16 juin 2025 |

Ecrit par le 16 juin 2025

Maison Sinnae, le nouveau pôle œnotouristique de Laudun inauguré à l’occasion du centenaire de sa cave

Sinnae était le prénom de l’épouse de Jules César, le conquérant qui avait installé son camp romain de 18 hectares sur les hauteurs de la commune de Laudun, au-dessus des Vallées de la Cèze et de la Tave. D’une superficie de 2 350 hectares, dont 1 800 classés en AOC (ce qui en fait le 18ème cru des Côtes-du-Rhône), le vignoble de la Maison Sinnae regroupe depuis 2019 les deux caves de Laudun et Chusclan. Hommes et caves ne font qu’un, 100 ans de passion, de savoir-faire et d’aventure collective pour 140 familles vigneronnes. 

Entre coteaux calcaires et galets roulés, le cru Laudun ce sont 90 hectares de blanc soit 2 715 hl produits et 150 ha en rouge, soit 4 450hl commercialisés. Après la rénovation du caveau, un nouvel espace a été ouvert en face, un écrin dédié au vin, à la vente comme aux réceptions conviviales et aux soirées privées festives le jeudi.

« Depuis 2014, un grand plan d’investissement a été lancé pour mettre en valeur le travail des vignerons », explique Philippe Pellaton, le président de la coopérative. 16M€ à la clé en tout. D’un côté de la route, un chai flambant-neuf, dédié au pôle logistique et à l’embouteillage, de l’autre, dans une ancienne maison cossue de notaires, un caveau de commercialisation des cuvées ‘Genêts’, ‘Dolia’, ‘Monticauts’ et ‘Ribières’ ou ‘Aurélien’, une vinothèque et un espace où peuvent aussi être organisés des ateliers de dégustation et des séminaires d’associations ou d’entreprises, des soirées festives.

L’œnotourisme pour mettre en lumière les terroirs

Parallèlement, pour prolonger cette immersion, Philippe Pellaton fourmille d’idées pour booster les finances des vignerons, face à la crise et à la déconsommation de vin grâce à l’œnotourisme. « Des terroirs, une âme », c’est l’axe de communication de la cave, avec des activités ludiques comme des escape games, des randonnées en VTT à assistance électrique à travers les vignobles avec pauses-dégustation dans les caveaux, initiation à l’oenologie. Maison Sinnae propose aussi un hébergement sur mesure dans des gîtes, des lodges en bois et des maisons de caractère en pleine nature mis à disposition par les viticulteurs.

Le 100e anniversaire

Pour marquer ce centenaire, des vendanges participatives seront organisées à l’automne avec la création d’une cuvée spéciale 1925-2025. Une affiche signée Gaël Dimitri a été imprimée pour marquer « ce siècle de vin, de lien et d’émotion », a insisté Philippe Pellaton. Ils étaient près de 300 invités, pour l’inauguration de la Maison Sinnae. Le 13 juin, place à la Soirée des Enfants terribles. Pour le 14 juillet on attend autour de 1 200 convives pour la Feria organisée avec le club taurin. Et en octobre, les 11 & 12, se dérouleront, comme d’habitude les vendanges historiques de Chusclan avec messe en provençal, défilé de voitures anciennes, foulage et pressée des raisins à l’ancienne.

La professionnalisation des vignerons

« Nous travaillons tous ensemble pour ajouter de la valorisation et de la visibilité à nos vin, ajoute le Président Pellaton. Entre 2020, 2022 et 2024, à cause des phénomènes climatiques comme le gel, la grêle et la sècheresse, nous récoltes ont reculé de 40%. L’an dernier on a mieux résisté. Désormais, nos vignerons se professionnalisent. Quand ils reçoivent des touristes étrangers dans leur cave, ils soignent davantage l’accueil, certains parlent anglais, italien, espagnol ou allemand. Du personnel formé est dédié aux visites et dégustations. Même si je suis un peu inquiet parce que certains ont du mal à s’en sortir, les courtiers, négociants, grossistes, cavistes et restaurateurs nous aident. On ne mesure pas encore les conséquences de la reconnaissance du Laudun en AOC, mais ça va venir dans les prochaines années et donner un sacré coup d’accélérateur à nos ventes. »

Contact : contact@sinnae / 04 66 90 11 03


Maison Sinnae, le nouveau pôle œnotouristique de Laudun inauguré à l’occasion du centenaire de sa cave

Domaine André Brunel“, les lettres rouges se détachent sur les murs de pierre de l’imposante bâtisse familiale. « Cette maison existe depuis 1750, et après Lucien Brunel mon grand-père, c’est mon père André qui en a pris les rênes en 1971, il nous a quittés en 2022 et je lui ai succédé. Au départ, nous avions une vingtaine d’hectares, aujourd’hui on en recense 90. 20 hectares de vignes en AOC Châteauneuf-du-Pape, 50ha en Côtes-du-Rhône et CDR Villages à Uchaux et Travaillan, 5ha en Lirac sur la commune de Saint-Génièes-de-Comolas et une quinzaine en « Vin de Pays », explique Fabrice Brunel, le patron de la cave qui emploie une douzaine de salariés.

Parmi la dizaine de cuvées André Brunel, les plus réputées sont ‘Les Cailloux’, en rouge élevés en fûts inox pendant 18mois avec le trio de cépages 70%. Pour ‘Les Cailloux’ blancs, les vignes sont plus jeunes, 30 ans en moyenne, assemblage majoritairement à base de Roussanne (80%), qui apporte arômes, finesse et élégance, plus 15% de Clairette et 5% de Grenache. Cuvée de prestige, celle du ‘Centenaire’ issue de vignes de 120 ans, vendangées à la main et assemblée avec un dosage de 70% de Grenache, 20% de Mourvèdre et 10% de Syrah, ce qui lui donne des notes de garrigue et de fruits rouges.

« Nous produisons en tout 400 000 bouteilles par an, 90% de rouge et nous en exportons 85%, au Japon, au Royaume-Uni, en Australie et en Europe et 15% aux Etats-Unis qui posent problème en ce moment avec les tarifs douaniers, explique Fabrice Brunel. Après le Covid et la flambée du prix des matières premières (verre, palettes, colle, étiquettes), de l’ énergie et des transports, on a été un peu impactés, je n’ai pas pu répercuter toutes les hausses, mais 4€ ou 5€ sur les cuvées les plus réputées comme par exemple, 39€ ‘Les Cailloux’. Mais nous commercialisons aussi des CDR à 12€ et 19€ et des vins-plaisir comme ‘L’Instant Rosé’ à 9€. »

Comme, dans une autre vie il a été consultant et qu’il fourmille d’idées, notre jeune vigneron a aussi lancé un gin maison. « C’est plus classe que la bière, plus spiritueux, en lien avec le vin puisque nous utilisons les rafles de nos vignes que nous assemblons avec des baies et des plantes aromatiques. C’est une forme de filiation naturelle. Certes, c’est une niche de 2 000 cols millésimés chaque année, mais ça plaît aux jeunes qui, après, peuvent aussi s’essayer aux AOC de notre cave. »

Fabrice Brunel vit avec son temps. Il a un projet agrivoltaïque en cours de construction. Sur une parcelle de 5 hectares de cépages blancs. « C’est Sun’Agri qui installe des persiennes solaires sur mes rangs de vignes, je ne paie ni loyer, ni investissement et à terme, ces écrans protègeront les feuilles et les grains de raisin de la canicule, du gel et de la grêle, donc du stress thermique et hydrique et, en plus, produiront de l’électricité verte dès le mois de septembre prochain. » Un vigneron innovant et engagé dans un domaine qui date d’avant la Révolution française.

Fabrice Brunel avec son papa André, décédé en 2022. ©Domaine André Brunel

Contact : 04 90 83 72 62


Maison Sinnae, le nouveau pôle œnotouristique de Laudun inauguré à l’occasion du centenaire de sa cave

La préfecture de Vaucluse annonce le déploiement par le gouvernement d’un fonds d’urgence doté de 9M€ au niveau national pour accompagner les exploitations des jeunes viticulteurs. Ces derniers ont jusqu’au lundi 2 juin pour déposer leur demande d’aide.

Le fonds d’urgence de 9M€ déployé par le gouvernement sera décliné en Vaucluse afin d’aider les exploitations du département les plus fragilisées depuis leur installation. Les jeunes agriculteurs installés entre 2020 et 2024, ayant moins de 40 ans révolus à l’installation, sont éligibles et pourront percevoir jusqu’à 20 000€ d’aide.

L’aide sera attribuée aux viticulteurs, pour la vigne de cuve (à l’exclusion du raisin double fin) :

  • qui connaissent des pertes de 20% minimum de chiffre d’affaires ou d’excédent brut d’exploitation supérieures à l’issue de la récolte 2024 par rapport à une année de référence (comprise en 2020 et 2023), justifiées par un document comptable (extrait de liasse fiscale, attestation comptable, déclaration TVA pour les exploitants au micro-BA).
  • qui connaissent des difficultés financières prévisionnelles liées à des pertes de récolte constatées supérieures ou égales à 20% dans les déclarations de récolte 2024 par comparaison au dernier millésime normal en récolte identifié (niveau départemental), compris entre 2020 et 2023.
  • qui ont des difficultés financières liées à des pertes de récoltes répétées au cours des cinq dernières années, dont au moins une supérieure ou égale à 20%.

Le dépôt des demandes d’aide se fait via la plateforme ‘Mes démarches simplifiées’ jusqu’au lundi 2 juin 2025 inclus. Plus d’informations sur le site de la préfecture de Vaucluse (rubrique Actions de l’État/Agriculture/Aides conjoncturelles (climatiques et économiques), par téléphone au 04 88 17 85 12 ou par mail à l’adresse ddt-iac@vaucluse.gouv.fr


Maison Sinnae, le nouveau pôle œnotouristique de Laudun inauguré à l’occasion du centenaire de sa cave

Le Château Maucoil est un domaine de l’appellation Châteauneuf-du-Pape qui tient ses lettres de noblesse de la famille royale Orange-Nassau des Pays-Bas.

« Ici, huit siècles nous contemplent, de Charlemagne à Louis XIV », explique tranquillement et dans un large sourire, Bernard Duseigneur, heureux copropriétaire du site depuis 2022. Proche de la Via Agrippa, ce domaine a d’abord accueilli des légions romaines dans l’antiquité. Puis, la Principauté d’Orange où il est situé, s’est retrouvée enclavée dans le Comtat Venaissin. Et c’est Joseph de la Pise, greffier au Parlement d’Orange qui a hérité de ce Château Maucoil construit en 1624, quand il était archiviste de la famille royale des Pays-Bas.

©Andrée Brunetti / L’Echo du Mardi

Sont entre les mains de Bernard Duseigneur, ces cyprès, ces pins, ces oliviers, ces platanes et ces vignes centenaires, soit 25 hectares en appellation d’origine contrôlée Châteauneuf-du-Pape et 18 hectares en Côtes-du-Rhône Village. Avec trois types de sous-sol, l’argile, les calcaires et les galets roulés et des cuvées de blanc et de rouge ‘Esprit’, ‘Le pin’, ‘Privilège’ et ‘Tradition’. Et en particulier, la plus vieille parcelle d’un seul petit hectare, qui porte son année de naissance en bandoulière, ‘1895’ que Bernard Duseigneur bichonne avec Katell, sommelière et responsable de l’activité d’œnotourisme .

Le propriétaire Bernard Duseigneur et Katell. ©Andrée Brunetti / L’Echo du Mardi

« Nous souhaitons réveiller cette belle endormie qu’est Maucoil »

« Nous souhaitons réveiller cette belle endormie qu’est Maucoil, précise le propriétaire. Ce lieu a une histoire, une âme, un patrimoine, une culture, nous souhaitons les mettre en valeur, les partager, accueillir des visiteurs pour qu’ils vivent cette expérience unique. »

Son fils, François, a posé ses valises dans le domaine familial en 2021, après avoir bourlingué et fait des études scientifiques et environnementales à Londres, Leeds et au Mexique pour observer les volcans. « Ici, je m’occupe des ventes, de l’administration, de la gestion, mais aussi du travail de la vigne (taille – débourrement – traitements contre le mildiou et l’oïdium – ébourgeonnage). Je participe aussi à des salons en France et à l’étranger, comme Vinexpo à Singapour. » Et comme oncle Donald (Trump) a un peu chamboulé le jeu… « Plutôt qu’exporter vers les USA, nous allons tout faire pour attirer les Américains chez nous, les accueillir agréablement, les héberger, leur montrer notre patrimoine et leur vendre nos bouteilles de blanc et de rouge », conclut-il.

Le fils, François Duseigneur. ©Andrée Brunetti / L’Echo du Mardi

50% d’exportation

Le papa, Bernard, revient sur la production de Château Maucoil. « Nous jouons avec les 13 cépages de l’AOC Châteauneuf, mais surtout avec le Grenache, la Syrah, le Mourvèdre et le Cinsault. Le reste ce sont des traces. Nous exportons 50% de nos 150 000 bouteilles, dont 6% de blanc vers 25 pays d’Asie, d’Europe et d’Amérique du Nord. Et comme les tarifs douaniers risquent de brouiller les pistes, il vaut mieux inverser le modèle. Au lieu d’exporter, nous avons comme projet de construire un hôtel avec une trentaine de chambres d’hôte, pour accueillir chez nous les touristes (notamment US) qui aiment la Provence, son climat, son art de vivre, son bien-être, ses festivals, ses espaces nature préservés ».

Et aussi sa gastronomie avec ses produits locaux de qualité, ses fraises de Carpentras, son agneau de Sisteron, son taureau des Alpilles, ses fromages du Ventoux, son  épeautre de Sault, tous ces produits labellisés que le talentueux chef cuisinier Jean-Claude Altmayer, qui a veillé longtemps sur les cuisines du cinq étoiles La Mirande à Avignon, sait désormais sublimer à Maucoil pour émoustiller les papillles.

Le chef Jean-Claude Altmeyer et Bernard Duseigneur. ©Andrée Brunetti / L’Echo du Mardi

Contact : reservations@chateau-maucoil.com / 07 85 14 71 93


Maison Sinnae, le nouveau pôle œnotouristique de Laudun inauguré à l’occasion du centenaire de sa cave

La 40e édition du concours des vins d’Avignon s’est déroulée à la Salle polyvalente de Montfavet ce samedi 29 mars, attribuant 132 récompenses. L’événement anniversaire rappelle cependant, au regard du contexte actuel, la grande nécessité d’accompagner les professionnels de la vigne. 

C’est dans une ambiance sérieuse et impliquée que le jury de 150 personnes s’attelle à tester les 445 échantillons de vins en compétition. L’éclat sec du bouchon retiré, le versement rythmé du vin, le choquement des verres et le claquement des langues au palais constituent le protocole des évaluations successives du concours. Une démarche née à Avignon il y a 40 ans, qui ne visait qu’à aider les agriculteurs dans la durée après un millésime 1985 marqué. 

« Les médailles sont là pour attirer et rassurer. »

José Gonzalvez, président du Concours des vins d’Avignon

Le concours de 2025 fait sens plus que jamais dans ce cadre économique flou, où le secteur traverse une crise aggravée. « Nous subissons une période difficile, mais les médailles sont là pour attirer et rassurer, chaque acheteur étant ainsi sûr d’avoir un vin sans défaut », avance José Gonzalvez, président du Concours des vins d’Avignon. Depuis 2020, une baisse mondiale de 20% des rendements accentue la détresse des professionnels. Et malgré les médailles des concours des vins, « le décrochage du prix ne couvre plus le coût de production du vin, qui en 2024 a diminué de 30 à 40% pour les Côtes du Rhône », souligne le président. 

« Si vous allez mal, on va mal. »

Gilbert Marcelli, Président de la CCI Vaucluse

L’appellation Côtes du Rhône est particulièrement impactée par cette crise, que la situation diplomatique internationale affecte. Intronisé à la Commanderie des Costes du Rhône durant cette édition, le Président de la CCI de Vaucluse Gilbert Marcelli évoque en ce sens « les mesures farfelues venant des États-Unis à l’encontre de (leurs) valeurs », insistant sur le soutien des partenaires du concours. « Nous sommes à vos côtés. Merci d’exister, de vous battre, car vous représentez beaucoup pour notre territoire », commente-t-il auprès de l’organisation, avant d’ajouter « Si vous allez mal, nous allons mal ». D’autant que la particularité du territoire des Côtes du Rhône tient de sa dimension interdépartementale et interrégionale. Gilbert Marcelli admet qu’il serait « plus simple en étant une unité » face aux contraintes qui s’accumulent, pourtant les appellations Côtes du Rhône tentent de tenir bon. 

« Il n’y a eu que 70 % de rendement à Laudun. »

Luc Pélaquié, président du syndicat des vignerons de l’AOC Laudun

« Localement, ce n’est pas la joie, il y a beaucoup d’arrachages », constate amèrement Luc Pélaquié, président du syndicat des vignerons de l’AOC Laudun. Le territoire est à l’honneur cette année dans le cadre du concours des vins d’Avignon. Une mise en lumière en contraste avec la réalité crue du terrain. « Il n’y a eu que 70% de rendement en 2024 dans l’appellation Laudun », précise le président du syndicat. Il rejoint le président de la CCI de Vaucluse sur la « situation délicate avec les États Unis » et évoque l’augmentation d’une « concurrence rude entre (eux), avec un prix plus rémunérateur pour les ventes directes en domaine. » Sur ce point, José Gonzalvez, le président du concours des vins d’Avignon, confirme la tendance avec l’exemple du vrac. « Des négociants achètent le raisin des viticulteurs et le mettent en bouteille, créant une concurrence sur les prix pratiqués, ce qui fait baisser le vrac pour créer plus de marge sur les bouteilles », explique José Gonzalvez. 

Pas de visibilité

Selon le président, les aides à la distillation et à l’arrachage ne couvrent pas les frais des agriculteurs, ou du moins imposent des contraintes supplémentaires dans un contexte indéfiniment complexe : « sans visibilité, nous nous demandons quels efforts faut-il faire pour investir. » Les difficultés du terrain se répercutent plus loin dans la filière, avec des concours de vins disparaissant depuis 2020 : Pertuis, Piolenc, Tulette, Vinsobres… « On ne sait pas où l’on va et on peut s’attendre au pire », envisage José Gonzalvez. Il faut anticiper l’évolution du marché en se tournant par exemple vers la Chine où la consommation de vins se développe. 

« Les coopératives sont nécessaires au viticulteur qui n’a pas de cave à gros volume ni les moyens d’exporter », rappelle le président du concours. Cependant, les maillons de la chaîne du vin restent fragilisés. José Gonzalvez souligne que « le jeune agriculteur amenant sa vendange à la coopérative est soumis aux aléas du marché, car si sa production se vend mal, il va devoir mettre la clé sous la porte. » Sans compter les familles qui, de génération en génération, œuvrent depuis des décennies pour le développement de ce patrimoine agricole mis en péril par les enjeux économiques et climatiques. 

De gauche à droite : Emmanuel Lopez, président des Disciples d’Escoffier Languedoc – Provence ; Rita Caron Barlerin ; Michel Gontard, président et co-fondateur du Concours des vins de la Foire d’Avignon ;  José Gonzalvez, président du concours des vins d’Avignon ; Luc Pélaquié, président du Syndicat des vignerons de l’AOC Laudun.

Amy Rouméjon Cros


Maison Sinnae, le nouveau pôle œnotouristique de Laudun inauguré à l’occasion du centenaire de sa cave

La 13e édition de Découvertes en Vallée du Rhône, qui a lieu tous les 2 ans à Avignon, capitale des Côtes-du-Rhône, s’est tenue au coeur du Palais des Papes ce mardi 1er avril. Un évènement qui concerne l’ensemble de la filière viti-vinicole de l’AOC, d’Ampuis à Nîmes, de Tain l’Hermitage au Duché d’Uzès.

Entouré par Damien Gilles, président du Syndicat des Vignerons des Côtes du Rhône et par Samuel Montgermont, président de l’UMVR (Union des maisons de vins du Rhône), Philippe Pellaton, président d’Inter Rhône évoque la situation actuelle prise en étau entre la forte déconsommation et les tarifs douaniers que menace d’appliquer le président Trump à nos vins. « Après le Covid, nous avions décidé de consacrer 60% de notre budget promotion à l’export. Mais dans la conjoncture actuelle, nous allons changer notre fusil d’épaule et mettre le paquet sur la France. La Vallée du Rhône, ce sont quand même 45 000 emplois, dont 19 000 directs et nous sommes la 2ème AOC de France derrière Bordeaux avec 2,2M hl en 2024 sur une superficie du vignoble de 63 307 ha. »

Philippe Pellaton poursuit : « Le volume est en forte baisse : -11% par rapport à 2023 (2,43Mhl) et -17% en moyenne sur les 5 dernières récoltes, la plus petite production depuis 40 ans ». Damien Gilles enfonce le clou : « Chaque année, elle recule, mais la qualité demeure, grâce à nos vignerons résilients qui s’adaptent au changement climatique comme aux habitudes des consommateurs. Le rouge reste en tête avec 75%, le rosé est 2ème avec 13% et le blanc progresse à 12%. La répartition en volume est composée à 45% d’AOC Côtes-du-Rhône, 12% de CDR-Village et 10% à parts égales pour les crus méridionaux de Vin doux naturel et de Ventoux. Trois appellations accusent une baisse importante : la Clairette de Die, les Costières de Nîmes et Grignan-les-Adhémar ». Il est aussi question de la part du bio qui progresse de 19% en 2023 à 22% l’an dernier et 60% des vignobles qui s’inscrivent dans une démarche environnementale. 

Samuel Montgermont, Philippe Pellaton et Damien Gilles. ©Andrée Brunetti / L’Echo du Mardi

Mais en dehors de ces sujets de satisfaction, le gros caillou dans la chaussure des vignerons de la Vallée du Rhône, en plus de la déconsommation, c’est l’exportation qui est suspendue à un fil du côté du 1er marché d’exportation des vins français, les USA qui représentent quand même 98M€ et 13% des volumes. Mais il n’est pas le seul. Le marché s’effondre aussi en Chine -36% (12M€), au Japon -23% (9M€), en Norvège (-6%) et au Danemark (-11%).  Heureusement dans le Top 5 on retrouve la Belgique, le Royaume-Uni, le Canada, l’Allemagne et la Suède. Les exportations représentent 106 millions de bouteilles pour une valeur de 509M€ avec des pays où nos vins sont de plus en plus appréciés, même si le volume est modeste. +15% en Australie (7500hl), +22% en Corée du Sud (5700hl), +64% au Brésil (2900hl).

En tout, les vignerons de l’AOC exportent vers une quinzaine de pays (36% de leur production) et en interne, en France, 38% des vins sont commercialisés en grandes surfaces et 26% dans les réseaux de cavistes et grossistes. « Sur 20M€ de budget, nous allons en consacrer la moitié à la promotion intèrieure avec des salons, un rapprochement avec les consommateurs, une communicqation plus marquée sur les 18 crus de l’appellation, une stratégie sur l’oeno-tourisme. Il nous faut absolument ‘innover pour rester’ donc survivre, insiste le président d’Inter Rhône. C’est à dire expérimenter de nouveaux cépages résistants à la canicule, aux maladies, avec un taux d’alcool moins élevé, des vins plus frais, plus légers, plus festifs, plus fruités pour attirer les jeunes générations. Apparemment les vins sans alcool n’ont pas le vent en poupe dans la Vallée du Rhône.

En attendant, l’épée de Damoclès des tarifs douaniers américains plane sur la tête de l’un des atouts majeurs de la Vallée du Rhône : la viticulture.


Maison Sinnae, le nouveau pôle œnotouristique de Laudun inauguré à l’occasion du centenaire de sa cave

Deux appellations emblématiques pour ces vignes sur le Piémont, les terrasses et les pentes des Dentelles de Montmirail, avec le cru qui a décroché l’AOC rouge en 2005 et le Muscat labellisé par l’INAO en 1945. En 2025, nombre de célébrations sont programmées pour cet anniversaire dans les quatre villages concernés, Beaumes-de-Venise évidemment, Suzette, La Roque-Alric et Lafare, où a été organisée la conférence de presse. « Ici, c’était l’école où j’allais quand j’étais petit, explique Jean-Paul Anrès, président de l’AOC. Puis c’est devenu la mairie du village et aujourd’hui il met en valeur tous nos vins avec le Conservatoire. »

« Ces villages qui s’échelonnent entre 100m et 722m d’altitude, nichés entre réserve de biosphère et de prairies, forment un corridor écologique unique où le respect et la protection de l’environnement sont une évidence depuis toujours et surtout le coeur et l’âme de nos vins », précise le président de l’AOC Beaumes-de-Venise.

Le président résume l’histoire de ce terroir escarpé qui date de quatre millénaires, avec les colons grecs qui ont planté les premiers pieds de muscat, une terre qui a été façonné par la vigne. Avec un mille-feuilles géologique, constitué de couleurs différentes. Des tranches superposées de trias rouge, de jurassique gris, de crétacé blanc et de miocène blond, toutes empilées les unes sur les autres. Et les Dentelles qui ont fait leur apparition il y a 5 millions d’années. « Tout cela constitue un sous-sol unique, avec des paysages à couper le souffle, entre oliviers, abricotiers, câpriers, impressionnantes lames grises et pierres sèches des restanques où l’amplitude de la température la nuit est de 6° entre le sud à Aubignan par exemple et le nord à Suzette et des vendanges qui sont décalées de 8 à 15 jours selon les parcelles. »

Les Dentelles de Montmirail. ©Andrée Brunetti / L’Echo du Mardi

Claude Chabran, le président de la section Producteurs de l’AOC Beaumes-de-Venise passe au crible tous les engagements des vignerons pour prendre soin de leur gagne-pain, la vigne. « Dès 1992, nous avons obtenu le label ‘Paysage de Reconquête’  en revitalisant et en préservant le terroir. En 1998, nous avons signé la ‘Charte Vivre’  qui permet de réduire l’érosion, de recharger les nappes phréatiques, de limiter les herbicides, d’utiliser des cépages résistants au réchauffement climatique et aux maladies, d’économiser la ressource en eau et de préserver les zones boisées, d’attire oiseaux et insectes avec des haies, des nichoirs pour les chauves-souris. »

Il poursuit : « En 2013, les Dentelles de Montmirail ont été labellisées première ‘Destination Vignobles & Découvertes’  qui récompense ce ‘Terroir aux Deux Visages’, AOC Rouge et AOC muscat, vignerons, hébergeurs, restaurateurs pour leur offre œnotouristique. » Et il insiste : « Nous ne devons pas nous couper du reste des habitants, de ceux qui ne sont pas vignerons, nous devons leur expliquer ce que nous faisons, garder une forme de cohésion. Nous le faisons en accueillant des touristes dans nos caves, en participant à des salons et avec nos sites sur internet. »

Et pour transmettre ce savoir-faire, cette mémoire, les jeunes vignerons sont là pour prendre la suite comme Gaétan Leydier du Domaine Durban qui a énuméré les festivités de cette années 2025. « La soirée de lancement est prévue le 25 avril à Beaumes au Parc de la mairie, puis le 24 mai à La Roque-Alric avec repas au four à bois, le 14 juin à Suzette avec soirée vigneronne et gospels, le 12 juillet à Lafare avec une guinguette, le 8 août  un banquet paysan à Beaumes et le lendemain sur place, bodéga du muscat pour conclure. »

Les organisateurs du centenaire. ©Andrée Brunetti / L’Echo du Mardi

Célébrer les 80 ans du Muscat (1945) et ses vignobles plantés en petits grains et les 20 ans du rouge (2005), c’est mettre en valeur le travail de générations de familles vigneronnes. En tout, 1000 hectares de vignes pour 1300 hectares boisés qui au fil du temps ont sculpté une mosaïque  de paysages inoubliables.

Engagés et éco-responsables, les vignerons vous attendent à partir du 25 avril pour le célébrer avec ferveur le centenaire de leurs deux appellations d’origine contrôlée, pour partager leur passion et pour déguster le fruit de leur travail avec avec tous.

-MUSCAT :
• Cépages muscat à petits grains en noir ou blanc
• Répartition par couleur : 93% blanc, 6% rosé, 1% rouge
• Surface  280-350 ha
• Production 5000 à 9000hl


Maison Sinnae, le nouveau pôle œnotouristique de Laudun inauguré à l’occasion du centenaire de sa cave

Claude Avril est en colère, exaspéré, furieux mais pas surpris concernant cette taxe américaine de 200% sur le champagne et le vin.

« Plutôt désabusé. La Commission Européenne a décidé seule, sans concertation alors qu’on ne lui a rien demandé. Elle a annoncé augmenter de 50% le Bourbon US importé chez nous et voilà ce qui arrive. Tout ça pour ça. Nous, les vignerons, nous sommes une simple variation d’ajustement alors qu’on n’y est pour rien. On fait les frais de cette véritable course à la surenchère », regrette le maire de Châteauneuf-du-Pape.

L’annonce de la Maison Blanche a provoqué un véritable séisme dans le monde vitivinicole français. « C’est d’une brutalité, d’une violence cette menace. De la folie pure, il délire », insiste Claude Avril. Quels que soient les mots utilisés par les vignerons : catastrophe, coup de massue, désastre, tsunami, couperet, déflagration… Le ciel leur tombe sur la tête. Il est vrai que les Etats-Unis sont le 1er client de la France pour le vin et le champagne. 2/3 de nos exportations vers les USA, soit 3,9Md€ rayés de la balance commerciale par un président éruptif. Pour les viticulteurs de Châteauneuf-du-Pape, cela représenterait environ 20% de leurs exportations globales.

Certes, l’économie et le commerce font partie des compétences de la Commission Européenne à Bruxelles, mais elle aurait dû se concerter,  discuter avec les syndicats du monde vinicole avant de prendre une décision dont les conséquences enveniment la situation. C’est ce que certains appellent « l’effet papillon. »


Maison Sinnae, le nouveau pôle œnotouristique de Laudun inauguré à l’occasion du centenaire de sa cave

C’est au Palais des Princes à Orange qu’elle s’est tenue, face à plus de 400 vignerons et professionnels du vin de Vaucluse. Une Fédération créée il y a près de 50 ans (en 1976) pour prendre en main leur avenir et valoriser leur travail.

Forte de ses 350 adhérents qui représentent 450 domaines vitivinicoles dans le département, 11 000 hectares de vignobles, 450 000 hectolitres les bonnes années de récolte, elle gère aussi le Palais du Vin, vitrine de 300 m² de l’excellence de ses producteurs à la sortie d’Orange-Sud.

Dans son mot d’accueil, le maire Yann Bompard, a une fois de plus, dénoncé « les charges, les normes et les taxes qui assassinent la filière. La consommation de vin baisse, votre pouvoir d’achat aussi, mais vous, contrairement, aux députés et sénateurs vous ne votez pas une auto-augmentation de vos revenus de 300€ à 700€ par mois. Qu’on nous lâche la grappe sur la fiscalité », conclut-il.

C’est ensuite Florence Corre, directrice des Salons et de la Communication, qui a pris la parole pour rappeler que la Confédération des Vignerons Indépendants participe à 13 salons par an, auxquels assistent environ 400 000 visiteurs. « En octobre 2025, va être lancé le 1er Salon de Hambourg avec 75 exposants. Tout cela a un coût pour les vignerons. En plus, dans les grandes villes, les panneaux d’affichage sont en net retrait, donc nous devons miser sur le digital à 100% pour nos messages d’authenticité. D’ailleurs nous avons fait campagne entre le 28 novembre dernier et le 31 décembre et 4 millions de personnes ont cliqué sur notre site internet, c’est ça, l’avenir pour notre marque. »

Tour à tour la députée RN Marie-France Lorho et le sénateur PS Lucien Stanzione sont montés sur scène. L’une pour rappeler son total soutien au monde paysan, « pour que l’agriculture et ses terres soient sanctuarisées. Pour que la France conforte une alimentation souveraine, et selon le slogan des manifestants de l’an dernier, pour que votre faim ne soit pas notre fin ». L’autre pour se féliciter que « le marathon parlementaire de dizaines et dizaines d’heures de débats ait finalement accouché d’une Loi d’Orientation Agricole avec 236 votes pour et 103 contre. » Même si aucune garantie de revenus pour les paysans ne figure dans ce texte. Autre soutien, celui du département de Vaucluse par la voix de Christian Mounier qui a rappelé que « dès samedi, le Stand de Vaucluse et ses 200 m² sera le plus grand des collectivités locales, Porte de Versailles, lors du Salon International de l’Agriculture. »

Le président Thierry Vaute a évoqué l’année chaotique qui vient de se dérouler. « Des manifestants en colère qui se sont battus pour prouver l’utilité de l’agriculture, la nécessité d’une souveraineté alimentaire et patatras ! Une dissolution-surprise en plein été qui fait perdre encore des mois de vacance du pouvoir. La perception de dégradation de nos conditions est passée de 7,1 / 10 à 6,5 / 10. 44% des vignerons ont des problèmes de trésorerie. Heureusement le remboursement des PGE (Prêts garantis par l’Etat) a été rallongé de 6 à 10 ans, c’est une bouée, plus un boulet. Après le Covid, les Gilets jaunes, la guerre en Ukraine, la baisse de consommation de l’alcool, nous nous sommes adaptés, nous avons fait preuve d’agilité pour survivre en segmentant nos gammes de vins. Finalement, les cours qui avaient chuté se sont raffermis et les stocks ont baissé. » Il a conclu en annonçant à l’auditoire que c’est une femme qui allait lui succéder à la présidence en 2026, Céline Barnier. Quant à lui, il gardera tous ses mandats nationaux.

Enfin, le préfet Thierry Suquet a évoqué toutes les difficultés que subit le monde vigneron, « structurelles, conjoncturelles, climatiques, sociales, économiques. » Il a aussi listé les aides de l’Etat : « 7M€ d’aides d’urgence pour 708 exploitants en difficulté dans le département. Des primes d’arrachage – 4000€ / hectares – pour 1017 hectares en tout en Vaucluse, une indemnisation après le gel d’avril  2024 pour 73 communes. Un guichet pour les PGE est ouvert jusqu’au 1er juillet. » Il a évoqué le SIAL qui s’ouvre samedi à Paris « C’est une fierté française, notre agriculture, malgré la pénurie en eau, la concurrence, les épizooties qui ont un impact sur le moral des paysans. » Il a rappelé que dans le Vaucluse, 50M€ vont être alloués à l’irrigation et il se félicite que la nouvelle Loi d’Orientation Agricole votée il y a quelques heures fasse avancer les choses même si elle ne règle pas tout.

En amont, Pierre Saysset, le directeur de la Fédération des Vignerons Indépendants de Vaucluse avait dressé le bilan de l’année devant les adhérents. « Au caveau du Palais des Vins, notre chiffre d’affaires a grimpé de +10% même si le volume a reculé de 21%. Nous avons quand même vendu 21 millions de capsules en 2024 et nous en avons 10 million en stock dans notre nouveau siège d’Orange Sud. » Il a aussi évoqué la force de frappe des Vignerons Indépendants. « Nous sommes 7 000 en France. Chaque vigneron a forcément, pour travailler, son fourgon, son camion qu’il change tous les 10 ans. Vous imaginez bien que les concessionnaires automobiles nous écoutent avec attention, quand on va les voir. »

Thierry Suquet (préfet de Vaucluse), Céline Barnier (future présidente des Vignerons Indépendants de la Vallée du Rhône), Thierry Vaute (actuel président des Vignerons Indépendants de la Vallée du Rhône), et Pierre Saysset (directeur des Vignerons Indépendants de la Vallée du Rhône). ©Andrée Brunetti / L’Echo du Mardi

En 2026, ce sera donc Céline Barnier qui présidera à la destinée des Vignerons Indépendants de Vaucluse. Thierry Vaute, qui passe en moyenne 90 jours par an en déplacement pour les salons, les réunions de travail, les négociations, les relations avec le Ministère de l’Agriculture à Paris et avec les députés et sénateurs locaux, va pouvoir s’occuper à temps plein de ses vignes de La Pigeade à Beaumes-de-Venise, entre femme et enfants, avec le sentiment d’une mission accomplie, dans l’intérêt général donc au service de tous.

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