1 septembre 2025 |

Ecrit par le 1 septembre 2025

‘Le mystère Ophélia’ dévoilé avec passion au Théâtre des Corps Saints

Le mystère Ophélia’ ou la véritable histoire de Lizzie Siddal

Quand elle découvre le célèbre tableau de Millais ‘Ophélia’, Céline Devalan a le coup de foudre.  Elle se présente ainsi sur le plateau : « je vais vous raconter une histoire, l’histoire tragique et fascinante de la jeune modiste Lizzie Siddal qui servit de modèle au tableau. » Par le pouvoir des mots, en utilisant habilement la poésie, la peinture, la vidéo et les couleurs, elle nous projette dans l’univers d’un atelier d’artiste dans le Londres envoûtant du XIXe siècle.

Londres, 1850

Lizzie Siddal, muse d’un groupe d’artistes romantiques — les Préraphaélites — a une relation tumultueuse avec le peintre Dante Rossetti qui, obsédé par sa beauté, la représente éternellement en Béatrice, figure de l’Amour courtois. Elle rêve et accepte cependant — malgré l’opposition de Dante — d’être le modèle du peintre John Everett Millais pour son tableau ‘Ophélia’ représentant la mort d’Ophélie dans Hamlet de Shakespeare.

Bouleversante Céline Devalan, auteure, metteuse en scène et interprète

Mais aussi Béatrice, Lizzie, Ophélie… femmes évoquées et délicatement interprétées par Céline Devalan. Il y a un vertige à suivre la destinée de Lizzie qui rejoint la fin tragique d’Ophélia tout en vivant sa passion tumultueuse avec Dante. L’ambiguïté de ce destin est efficacement suggérée par des projections de tableaux, des extraits filmés d’Hamlet, des espaces scéniques traversés par un rideau de tulle. Dans la noirceur de ce  mystère, dans cette destinée lugubre jaillissent couleurs chatoyante et poésie, chevelure rousse flamboyante de Lizzie. Céline Devalan retranscrit le trouble qu’elle a eu face au tableau en une mise en scène sensible participant à une ambiguïté temporelle qui nous plonge entre rêve et réalité. 

Mystère et poésie

La pièce a le charme d’une tragédie historique tout en ayant la poésie du mystère. 

Tous les ingrédients sont là : coup de foudre, passion, orgueil, jalousie, costumes d’époque, mystère. Le duo que forment  Dante et Lizzie est magnifiquement interprété et crédible avec un Romain Arnaud-kneisky charmeur, boudeur et égoîste et Céline Devalan fragile et néanmoins obstinée, amoureuse patiente et passionnée. Céline Devalan nous a donné envie d’en savoir plus sur cette époque victorienne et sur le mystère de ce tableau qui n’est pas résolu car il hante toujours l’Art anglais. Elle réhabilite aussi le destin de ces femmes artistes au fil des siècles qui se sont effacées volontairement ou pas face à leurs amants ou maris.  Un beau moment de théâtre savant et sensible. 

Jusqu’au 26 juillet. Relâche les mardis. 10h05. 14 et 20€. Théâtre des Corps Saints. 76, Place des Corps Saints. Avignon. 04 84 51 25 75.


‘Le mystère Ophélia’ dévoilé avec passion au Théâtre des Corps Saints

L’histoire 

Trois frères se retrouvent en bordure de forêt près de la rivière où leur père les emmenait pêcher. Le plus jeune est sur le point de se marier, le cadet, spécialiste de l’art est venu tout exprès pour l’occasion, tandis que le frère aîné est attendu. Pourtant il se passe quelque chose de bizarre. Ils auraient jurés être tous ensemble dans un camion juste avant de se retrouver sur le lieu de leur enfance.

Le plateau

Un plateau plongé dans le noir. Des plots posés au sol orchestrent un espace de forêt en bord de rivière. Derrière une tenture, le violon égrène ses mélodies, parfois hachées, vives, lentes, harmonieuses, rythmant le récit de ces anciens enfants perdus dans leur vie d’adulte. Puis l’histoire déroule sa trame, chacun y apportant sa sensibilité. Peu à peu ces parties de vie forment un tout, délivrant le secret de chacun puis de toute une famille. Il était une fois un homme qui avait trois fils. Ils étaient tout pour lui mais eux quelle était leur place auprès de lui ?

Les comédiens

Trois silhouettes en chemise blanche et pantalon anthracite dans le noir. Trois hommes dans une chorégraphie réglée au millimètre. Trois personnalités campées pour incarner un texte ciselé à la hache à la fois subtil, féroce, poétique et vibrant. Trois comédiens à la fois bouleversants de justesse et puissants dans leur jeu. Un magnifique moment de théâtre d’où l’on sort bouleversés par toute cette mécanique, prodige d’un travail d’équipe aussi intelligent qu’abouti. Car le propos est profond. L’exécution du jeu, particulièrement exigeant et les acteurs, chose très rare, jouent d’égale qualité. Un vrai grand moment de théâtre.

Grâce à eux

Le chemin des passes dangereuses. De Michel Marc Bouchard, sur une mise-en-scène de Claude Crétient et une scénographie de Dominique Fataccioli. Les comédiens sont Mikaël Alhawi, Willy Lietchy et Franck Borde. Ambroise Chevalier est au violon. Une production de la Salamandre.

Les infos pratiques

Le Chemin des passes dangereuses. Jusqu’au 31 juillet à 20h50. Théâtre des Corps Saints à Avignon. 76, place des Corps saints. Réservations 04 90 16 07 50.


‘Le mystère Ophélia’ dévoilé avec passion au Théâtre des Corps Saints

Voilà un spectacle in-cro-yable. Un pur ovni. Une heure de plaisir absolu grâce à une présence, un charisme et surtout à une sincérité clairement inattendue. Bref, je vous parle là de ‘Coming out’ par et avec Mehdi-Emmanuel Djaadi, un seul en scène déjà plébiscité par le tout Avignon et pas seulement… par les cathos du cru.

L’histoire ?

L’histoire ? Même si l’on croit la connaître par cœur, elle est une réalité. Des parents d’origine immigrée –d’Algérie- qui élèvent leurs enfants dans les barres HLM. Des petits qui grandissent et se font happés, au seuil de l’adolescence, par de plus grands qui y voient une main d’œuvre potentiellement intéressante. L’escalade dans l’organisation d’opérations à la marge. La taule que l’on frôle et qui s’oublie à vous parce que les potes, tous en cellule, n’ont rien lâché. Et dans tout ce bruit, toute cette agitation, à un moment et dans un lieu inconnu, un éclair a tracé sa lumière dans les ténèbres.

Des gens bizarres qui prient les mains en l’air dans un bâtiment

Cet éclair de lumière dans les ténèbres ce sera une église, des rencontres bienveillantes, comme cette assemblée de gens bizarres qui chantent et dansent les mains en l’air dans une église et un frêle prêtre à la voix flutée, au regard éclairé, qui lui tendra timidement sa bible. Mehdi-Emmanuel lui a tout du rescapé, du miraculé, et alors qu’il livre sur scène plus de 15 personnages réels, ceux qui ont fait ou font partie de sa vie, on rit aux larmes tandis qu’au tréfonds de soi on perçoit sans cesse l’abîme à côté de ses pas. Pourtant le spectacle du début à la fin est hilarant. Les situations plantées sont aussi cocasses que terribles. Il est à la fois Mehdi Emmanuel et le chameau qui revient au galop.

Impressions

Ce comédien possède un immense talent. Celui de se livrer sans ambages mais avec pudeur, subtilité et une intelligence acérée. Il déroule puissamment l’engrenage bien huilé d’une société schizophrène qui veut à la fois sauver les gens mais les assigne à résidence dans des cases choisies d’où il est impensable de s’échapper. C’est pourtant ce que fera Medhi-Emmanuel en s’autorisant à vivre une vie hors normes, à faire des choix d’une liberté absolue. Sa voie ? Celle tout à fait incongrue d’un changement de religion ! Le très jeune adulte musulman décide d’embrasser la religion catholique, de révolutionner sa vie. Emporté par quelque chose de divin qui ne dit pas son nom mais qui pave son chemin de circonstances incroyables pour arriver là où personne -et surtout pas lui-même- ne l’attendait !

Bienvenue dans le réel

Cet homme est un miraculé de nos gentils systèmes à la noix qui font et défont dans l’ombre et parfois dans la lumière des destins entiers. Car on en apprend des choses avec Mehdi Emmanuel ! Et sa parole, jamais jugeante, est salutaire, ouvrant sans doute de nouveaux espaces de liberté et surtout au discernement. La salle comble curieuse d’entendre la conversion d’un musulman au catholicisme est arrivée joyeuse et volubile comme on va à la kermesse. Une soutane a même fait son apparition dans le public. Alors si les musulmans se mettent à fréquenter les églises alors que les cathos eux-mêmes se comptent sur les doigts de la main où va-t-on ma brave dame ? Et pourtant… Sur scène des lumières dorées ponctuent l’espace. Mehdi-Emmanuel entre humble, les yeux pétillants, la silhouette ramassée mais tankée, la carrure dessinée par des années de boxe. Sa voix, ses gestes, cette timidité pas tout à fait effacée, le petit enfant qui surgit de temps en temps de ce corps d’homme… Il rayonne. Il conte son incroyable histoire. Sans doute il ne dit pas tout. Sans doute des blessures plus profondes se cachent dont il se servira pour grandir encore, déployant sa force. Parce que la vie qui vous taillade vous révèle aussi à vous-même et qu’on ne se transforme que lorsque l’on est en danger de mort… Physique et spirituelle.  

Le talent ça se travaille

Mehdi Djaadi qui a quitté l’école à 16 ans, s’est mis à dévorer les livres, les grands auteurs. Il est diplômé de la Manufacture école supérieure d’art dramatique de Lausanne. Révélations aux césars 2016 pour son rôle dans “je suis à vous tout de suite” de Baya Kasmi. Il a participé à une dizaine de films et a reçu plusieurs prix d’interprétation. Il a joué dans la pièce « I am Europe » de Falk Richter puis en tournée européenne et à Paris à l’Odéon Théâtre de l‘Europe.Vous le verrez bientôt dans la nouvelle série « L’Opéra » sur OCS et dans le prochain long métrage de ‘La boîte noire’ du réalisateur Yann Gozlan avec Pierre Niney. Ne vous avais-je pas signalé un ‘immense talent ? Mon conseil ? Ruez-vous à son spectacle !

Les infos pratiques

Coming-out Jusqu’au 31 juillet. Relâche les 12, 19, et 26 juillet. Par et avec Mehdi-Emmanuel Djaadi sur une mise-en-scène ultra-soignée de Thibaut Evrard. 19h.Théâtre des Corps-Saints, 76, place des Corps-Saints à Avignon. 20€. Résas : 04 90 16 07 50.

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