28 avril 2024 |

Ecrit par le 28 avril 2024

Le pourcentage de détention du capital ou des droits de vote supérieur à 25% doit être précisé

Selon la cour d’appel de Lyon, une société non cotée doit décla- rer le pourcentage exact de capital et/ou de droits de vote détenu, directement ou indirectement, par chacun de ses bénéficiaires effectifs lorsque ce pourcentage dépasse 25%.

Les sociétés non cotées sont tenues d’identifier et de déclarer leurs bénéficiaires effectifs au Registre du commerce et des sociétés (RCS) (C. mon. fin., art. L. 561-46, al. 1er). Parmi les bénéficiaires effectifs à déclarer, figurent les personnes physiques qui détiennent, directement ou indirectement, plus de 25% du capital ou des droits de vote de la société (C. mon. fin., art. R. 561-1, al. 1er).

En l’espèce, une société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) a déclaré un bénéficiaire effectif en application de ce critère de détention. Le greffe ainsi que le juge commis à la surveillance du RCS ont rejeté sa déclaration au motif qu’elle n’indiquait pas le pourcentage effectif précis de détention du capital et/ou des droits de vote du bénéficiaire effectif déclaré. Selon le juge, la précision du pourcentage de détention au-delà du seuil de 25% est indispensable à l’explication concrète des modalités de contrôle ou de l’avantage retiré par le bénéficiaire effectif et, de manière incidente, à l’effectivité du contrôle et de la vérification par les autorités compétentes des informations portées sur les déclarations ; ne saurait en effet être confondue la situation d’un associé ne détenant qu’une minorité de blocage avec la situation d’un associé majoritaire au regard du contrôle d’une société. La cour d’appel de Lyon confirme la position et l’argumentation du juge commis à la surveillance du RCS. Elle considère que l’exigence de la mention du pourcentage est conforme aux objectifs de police économique poursuivis par les législations nationales et européennes dans le cadre de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et destinée à connaître le degré d’implication ou de bénéfice de la personne physique visée dans les décisions concernées. Selon la cour d’appel, le premier juge n’a ni opéré une interprétation extensive des textes ni porté une atteinte disproportion- née aux principes de licéité, loyauté et transparence de la collecte des données personnelles, comme le prétendait la SASU.

De plus, la cour d’appel écarte, pour défaut de « valeur d’une norme contraire », l’avis de l’Association nationale des sociétés par actions qui retient, au contraire, que la mention du pourcentage de détention ne peut être exigée (ANSA, comité juridique, 7 nov. 2018, n° 18-054). Constituent aussi des arguments inopérants pour les juges l’absence d’avis public rendu par le comité de coordination du RCS et le caractère aléatoire des exigences des greffes.

La cour d’appel rejette également l’argument financier de la SASU selon lequel la mention du pourcentage entraîne l’obligation d’effectuer une nouvelle déclaration dès qu’un mouvement de titres (exempté de publicité pour une SAS) modifie le pourcentage de détention d’un bénéficiaire. Les juges du fond soutiennent que la nécessité de telles démarches au coût relatif (entre 23,71€ et 54,51€ l’acte) ne peut jamais exclure l’application d’une exigence légale.

Enfin, sont jugées infondées les interrogations de la SASU sur la faisabilité du contrôle par le greffier, que celle-ci prétendait dévolu à la plateforme centrale européenne des déclarations des bénéficiaires effectifs, dès que des sociétés étrangères ou des personnes physiques étrangères sont concernées, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

Remarque : cet arrêt confirme l’ordonnance du juge commis à la surveillance du RCS de Bobigny (T. com. Bobigny, ord., 18 mai 2018, n° 2018S07031). Ce dernier avait précisé que le greffier chargé d’un « contrôle de police économique » doit vérifier la cohérence entre les informations portées dans la déclaration et celles figurant dans le dossier de la société déclarante (comprenant les inscriptions, les pièces justificatives et les actes). En cas d’incohérence ou d’insuffisance des informations, le greffier est tenu de refuser d’enregistrer la déclaration.

Par analogie, on peut s’interroger sur le niveau de détails des modalités de pouvoir (par exemple, conte- nu des accords d’actionnaires) que peut exiger le greffe en cas de bénéficiaire effectif déclaré, cette fois-ci, en application du critère de contrôle (C. mon. fin., art. R. 561-1, al. 1er). Par ailleurs, la cour d’appel, tout comme le juge commis à la surveillance du RCS du tribunal de commerce de Bobigny, valide la déclaration effectuée par la SASU sur papier libre, confirmant ainsi l’absence de support de déclaration obligatoire (T. com. Bobigny, ord., 18 mai 2018, préc.)

CA Lyon, 3e ch. A, 12 sept. 2019, n° 19/02040 Éditions Législatives – www.elnet.fr. Article extrait du Bulletin d’actualité des greffiers des tribunaux de commerce n° 136, décembre 2019 : www.cngtc.fr

 

 

 

 

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