6 mai 2024 |

Ecrit par le 6 mai 2024

Châteauneuf-du-Pape : des BDphiles heureux à la rencontre de leurs auteurs préférés

Ambiance cool, ce samedi au coeur du village, où étaient installés les 8 auteurs invités pour cette 3ème édition de « Châteauneuf en bulles ». C’est Raphaël Vannelle, le gérant de la Distillerie A. Blachère qui a eu l’idée de ces rencontres.

« Je voulais créer un évènement populaire et pérenne au coeur du village ». Il est vrai que Raphaël est lui-même fou de BD depuis tout petit, « J’ai reçu en cadeau mon 1er album de Spirou à 6ans. Nous sommes 4 frères et nos parents nous ont initié à la bande dessinée. Avec, pour chaque anniversaire, chaque Noël, un nouvel album, pour l’un c’était « Tintin », pour les autres « Lucky Luke » et « Asterix ». C’est ainsi qu’ont débuté ma passion et ma collection ».

Raphaël Vanelle, créateur de “Châteauneuf-du-Pape en bulles“ avec Franck Margerin, le créateur de “Lucien“.

« A l’époque, c’étaient des super héros », explique Raphaël Vannelle, « Des « comics » américains. Puis ce sont surtout des dessinateurs belges et français qui se sont imposés et j’ai acheté leurs albums, évolué avec eux, enrichi ma collection. Aujourd’hui j’en ai environ 3 000 oeuvres dans ma bibliothèque. Il faut savoir et que c’est devenu un vrai marché dans le monde. Ce n’est pas un art mineur, c’est un art à part entière. Comme j’adore Hugo Pratt, je suis allé en Italie pour acheter une de ses planches originale de « Corto Maltese ». Je suis capable de filer jusqu’aux Etats-Unis, en Espagne pour dénicher l’objet rare. Hergé est côté 500 000€ minimum. En BD, les prix partent de 5 000€ pour atteindre des sommets, comme en peinture. Un ‘Batman’ de Frank Miller, par exemple, a été adjugé 3,2M€ à New-York ».

Achdé, alias Hervé Darmenton, l’auteur de Lucky Luke depuis 2001.

Raphaël Vannelle, l’organisteur de  » Chateauneuf en bulles » travaille avec la mairie, le Château La Gardine et quelques vignerons pour mettre sur pied cette opération, il la finance grâce à l’entreprise qu’il dirige avec sa femme, la Distillerie A. Blachère. « Nous contactons les auteurs, les invitons, payons les billets de train, les hôtels. Pour eux, c’est un vrai travail de venir ici, passer des heures dans leurs stands, ils font souvent des dessins pour leurs fans ». Dédicaces, échanges, selfies, tout se passe à la bonne franquette, même si certains dessinateurs comme Franck Margeron ou Achdé provoquent des files d’attentes sous le soleil, ce samedi de juin.

Serge Scotto, s’inspirant de l’œuvre de Marcel Pagnol.

« On remarque qu’il y a peu de femmes dans ce milieu, certes, on a eu Claire Bretecher (Les frustrés, Agrippine, Cellulite publiés pendant des années par le Nouvel Obs), mais depuis, pas grand chose » regrette Raphaël Vannelle. « On a quand même réussi à faire venir Patricia Jambers qui est coloriste des albums de son mari, Jean-Charles Kraehn ». Etaient également présents Régis Loisel (Peter Pan, La quête de l’oiseau du temps), Olivier Berlion (Agata, Le cadet des Soupetards), Serge Scotto (Merlusse, Jean de Florette, Le château de ma mère d’après Marcel Pagnol), Serge Fino (Les ailes du Phaéton, L’or des marées). Au fil de la journée, des centaines et centaines de lecteurs sont venus à leur rencontre et sont repartis heureux, avec leur album dédicacé dans les mains et parfois, un petit dessin de l’auteur en prime.


Châteauneuf-du-Pape : des BDphiles heureux à la rencontre de leurs auteurs préférés

Fondée en 1835, la distillerie A. Blachère est la plus ancienne de Provence. Elle a d’abord été implantée par Auguste Blachère, au XIXème siècle, Rue Molière à Avignon. Face au succès et à la nécessité de s’agrandir, elle a déménagé au milieu des vignes à Châteauneuf du Pape. C’est en 1993, il y a 30 ans, que Sandrine Blachère et son mari Raphaël Vannelle, ont pris la direction de l’entreprise familiale créée par l’arrière grand-père.

« La société était alors en difficultés. Avec Sandrine, on a mis une dizaine d’année pour la remettre à flots, la redresser, retrouver l’équilibre. » explique Raphaël Vannelle, le directeur. « On a déposé la marque ‘Pac’ “ en 1962 et l’exploitation a débuté l’année d’après. On a élagué parmi les références, on a viré la crème de bananes et celle de cacao qui ne se vendaient plus, on a gardé les valeurs sûres comme ‘L’élixir du Mont-Ventoux’ ou L’origan du Comtat’ qui, selon la légende, en 1882, pour l’épidémie de choléra a soulagé nombre de malades, on a relooké les étiquettes du Pastis Camarguais et de la liqueur ‘La Comtadine’, des vieux marcs millésimés de Châteauneuf-du-Pape qu’on trouve dans notre boutique ».

Raphaël Vannelle, directeur de la Distillerie A. Blachère

Et surtout, tous les deux ont eu une idée de génie, de tout miser sur le ‘Pac Citron’ (ou Pac à l’eau pour les Provençaux). Ils ont relancé ce sirop de citron naturel, sans colorant ni sucre ajouté, qu’on sert avec de l’eau bien fraîche et des glaçons, qu’on s’arrache partout et pas seulement en Vaucluse. Des fans se sont même fait prendre en photo en haut du Corcovado au Brésil. Le reporter de l’émission « Echappées belles à Aix-en-Provence », diffusé le 28 janvier sur TV 5, Ismaël Khelifa a pris un Pac à l’eau en guise d’apéro sur le Cours Mirabeau. Depuis, les demandes affluent du monde entier sur l’ordinateur de Raphaël Vannelle!

« Le Pac, c’est le vaisseau-amiral de la Distillerie, on en vend plus de 800 000 bouteilles par an, il est suivi par une autre création-maison, le ‘Fun Blue’. Un sirop de menthe au goût renforcé de chlorophylle, de couleur turquoise qui s’arrache partout, en particulier sous les tropiques, aux Caraïbes où il rappelle l’eau des lagons », on en écoule entre 250 et 300 000 chaque année », ajoute le patron.

L’Histoire des sirops de la Distillerie A.Blachère en étiquettes.

Ce sont les deux sirops qui connaissent le plus grand succès, mais il y en a d’autres qui sortent de l’espace « embouteillage » flambant neuf de la distillerie. « Un investissement de 500 000€, subventionné à hauteur de 20% par France-Relance, qui permettra à terme de produire 6 000 bouteilles à l’heure ».

Des sirops de fraise, framboise, melon, pêche, réglisse, abricot ou barbe à papa, si prisée des enfants.-

A côté de cette ligne de production se trouve l’herboristerie et ses sacs de jute ou de papier emplis de lavande, gingembre, orange amère, cannelle, giroflier, origan, thym, romarin, sauge, menthe, millepertuis, fenouil, absinthe, angélique, verveine qui entrent dans la composition de liqueurs et élixirs, stockés à l’abri de la lumière et à température constante, au pied d’un antique alambic en cuivre.

Une partie de l’herboristerie et des alambics de la Distillerie A. Blachère.

La Maison A. Blachère cultive la proximité, elle a le souci de l’empreinte carbone et travaille avec des voisins, l’Imprimerie de l’Ouvèze à Sorgues pour ses étiquettes (1,3 million par an), Smurfit au Pontet pour ses cartons, des jus de citrons qui viennent d’un fournisseur de la région niçoise, des palettes « made in France ». « Nous sommes un des derniers indépendants de France, aujourd’hui. Même les sirops Eyguebelle dans la Drôme ont été rachetés, nous on résiste. » précise Raphaël Vannelle.

Blachère, c’est une histoire d’amour. Lui qui connaît sa femme Sandrine (la gérante de la distillerie) depuis l’âge de 16 ans est totalement investi : « Blachère c’est notre âme, notre famille, (mes enfants Rose et Ronan, leurs grands-parents), notre patrimoine, celui de la Provence, notre histoire privée et professionnelle, intimement liée. C’est la tradition, mais c’est aussi la modernité, l’ancrage dans le réel d’aujourd’hui. D’ailleurs mon fiston m’a montré des jeunes youtubers qui en boivent dans leurs soirées, ils s’approprient le ‘Pac’. Je parraine aussi deux jeunes champions de skate – board qui ont une planche rose fluo avec ces 3 lettres imprimées et qui font des compétitions partout ! »

Côté chiffre d’affaires  » On a cartonné pendant le Covid, on a continué avec la canicule, + 15% l’été dernier. Mais hélas le prix de l’énergie a flambé, facture d’électricité x 4, celui des matières premières a carrément explosé : + 100% pour le sucre, + 70% pour le verre, sans parler du papier et de la colle pour les étiquettes, du bois pour les palettes, du coup cela a divisé par 2 la progression à deux chiffres de notre chiffre d’affaires. »

Le festival de BD de Châteauneuf-du-Pape dont le directeur de la distillerie A. Blachère et passionné de BD, Raphaël Vannelle, est l’organisateur.

Ce que le grand public ne sait pas forcément, c’est que Raphaël Vannelle est un fou de BD, il a une collection que les spécialistes lui envient, il peut faire un voyage à l’autre bout de la planète pour dégoter un dessin rare. Du coup, il a comme ami Claude Viallat, le peintre né à Nîmes qui a exposé au Centre Pompidou, à la Biennale de Venise, à New-York ou au Japon, qui a aussi créé les vitraux de l’Eglise Notre-Dame-des-Sablons à Aigues-Mortes. Claude Viallat est fou de tauromachie et collectionne en bandes dessinées tout ce qui représente l’image du taureau. La BD l’a donc naturellement rapproché de Raphaël Vannelle. Il a déjà dessiné, en édition limitée, des étuis pour le Champagne Ruinart. Pour les 60 ans du Pac, il a créé une étiquette pour les bouteilles, un nombre aléatoire d’entre elles deviendront des collectors, avis aux amateurs ! 

L’étiquette réalisée par le peintre nîmois Claude Viallat

Mais une autre rencontre, avec le célébrissime artiste urbain, pochoiriste, C 215 (Christian Guémy de son vrai nom) va également se voir lors du 60ème anniversaire. Raphaël Vannelle avait envoyé un carton de sirop au citron à son association, de là était née une amitié. L’artiste a réalisé 3 oeuvres pour l’anniversaire à venir qui deviendront elles aussi des étiquettes pour une partie aléatoire des bouteilles, de futurs musts pour les collectionneurs. A titre d’information, C125, spécialiste du street – art, pour concrétiser son soutien aux populations en souffrance après le début de la Guerre en Ukraine, a tagué sur des immeubles de 25m de haut des portraits d’enfants qui endurent ce drame, l’invasion des chars et les bombardements russes. Il a aussi imaginé, à la façon d’Eugène Delacroix, une « Liberté guidant le peuple » aux couleurs jaune et bleue de l’Ukraine sur la terrasse de l’Ambassade de France à Kyev. Une quinzaine de photos de ses oeuvres ont même été exposées dans la Galerie des Fêtes de l’Hôtel de Lassay, à la demande de la présidente de l’Assemblée Nationale, à Paris, en février.

En attendant ces 60 ans prévus au deuxième semestre 2023, Raphaël Vannelle espère que le prix des matières premières va retomber pour offrir à nouveau à ceux qui consomment les sirops et alcools de la Distillerie Blachère des tarifs qui redescendent un peu. Il attend aussi avec impatience les régates nautiques des Jeux Olympiques de juillet 2024 prévus au large de Marseille, pour y voir la mosaïque d’un des bancs de La Corniche Kennedy qui surplombe la mer. Elle figurera un « Pac/à l’eau » (clin d’ oeil à PACA – Provence Alpes Côte d’Azur). Un « zeste » d’immortalité pour cette petite bouteille de sirop de citron née à Avignon et connue universellement.

www.paccitron.com – 04 90 83 55 65

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