2 mai 2024 |

Ecrit par le 2 mai 2024

Y-a-t-il des limites à l’indécence ?

France, terre de contrastes. Alors que les entreprises du CAC 40 n’ont jamais distribué autant de dividendes à leurs actionnaires une majorité de français voit leur pouvoir d’achat reculer fortement et certaines catégories sociales se paupériser. La théorie du ruissellement fait plutôt place aujourd’hui à celle du reflux. Une telle situation est-elle tenable longtemps ?

TotalEnergies vient d’annoncer, pour son exercice 2022, un résultat net de 36,2 milliards d’euros (en intégrant une provision de 15 milliards), un record historique pour l’entreprise française. Dans le même temps les français ont vu leurs pouvoirs d’achat reculer en grande partie à cause de l’augmentation des prix des carburants. De son côté, BNP Paribas affiche un résultat net de 10 milliards, en hausse de 7 % par rapport à 2021. Et la banque française annonce, dans la même semaine, 921 suppressions d’emplois. Quant aux sociétés d’autoroute, elles ont enregistrés en 2022, un bénéfice record de 3,4 milliards d’euros et elles ont procédés à une augmentation de leurs tarifs au 1er février dernier de 4,75 % (avec l’aval du gouvernement). Il y a vraiment quelque chose qui ne tourne pas rond…

“Où est le bien commun, l’intérêt général ?“

Le chacun pour soi devient une règle
Que des grandes compagnies comme TotalEnergies fassent des bénéfices, rien à redire c’est leurs finalités, mais qu’elles les réalisent en faisant les poches des consommateurs qui ne peuvent se passer de carburant, c’est de l’abus de position dominante. Et qu’ensuite, elles reversent la quasi-totalité de leurs profits à leurs actionnaires alors qu’elles ont le devoir d’investir dans la transition énergétique et préparer la fin des énergies fossiles, c’est condamnable. Et le pire du pire n’étant jamais certain en ces périodes, ces grands groupes utilisent une partie de leurs profits pour racheter leurs propres actions, ce qui a pour effet de faire monter les cours et donc leurs profits. Là, ça devient totalement amoral. Plus de bien ou de mal. Seul le profit compte. Où est le bien commun, l’intérêt général ? Le chacun pour soi devient une règle. Surtout que ces entreprises développent leurs activités sur des secteurs indispensables à la vie et aux bien-être de tous, et qu’elles jouent un rôle central dans l’économie nationale. Même les économistes les plus fervents défenseurs du libéralisme reconnaissent qu’il s’agit là d’une anomalie majeure qui va rapidement nuire au système lui-même. Mais que fait la police ?

“L’état le plus libéral au Monde montre l’exemple“

Des règles sont nécessaires
Notre système a besoin d’être encadré. Des règles sont nécessaires. C’est l’intérêt de tous.
Le Président américain Joe Biden, dans son dernier discours sur l’état de l’Union, entend quadrupler les impôts sur les rachats d’action et cela pour encourager l’investissement. Il appelle également à mettre en place une taxe minimale sur les milliardaires. L’état le plus libéral au Monde montre l’exemple. Pendant ce temps-là, en France, le ministre de l’économie et des finances nous dit ne pas savoir définir les superprofits… Et toutes les attentions sont portées sur la réforme des retraites, comme un arbre qui cache la forêt !


Y-a-t-il des limites à l’indécence ?

Guerre en Ukraine, frictions géopolitiques, inflation, tensions énergétiques, vagues de chaleur – 2022 est d’ores et déjà considérée comme une année de crise. Et comme dans toutes les périodes de crise, on retrouve des gagnants. Cette fois, il s’agit notamment des grands groupes pétroliers, qui encaissent des profits records avec la flambée des prix de l’énergie. Le géant français de l’énergie, Total, a par exemple annoncé un bénéfice de 5,7 milliards de dollars au deuxième trimestre, soit une hausse de plus de 60 % par rapport à l’année dernière. « C’est la première fois depuis vingt-cinq ans que je vois toutes nos activités profiter d’un tel contexte de prix », a commenté Patrick Pouyanné, le PDG du groupe.

Les autres géants pétroliers ne sont pas en reste. La compagnie anglo-néerlandaise Shell a enregistré un bénéfice de 11,5 milliards de dollars d’avril à juin, soit plus du double de celui réalisé à la même période en 2021. La situation est même encore plus profitable aux groupes américains ExxonMobil et Chevron, qui ont vu leurs profits plus que tripler, pour atteindre respectivement 17,9 et 11,6 milliards de dollars au deuxième trimestre. À titre de comparaison, c’est plus que le bénéfice trimestriel moyen d’Amazon l’année dernière (8,3 milliards de dollars en 2021).

Les marges juteuses dégagées par les raffineries sont toutefois vues d’un œil critique. Comme le rapporte France24, Exxon et Chevron se retrouvent dans le collimateur de l’administration Biden aux États-Unis, qui leur reproche de ne pas faire suffisamment d’efforts financiers pour limiter la flambée des prix à la pompe. Début juin, le président américain avait même ironisé à leur égard, en avançant qu’Exxon allait « gagner plus d’argent que Dieu » cette année. Le chancelier allemand, Olaf Scholz, s’est lui aussi exprimé de manière critique récemment, bien que de manière plus modérée. En juillet, il avait déclaré sur Twitter, « certaines entreprises réalisent des bénéfices particulièrement importants dans la situation actuelle, avec la hausse des prix de l’énergie. Ce n’est pas correct ».

De Tristan Gaudiaut pour Statista

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