auront jusqu’à 48h ouvrables avant la séance pour voter. Si 2% des électeurs soutiennent la proposition (soit 380 personnes), l’amendement sera présenté aux conseillers municipaux et sera alors débattu. Il pourra être, comme les amendements déposés par les élus, adopté, rejeté ou renvoyé en commission.
« Existant déjà pour les conseillers municipaux, détaille le maire, ce droit est désormais donné pour la première fois aux Carpentrassiens. »

Le référendum rendu enfin accessible
Enfin, dernier satellite de cette constellation de moyen mis à disposition de l’univers de la démocratie participative, la possibilité d’organiser automatiquement un référendum d’initiative citoyenne si 10% des électeurs carpentrassiens en fond la demande.
Ainsi, toujours sur le site internet, il sera possible de déposer une pétition citoyenne (sur des sujets relatifs aux compétences de la municipalité). Pour cela, cette pétition devra recueillir la signature d’environ 1 900 électeurs dans un délai de 9 mois. Le maire s’engageant ensuite à inscrire à l’ordre du jour du conseil municipal l’organisation de ce référendum décisionnel.

«C’est certainement mon côté contestataire.»

« Fortement sollicité par le mouvement des Gilets jaunes, le référendum d’initiative citoyenne n’est pas prévu par le droit français, constate Serge Andrieu. En revanche, c’est une volonté de la municipalité. C’est pourquoi, un référendum municipal sera automatiquement organisé si 10% des citoyens carpentrassiens le réclame. »
Pour le maire, à l’inverse du dispositif national du Référendum d’initiative partagée (RIP) dont les conditions d’application le rendent inatteignable, ce seuil vise à rendre accessible la possibilité de convoquer un référendum.
« C’est certainement mon côté contestataire », taquine Serge Andrieu qui constate cependant « que de nombreux élus ne font pas ce qu’ils devraient pour leur territoire mais font juste ce qu’il faut pour être réélu. Avec ce dispositif concret, chaque citoyen pourra exercer le pouvoir qui est le sien, contrôler l’action du maire et des élus, et agir pour ce qui lui semble prioritaire pour notre ville. Il s’agit d’un véritable contrat passé avec les Carpentrassiens. »
Pour le maire ce ’Big bang’ vise donc à montrer la voie (lactée ?) de l’implication citoyenne dans la démocratie locale grâce à cette initiative inédite en France via la mise en place de ces 4 outils cumulés.
« Une des principales volontés de la Ville est de laisser la parole aux Carpentrassiens et de co-construire à leurs côtés la ville de demain, conclut-il. Par cette volonté de changer radicalement notre démocratie municipale, je donne la possibilité à chacun de reprendre le contrôle sur l’avenir de Carpentras. »

https://www.echodumardi.com/tag/politique/page/4/   1/1