5 mai 2024 |

Ecrit par le 5 mai 2024

(Vidéo) Zéro artificialisation nette, Le Sénat protège les collectivités

Voilà, c’est fait, la mise en œuvre du Zéro artificialisation nette (Zan) a été adoptée le 16 mars dernier au Sénat. Même si le dispositif l’avait été, deux ans auparavant, dans le cadre de la Loi Climat, le Sénateur vauclusien LR Jean-Baptiste Blanc en a soulevé les difficultés pratiques et demandé d’améliorer le texte avant que celui-ci ne passe à l’Assemblée Nationale.

La proposition ? Soumettre une application plus souple et décentralisée du Zan sans remettre en question l’objectif de sobriété foncière. Et l’avocat, devenu incollable sur le sujet, ne manquait pas d’arguments après avoir recueilli, sur le terrain, plus de 60 avis un peu crispés d’élus de l’hexagone.

Et plus encore
Mais surtout Jean-Baptiste Blanc, rapporteur du dispositif Zan, avec certains de ses homologues, a obtenu de garantir à chaque commune une surface minimale de développement d’un hectare ; la sortie des jardins, parcs et pelouses résidentiels du texte sénatorial, et d’inclure, dans une enveloppe séparée, les grands projets nationaux tels que les prisons, les ports, les centrales nucléaires… Face à ces avancées notables, qui apaisent les maires, le sénateur l’assure, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, est ouvert au dialogue sur les modalités techniques mais restera ferme sur les grands principes du Zéro artificialisation nette, histoire de ne pas dénaturer l’esprit de la Loi.

Quelles conséquences ?
Concrètement, le Zan contraint voire bloque, la capacité à construire du logement déjà mise à mal par l’inflation ce qui induira une forte pression sociale sur l’habitat -en passe de se raréfier- et déjà existant ou à rénover pour cause de diagnostic énergétique. Le dispositif immobilise également le logement social déjà très impacté par la hausse des coûts des matériaux de construction, la baisse du pouvoir d’achat des populations déjà fragiles -ce qui impacte le règlement des loyers- et l’amenuisement programmé des aides de l’Etat.

En attendant
Le texte doit prochainement être soumis à l’Assemblée Nationale. Dans le même temps, le sénateur prône un accompagnement des élus locaux sur la sobriété foncière avec de nouvelles méthodes d’aménagement, et l’arsenal déjà connu des collectivités comme la densification ‘des dents creuses’, l’accélération du renouvellement urbain et la requalification d’îlots dégradés.

Quel avenir pour l’habitat ?
Désormais le Zan exclut le pavillon avec jardin et préconise l’élévation de la construction, la renaturation de la ville avec des plantations d’arbres, une préservation des milieux humides, l’aménagement de retenues d’eau, l’organisation de jardins collectifs et de micro-fermes urbaines.

Dans le détail
Le Zéro Artificialisation Nette (ZAN) est un objectif fixé pour 2050. Il demande aux territoires, communes, départements, régions de réduire de 50 % le rythme d’artificialisation et de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici 2030 par rapport à la consommation mesurée entre 2011 et 2020. Propos qui ont fait hurler les élus des communes rurales par rapport aux grandes agglos déjà très consommatrices d’espaces. Car à bien y réfléchir les communes peu consommatrices d’espaces devenaient les mauvais élèves, tandis que des communes ultra dispendieuses en foncier se faisaient à peine taper sur les doigts et même étaient encouragées à continuer de construire. Quelle logique y avait-il à tout cela ?


Mais au fait, pourquoi avoir créé le Zéro artificialisation nette ?

Le dispositif a été mis en place pour stopper une artificialisation des sols galopante, en France, cause entre autres, de la baisse de la biodiversité, du grignotage accéléré des espaces agricoles, naturels et forestiers, d’un mouvement ennemi de décarbonation puisque les sols sont des réservoirs de carbone naturels. Enfin, l’artificialisation a été identifiée comme vecteur d’inondation, empêchant l’infiltration des eaux pluviales dans le sol, le retour de l’eau dans les nappes phréatiques et favorisant la progression annuelle des jours de canicule en ville, avec plus de 28 jours, en juillet, à Avignon.

Sénatoriale intervention
Les aménagements portés au Zan, suite aux remontées de terrain du sénateur Jean-Baptiste Blanc, devraient permettre une meilleure compréhension à la fois du Gouvernement et des élus à s’engager dans ce processus, inévitable si l’ont veut protéger la nature, concourir à vivre mieux en ville et cesser de nourrir un réchauffement climatique plus prégnant chaque année.


(Vidéo) Zéro artificialisation nette, Le Sénat protège les collectivités

L’Ordre des architectes Paca, organise 4 fois l’an, une table ronde. La dernière avait pour objet : ‘Quel avenir pour les espaces péri-urbains ? Une centaine d’architectes, décideurs publics et acteurs de l’aménagement des territoires d’Avignon et du Vaucluse, ont nourri réflexion et débat sur le potentiel et l’évolution des espaces situés en bord de ville dans la salle de l’anti-chambre à la mairie.

Que s’est-il dit ?
Désormais le foncier ne pourra plus être consommé comme il l’a été et les sols à nouveau artificialisés. Si la loi Climat et résilience et son dispositif, Zan (Zéro artificialisation nette), prévoit cela à l’horizon 2050, le coup d’arrêt de la construction est déjà en place et avec lui le repérage du recyclage du foncier possiblement disponible comme les parkings de stationnements des zones commerciales, les zones d’activités et même… le pavillonnaire.

La solution ?
Densifier –en cohérence et harmonieusement- la ville sur elle-même tout en y apportant des ilots de fraicheur et, également, faire revenir la nature en ville et dans les zones déjà urbanisées. Pourquoi ? Parce qu’Avignon compte, depuis plusieurs années, 51 jours de canicule par an. Alors collectivités territoriales, architectes, et Etablissement public foncier sont à pied d’œuvre pour trouver des solutions et construire, avec de nouvelles règles, les 4 futurs quartiers d’Avignon : Confluence, Joly-Jean, Bel-Air et le quartier gare de Montfavet. Cela veut aussi dire que la ville de 2050 est, à 90%, celle que nous connaissons déjà aujourd’hui.

Le point d’achoppement ?
La loi Climat et résilience n’indique aucun outil de financement ni de fiscalité qui sont les éléments les plus importants pour mettre en œuvre, concrètement, cette nouvelle forme d’urbanisation. Cette nouvelle philosophie : penser la ville tout en préservant la biodiversité connait un autre pendant : faire que les villes méditerranéennes ne soient plus des fournaises lors des temps estivaux ce qui pourrait faire fuir durablement ses habitants et donc réduire son attractivité. Bref, dès maintenant, il s’agit de faire avec ce qui a déjà été construit et organisé, même en le déconstruisant ou en le recyclant.

Quel impact sur le prix du foncier ?
Il y a fort à parier que le prix du foncier dans les zones d’activités, commerciales, les grandes parcelles se mette à grimper, échappant à la puissance publique qui n’aura peut-être pas les moyens de ses ambitions avec, en face d’elle, des propriétaires avides de bonnes affaires, histoire d’empocher un juteux retour sur investissement, même si celui-ci n’a fait que dormir durant plusieurs décennies. C’est là que l’Etablissement public foncier devrait intervenir au moyen de prix normés fixés par la loi, pour éviter une montée incontrôlable des prix. Objet qui pourrait d’ailleurs avoir une forte incidence sur le prix de l’immobilier.

Cécile Helle, maire d’Avignon est intervenue sur Questionner le péri-urbain jeudi 17 novembre, à la mairie

Cécile Helle, maire d’Avignon
«Le dialogue puis l’intervention des architectes et urbanistes sur les grands projets de réhabilitation ou de construction, via les appels à projets, font avancer la ville et nourrissent une véritable vision de celle-ci, de l’esquisse à la réalisation des projets.»

L’objectif ?
«Améliorer la qualité de vie des habitants et ramener du beau dans la ville. Pour cela, Avignon est un terrain de jeu assez fantastique que ce soit pour son centre historique ou un peu plus loin avec la réhabilitation du stade nautique, l’un des bâtiments phares, voire totem de la Ville avec son architecture moderne du 20e siècle. Les élus sont là pour révéler le patrimoine auquel on ne fait plus forcément attention, où, au fil du temps, la beauté s’est peut-être un peu estompée. Il n’y a pas de grand –Palais des papes- et de petit patrimoine –stade nautique-, tous ont leurs places et leur importance.»

Inventer la ville de demain
«Nous en sommes à inventer la ville de demain avec de nouveaux quartiers en tenant compte des incidents climatiques et de ses incidences. L’accompagnement des architectes, urbanistes et paysagistes permet une transdisciplinarité qui accompagne les élus dans leur invention et décisions de la ville du futur, sur un chemin plus vertueux, notamment dans le contexte actuel. Que cela concerne un équipement sportif, culturel ou scolaire, les architectes savent réinventer l’usage qui impactera la vie quotidienne du citoyen. Tout l’enjeu est dans la réutilisation des lieux produits.»

Le périurbain
«Vous allez évoquer le péri-urbain dans le contexte d’une ville bâtie sur le tout automobile, modèle issus des villes américaines alors que notre identité est plutôt européenne. A-t-on oublié de réfléchir parce que nous étions dans une période de développement des trente glorieuses ? Nous sommes dans une période de crise forte qui ébranle nos modes de développement et de penser la ville. C’est par ce genre d’approche collective que l’on arrivera à inventer la ville de demain, une ville vertueuse d’un point de vue des enjeux climatiques qui s’imposent à nous tous.»  

Dresser un constat
«Aujourd’hui nous avons besoin de dresser un constat, expose Michel Escande, architecte, pour faire face à la  Loi Climat résilience, promulguée en août 2021- qui sous une génération, 28 ans, ne permettra plus l’artificialisation des sols. Cela nécessite de tous nous accompagner mutuellement : personnalités politiques, techniciens, argentiers, promoteurs, opérateurs, urbanistes, paysagistes et architectes.»

Paul-Roger Gontard, adjoint au maire délégué au développement territorial et urbain ainsi qu’aux grands projets

Paul-Roger Gontard
«La loi Climat et résilience est à la fois un défi et une opportunité. Nous étions déjà dans une volonté de stopper la consommation de foncier agricole comme à la ceinture verte, aux foins de Montfavet et à la Barthelasse où nous voulons conserver une agriculture de proximité et bénéficier d’une production agricole de qualité immédiatement disponible. L’opportunité ? Que cette loi évite désormais l’étalement urbain des villages en bourgs, des bourgs en petites villes ce qu’est devenue l’agglomération d’Avignon. Cela a créé des villages parfois essentiellement résidentiels et a concentré, à Avignon, une bonne partie de la prise en charge –également financière- de la centralité des équipements publics.»

Mixité fonctionnelle et nouveaux équilibres
«Or, la loi nous demande d’aller vers de mixité fonctionnelle et la création de nouveaux équilibres dans les territoires. Qu’est-ce que cela implique ? D’épaissir un peu le tissu urbain entre Rhône et Durance, à condition que cela soit soutenable à l’échelle de notre géographie et, sans doute, en n’allant pas au-delà de 100 à 120 000 habitants dans les 28 ans à venir.»  

Le cadre du nouveau PLU au début de l’année prochaine
«Tout cela est décrit dans le nouveau Plan local d’urbanisme (PLU), notamment en fléchant l’accueil des nouveaux habitants, ceux qui fuient la métropole dans cette ère post-Covid, dont certains ont vécu jeunes ici et recherchent à reprendre contact avec leur famille, avec une qualité de vie qu’ils connaissaient et qu’ils n’ont pas retrouvé ailleurs. Et puis le télétravail met en place de nouvelles mobilités permettant de vivre, à la fois, un peu ici et un peu ailleurs, dans un habitat qui reste à réinventer. Ce à quoi nous pensons ? A un habitat pensé en ilot, quartier, ville dans sa totalité. Quatre nouveaux quartiers verront le jour : Confluence, Joly-Jean, Bel-Air et le quartier gare de Montfavet,» conclut Paul-Roger Gontard.

Michel Escande, architecte à Avignon, conseiller de l’ordre des architectes Paca

Qu’en est-il du commerce ?
«Qu’en est-il du commerce, interroge Michel Escande architecte avignonnais. On voit que le commerce, dans certains cas, disparaît, ou mute, ou se transforme empruntant les chemins de l’e-commerce. Les grandes surfaces posent question, ainsi que certaines zones d’activités comme Fontcouverte où certaines parcelles se dépeuplent. Des mutations peuvent-elles avoir lieu sur ce type de zone, comme le démontraient les villes anciennes ?

Anticiper
«Ce sera la condition de la réussite, répond Paul-Roger Gontard, car les gisements de demain sont déjà urbanisés. Le post-Covid a transformé les usages de consommation et ont vidé une partie des zones commerciales situées à la lisière d’habitations. Ces espaces pourront être réinvestis et dévolus à de nouveaux usages et destinations. Nous parlons de recyclage urbain, de déconstructions et reconstructions. Il faudra nous en emparer car nous pourrions vivre une inflation de la valeur foncière de ces territoires qui échappera potentiellement à la puissance publique et qui pourrait nous mettre en danger dans nos besoins de mutation de la ville. Cette réflexion sera à mener avec l’Etablissement public foncier de Paca et d’autres acteurs.»

Renaturation de la ville
«Ces espaces pourraient être des enjeux de naturalisation de la ville, relève Cécile Helle, car la vulnérabilité des villes méditerranéennes au changement climatique sera de plus en plus forte dans les années qui viennent par rapport à d’autres villes, notamment en période estivale et en terme de qualité d’habiter et de vivre. Autrefois, on évoquait Avignon comme la ville à la campagne, nous pourrions revendiquer à nouveau cela et faire que les centres commerciaux XXL, avec leurs nappes de parking, redonnent à la périphérie d’Avignon ce qu’ils lui auront pris au fil des décennies, avec l’introduction de grands parcs.»

Gilles Périlhou, directeur de l’Aurav

On ne touche plus au foncier
«Nous nous questionnons sur les modalités d’application du dispositif Zan (Zéro artificialisation nette) expose Gilles Périlhou, directeur de l’Aurav. L’enveloppe urbaine existante : zones d’activité, zones commerciales, infrastructures celles que nous connaissons seront celles qui existeront en 2050. En clair ? On change de modèle pour cesser l’expansionnisme. Il nous faut négocier avec le périurbain qui s’est développé pendant des décennies pour expliquer que les modalités vont changer.»

Pour le moment ?
«Nous manquons d’outils : financiers et surtout fiscaux parce que nous n’avons pas de modèle économique à ce recyclage ou urbanisme circulaire, qu’il faudra désormais systématiquement mettre en œuvre à plusieurs échelles, de la plus grande jusqu’à celles des quartiers, voire du bâtiment. Actuellement nous identifions les lieux de demain. Nous travaillons avec EPF sur Courtine, sur de grands projets en face de la gare TGV. Le gouvernement pourrait également ajouter un nouveau volet à la loi afin que les Scot (Schéma de cohérence territoriale) indiquent les espaces de recyclages prioritaires. Les parkings de stationnement des zones commerciales, le pavillonnaire pourraient être des sujets sur lesquels se pencher.»

Emilie Feral, vice-présidente de la fédération du BTP 84

Filières courtes & gisements de matériaux
«Nous identifions actuellement ce que nous pouvons apporter en ré-emploi et en recyclage de matériaux, relate Emilie Feral, vice-présidente de la fédération du bâtiment et des travaux publics de Vaucluse. Cette nouvelle filière part d’un diagnostic : le PEMD (Produits, équipement, matériaux, déchets) qui nous permet de savoir ce qui peut être réemployé ou recyclé et ainsi d’éviter, le plus possible, l’enfouissement. La déconstruction réclame de trier, de stoker pour le ré-emploi des matières et a un coût. Cette nouvelle filière doit aussi être économiquement intéressante pour avoir une raison d’être, elle est, actuellement, en pleine organisation.»

René Braja, président de la fédération régionale des travaux publics de Paca

Des éco-plateformes de ré-emploi des matériaux
«Dans les travaux publics nous avions un objectif de 75% de récupération des matériaux pour 2030, aujourd’hui nous sommes déjà à 79%, »précise René Braja, président de la Fédération régionale des Travaux publics de Paca.

Une centaine de personnes était présente : architectes, décideurs publics et acteurs de l’aménagement des territoires en Vaucluse.

Ils y étaient
Cécile Helle Maire d’Avignon ; Paul-Roger Gontard Adjoint au maire délégué au développement territorial et urbain et aux grand projets, Ville d’Avignon ;  Mylène Duquenoy, secrétaire générale adjointe du Conseil régional de l’ordre des architectes, Raphaël Azalbert, architecte, conseiller de l’ordre des architectes pour le Vaucluse, Gilles Périlhou de l’Aurav (Agence d’urbanisme Rhône, Avignon, Vaucluse) Matthieu Lardière Directeur du CAUE (Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement) de Vaucluse ; Daniel Léonard Président de la Fédération du Bâtiment et des Travaux Publics du Vaucluse ; Émilie Feral Vice-présidente de la Fédération du Bâtiment et des Travaux Publics du Vaucluse et René Braja Président de la Fédération Régionale des Travaux Publics de Provence-Alpes-Côte d’Azur ; Philippe Huet Président de Volubilis ; Nerte Dautier Membre du bureau de Volubilis ainsi que des conseillers et salariés de l’Ordre des Architectes Paca.


(Vidéo) Zéro artificialisation nette, Le Sénat protège les collectivités

L’atteinte de l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN) rend plus urgente, une refonte de la fiscalité locale, notamment foncière. Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), à la demande de la commission des finances du Sénat, s’est livré à une étude sur le sujet qui a été présentée ce 26 octobre. De premières mesures pourraient être prises sans tarder, tandis que d’autres appellent des évolutions structurelles sur un plus long terme. 

« Le chemin qui reste à parcourir pour mettre en cohérence la fiscalité locale et l’objectif ZAN [zéro artificialisation nette] est encore long », reconnaît Patrick Lefas vice-président le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), d’autant que le terrain quasi-vierge et mal documenté. Les conclusions de l’étude menée par l’antenne de la Cour des comptes à la demande de la commission des finances du Sénat pour faire suite au rapport de contrôle budgétaire de Jean-Baptiste Blanc sur les outils financiers de l’objectif ZAN (remise à plat de la fiscalité locale) devraient permettre de nourrir des amendements sur cette problématique. La saisine du CPO portait sur deux questions : l’objectif du ZAN va-t-il modifier les recettes fiscales des collectivités territoriales et des groupements ? La fiscalité locale peut-elle envoyer un signal-prix aux acteurs économiques pour faciliter l’atteinte de l’objectif ZAN ?

Un travail de longue haleine
« Certaines pistes peuvent recevoir une mise en œuvre immédiate, notamment à partir de taxes existantes encore peu mobilisées par les élus locaux. D’autres appellent en revanche des évolutions à plus long terme et nécessitent un changement de paradigme et des travaux complémentaires a exposé Jean-Baptiste Blanc,

La contribution du CPO vient compléter le récent rapport remis par la Cour des comptes sur les scénarios de financement des collectivités territoriales (Evolution du financement des collectivités territoriales), dont il reprend d’ailleurs certaines propositions. La question de la différenciation y est abordée « en essayant d’avoir une palette d’outils la plus ouverte laissée à la disponibilité des élus et exécutifs locaux », indique Claire Falzone, conseillère référendaire, qui fait partie du trio de rapporteur du CPO. Celui-ci s’est pour l’instant concentré sur un périmètre qui représentait en 2021 un total de 65,4 milliards d’euros, soit un peu plus du tiers des impôts et taxes perçus par les collectivités. 

Patrick Lefas vice-président le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO)

Pas de signaux positifs ou négatifs de la fiscalité locale sur l’artificialisation
De l’expertise de l’Inra (Institut national de la recherche agronomique) et de l’IFSTTAR (Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux) conduite en 2017 sur le processus d’artificialisation, et des échanges sur le terrain, l’étude tire un premier constat : la fiscalité locale n’est qu’un déterminant « marginal » et n’envoie pas particulièrement de signaux en la matière. « Le poids économique de la fiscalité locale qui représente 5% des charges dans une opération immobilière ne peut avoir pour effet d’influencer de manière significative les décisions d’artificialisation », explique Patrick Lefas. A l’inverse, elle ne comporte pas davantage d’incitation en faveur de la renaturation ou de la conservation en l’état d’une parcelle non artificialisée. Le CPO ouvre toutefois une fenêtre de tir, convaincu qu’à court terme, « des dispositifs fiscaux ciblés peuvent favoriser la mise en œuvre du ZAN ».

Supprimer le critère du nombre d’habitants
Pour envoyer un signal-prix, il recommande de supprimer le critère du nombre d’habitants (ville de plus de 50 000 habitants) pour la taxe sur les logements vacants et la majoration de taxe d’habitation sur les résidences secondaires, tout en conservant le critère de tension sur le marché immobilier. Et propose également de fusionner les deux taxes sur les logements vacants en une taxe unique transformée en impôt local. Sur le recyclage urbain, les outils fiscaux existants apparaissent aujourd’hui peu sollicités et souvent moins incitatifs que les instruments budgétaires.

Une boîte à outils optionnelle
En termes de méthode le CPO privilégie donc « une boite à outils optionnelle » laissée à la main des exécutifs locaux et évaluée périodiquement. Pour cela, il est proposé d’inscrire à l’ordre du jour des assemblées municipales et communautaires, dans le cadre du rapport triennal sur l’artificialisation des sols, un débat portant sur le recours aux instruments fiscaux d’urbanisme concourant à l’objectif ZAN. Une autre recommandation porte sur les exonérations et abattements appliqués à la fiscalité locale, qui devraient être réservés aux opérations sur zones déjà artificialisées, en particulier les opérations de recyclage urbain.  

Accompagner la redistribution des recettes foncières 
Les rentes engendrées par un foncier plus rare devront être mutualisées, souligne le CPO, qui préconise sur le moyen terme, d’augmenter le taux de la taxe locale sur les plus-values de cessions de terrains nus rendus constructibles et d’envisager la suppression de la clause « des 18 ans » au-delà de laquelle ces plus-values sont aujourd’hui exonérées. On peut en effet s’attendre à ce que les impacts du ZAN au niveau local soient « très contrastés » entre les collectivités, relève-t-il.

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La valeur marchande d’un terrain
La territorialisation des droits à artificialiser redistribuera entre collectivités la dynamique des recettes fiscales, et bousculera aussi les dotations de l’Etat, la DGF (dotation globale de fonctionnement) corrélée au développement des communes au premier chef. L’étude attire donc l’attention sur la nécessité d’intégrer les effets du ZAN dans les mécanismes de solidarité et de péréquation horizontaux et verticaux. La dotation budgétaire de soutien aux communes « pour la protection de la biodiversité et la valorisation des aménités rurales » créée en 2019 est citée en exemple. Il y a bien là une faille : « la valeur marchande d’un terrain non artificialisé ne reflète pas sa contribution systémique ».

Refonte des systèmes de financement des collectivités
Dans le même esprit, le CPO recommande d’articuler l’objectif ZAN avec les réflexions en cours sur la refonte des systèmes de financement des collectivités. Ainsi dans le sillage des travaux de la Cour des comptes, il envisage l’affectation des DMTO (droits de mutation à titre onéreux) au bloc communal et d’étudier la pertinence de taux variables de DMTO en fonction du caractère artificialisant des opérations immobilières. Les effets du ZAN doivent a minima être intégrés dans les projections réalisées pour la refonte des valeurs locatives cadastrales pour prévoir « des mesures de correction ou de compensation si les résultats vont dans un sens contraire à cet objectif », soutient également Patrick Lefas. 

Affiner la connaissance des impacts financiers du ZAN
Le CPO insiste sur ce travail de chiffrage qui devra être réalisé par les administrations compétentes, également pour identifier les pistes de financement envisageables. Pour l’heure, on dispose d’un aperçu partiel sur le seul périmètre de l’évaluation du coût de réhabilitation des friches conduite par le cabinet Carbone 4 à la demande de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP), avec une fourchette large comprise entre 77 et 106 milliards d’euros. « En l’absence d’un tel chiffrage, toute réflexion sur une éventuelle taxe ZAN serait très prématurée », relève Patrick Lefas. En revanche, il pourrait être utile d’étendre à l’ensemble du territoire la couverture géographique des établissements fonciers (sont concernées Bourgogne-Franche-Conté et Centre-Val de Loire) et de la taxe spéciale d’équipement qui leur est affectée. Il est donc possible d’utiliser davantage la fiscalité locale pour encourager les comportements favorables au ZAN, appuie pour conclure le CPO, « mais il faut s’assurer de l’efficacité et de l’acceptabilité de ce levier ».

La taxe d’aménagement
La taxe d’aménagement présente des caractéristiques intéressantes qui pourraient en faire un instrument adapté à cet objectif, comme le montrent plusieurs modifications récentes à travers le zonage de taux. C’est pourquoi le rapport recommande d’étudier la pertinence d’un système de bonus-malus dans le calcul de la taxe d’aménagement pour favoriser les opérations de dépollution ou de réaménagement et taxer davantage les opérations artificialisantes. Ce type de mécanisme pourrait faire des petits et s’étendre à d’autres taxes locales, qu’il s’agisse des impôts de stock (taxes foncières) ou de flux (DMTO).
Source Banque des territoires 
MH


(Vidéo) Zéro artificialisation nette, Le Sénat protège les collectivités

Les Assises du foncier économique en Vaucluse, Comment rester attractif à l’ère de la sobriété foncière’ viennent de se tenir à l’Amphithéâtre de CCI de Vaucluse à Avignon. Les 144 places devraient se remplir rapidement tant le sujet est primordial : la loi Climat et résilience dont découle l’objectif Zan, Zéro artificialisation nette révolutionne déjà le pays. Le problème ? Ca ne se sait pas encore. Pourtant, au chapitre de l’urbanisme et de la vie de tous les jours il s’agit bien d’un tsunami.

L’objectif Zéro Artificialisation Nette constitue une vraie révolution mais qui le sait ?
L’affaire est sérieuse et pourtant elle ne date pas d’aujourd’hui car la loi Climat et résilience est sortie le 22 août 2021 devenant agissante depuis lors, même si les décrets d’application ne sont pas encore sortis. Trois structures se sont emparé du sujet pour faire œuvre de pédagogie auprès des élus et techniciens de l’urbanisme tellement cette révolution pèsera sur les communes, communautés de communes, agglos impactant de plein fouet… les chefs d’entreprise et les habitants, même si ces derniers ne savent absolument pas de quoi il s’agit.

Lire également : “La loi ‘zéro artificialisation nette’ annonce la fin du rêve français“

Aux manettes ?
La Chambre de commerce et d’industrie de Vaucluse, l’Aurav (Agence d’urbanisme Rhône-Avignon-Provence) et Vaucluse Provence Attractivité. Le sujet : Comment rester attractif à l’heure de la sobriété foncière ? La manifestation ? Les Assises du foncier économique en Vaucluse qui n’avaient pas eu lieu depuis… 2013 ! Le principal sujet ? La Loi Climat et résilience qui fixe un objectif de Zéro artificialisation nette d’ici 2050.

Dans les faits ?
Désormais les communes, départements, régions doivent réduire de 50 % le rythme d’artificialisation et de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici 2030 par rapport à la consommation mesurée entre 2011 et 2020. Dans un même temps, le Gouvernement appuie l’importance de la ré-industrialisation des territoires, le développement économique, la décarbonation des activités productives et la redynamisation des centres villes.

Comment, en Vaucluse sera appliquée la Loi Climat et résilience sur le foncier économique ?
L’objectif Zan (Zéro artificialisation nette) constitue un véritable enjeu puisqu’il s’agira de faire plus de développement économique avec moins de foncier à disposition.

Christian Gros, Pierre Gonzalvez, Gilbert Marcelli

Ils ont dit
Gilbert Marcelli, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie

«Les Assises n’ont pas eu lieu depuis 2013 et je voulais que l’on se réunisse –CCI, Aurav, Vaucluse Provence attractivité, puis bientôt le Grand Avignon pour recréer une unité dans notre département et travailler ensemble au développement de l’économie. Nous pourrions prochainement créer les Assises économiques du Vaucluse avec l’intervention des maires, des présidents de Scot (Schéma de cohérence territoriale), les forces vives du territoire, dont les industriels pour imaginer le territoire de demain, questionner et trouver une façon intelligente de se déplacer. Nous avons tous des idées, maintenant il faut les appliquer, transmettons des axes solides aux générations futures.»
La conclusion
«La Cci représente 39 000 ressortissants. Je retiens l’idée d’un interScot évoquée par Fabrice Liberato, car il n’y a qu’en travaillant ensemble que nous pourrons y arriver. Derrière le développement du foncier il y  a aussi un problème de coût. Nos responsabilités ? Préserver le foncier pour notre développement économique à un prix raisonnable. Et cela ne se fera que si nous travaillons en concertation.»

Pierre Gonzalvez, président de Vaucluse-Provence-Attractivité
«Nous n’avons pas assez mesuré la portée de cette loi (Climat et résilience). Nous avons été alertés par les élus qui siègent dans les Scot expliquant que celle-ci aurait des effets incroyables sur nos territoires. La surprise ? A quel point le monde économique méconnait cette loi. Ces assises du foncier sont donc là pour mettre tout le monde au même niveau d’information. Alors que les élus travaillaient à la création de zones d’activité, à la commercialisation de l’eau, ils doivent maintenant faire face à la raréfaction du foncier, arbitrer et développer une stratégie de développement économique alors qu’ils ont en face d’eux des chefs d’entreprise qui évoquent développement, extension et achat de foncier.»
La conclusion
«La vérité qu’il faut quand même exprimer ? On parle de la Loi résilience dans le cadre du développement économique. Cette loi s’applique dans tous les domaines. Le développement économique est porté par les intercommunalités cependant que les règles d’urbanisme sont restées dans le cadre communal. Dans le cadre communal il y a bien des choses à gérer en partie ou dans les tiroirs. Il y a de l’aménagement, de la construction, des équipements publics, des injonctions –pour certaines communes carencées- à construire des logements sociaux, tout cela s’ajoute au projet de développement économique porté par les intercommunalités. Lorsque l’on fait le total de tout cela, on arrive à des sommes d’hectares nécessaires nettement supérieures aux 50% de ce qui a été consommé dans les 10 ans de référence. Nous devons faire face à un véritable casse-tête pour nos territoires et nous ne savons même pas comment répartir ce restant à urbaniser entre les différents sujets évoqués. Il ne faut pas croire qu’il y ait une sanctuarisation de 50% pour l’économie de ce qui a été consommé dans les 10 ans précédents car ça peut être beaucoup moins. Ça va être particulièrement compliqué. La problématique ? Les propriétaires de foncier sont assis sur des mines d’or et toutes les négociations engagées dans les mois à venir –dès lors que le sujet Zan sera connu- seront impossibles. Ceux qui possèdent des bâtiments et des friches dans les zones d’activité, possèdent des lingots d’or. Je pense qu’il sera désormais très compliqué de créer de nouvelles zones d’activité et cela créera des tensions comme la façon de définir quelle entreprise est éligible ou pas.»

Zan, un casse-tête chinois pour les élus

Christian Gros
«L’enjeu de la sobriété foncière appelle à ce que nous nous réunissions car nous ne pouvons plus rien faire seuls. L’objectif Zan (zéro artificialisation nette) c’est ‘Z’en veut mais y’en a plus !’ Aujourd’hui nous traiterons commet faire quand ‘Z’en veut plus, mais qu’il n’y en n’a plus’.»
Partage d’expérience et conclusion
«Je pratique la maîtrise et le développement du foncier depuis plus de 30 ans. Mon partage d’expérience ? Au départ, Monteux –dont je suis le maire- est une ville pauvre habitée par des gens pauvres. J’ai été élu en 1989 (33 ans) sur une politique de mutation économique et de réhabilitation du centre-ville. Comment s’y prendre ? En créant de la richesse ce qui veut dire faire du développement économique. Notre atout ? La position géographique. Ma stratégie a commencé par la maîtrise foncière. Ça a été d’identifier les terrains et zones les plus stratégiques, de planifier le développement et, enfin, d’acquérir sans attendre d’en avoir vraiment l’utilité car si l’on attend le dernier moment l’on ne peut plus acheter. Un exemple ? Beaulieu, la zone à vocation touristique s’étend sur 108 hectares. Les 3 derniers achetés ont coûté plus chers que les 105 premiers. Je recommande d’adosser à la stratégie foncière une stratégie financière, soit via les budgets annexes, soit en externalisant le portage du foncier notamment via l’EPF (Etablissement public foncier), dont je suis client et grand consommateur.  La construction de foncier exploitable est longue. Il est donc important d’anticiper et de s’engager dans le temps long. Or, aujourd’hui, l’horloge s’accélère dans la perspective du Zan. Il ne s’agit plus de maîtriser le foncier de son territoire mais plutôt de s’assurer une capacité de développement à court, moyen et long termes. Quelle que soit la forme aboutie du Zan, il nous oblige à revisiter nos stratégies, à dialoguer, à nous organiser, à nous réinventer collectivement. Nous passons d’un urbanisme qualifié localement à un urbanisme partagé avec d’autres. Il nous faut nous concerter sur une planification stratégique et opérationnelle pour optimiser la rare ressource foncière.» 

Gilles Périlhou

Les enjeux de la sobriété foncière
«Nous devrons répondre à trois questions, entame Gilles Périlhou : Comment faire du développement économique à l’ère de la sobriété foncière ? Comment préserver notre capital agricole et naturel, tout en répondant aux besoins des entreprises, aux transitions écologiques et d’adaptation climatique ? Et comment garantir l’équité entre les territoires, dans le cadre de la sobriété foncière ?

Réponse ?
«C’est de réussir le ‘En même temps’ : la sobriété foncière et le développement économique. Ce qui sera complexe et confus sera la manière d’y parvenir. La loi fixe un cap et une nécessité : Préserver la biodiversité française, notre capacité agricole et notre souveraineté alimentaire. Le point de départ ? La France est le pays qui a le plus artificialisé son sol depuis ces dernières décennies et par rapport au nombre d’emplois qu’il a créé au regard du nombre d’habitants hébergé. Toute la France est concernée. Donc, en théorie, on peut appliquer sur notre territoire l’objectif Zan au regard de l’activité économique développée des autres pays.»

Artificialisation du foncier en France
«Nous sommes à 135 hectares urbanisés par an –dont 30% dévolus au foncier économique- pour une quarantaine de communes, cependant ces chiffres sont valables sur l’ensemble vauclusien.»

Zan mode d’emploi
«Nous parlons désormais d’un nouveau modèle d’aménagement et de développement avec un objectif chiffré et une trajectoire, reprend Gilles Périlhou. Nous allons devoir regarder ce que nous avons consommé ces 10 dernières années à l’échelle régionale, des Scot, des EPCI et des communes et diviser par 2 la consommation d’espace dans les 10 prochaines années et à l’horizon 2031 parce que le compteur a démarré en août 2021. Et il faudra encore réduire la consommation d’espace dans les 10 ans suivants, en 2041, pour arriver à l’horizon 2050. Le Zan s’applique depuis août 2021 et nous devons nous y préparer maintenant tout en re-naturant les espaces urbanisés. Désormais il faut justifier de l’utilisation du foncier au regard des besoins économiques. Nous devons identifier les marges de manœuvre, pour réinvestir l’existant, ainsi que les espaces stratégiques.»

Injonctions contradictoires de développement et constat
«1er constat ? Le besoin foncier économique est réel. 67% des intercommunalités en France disent avoir refusé des implantations d’entreprise à cause du foncier. Plus grave, 70% d’entre elles estiment que les parcs d’activités économiques seront saturés d’ici 3 ans selon une étude de septembre 2022 réalisée par (l’ex-ADCF Association de collectivités locales de France) Intercommunalités de France où 700 EPCI sur les 1 200 qui existent en France ont répondu au questionnaire.»

La méthode ?
«Elle sera de bien identifier les besoins économiques et des entreprises pour développer une stratégie par filières : ce que l’on ne souhaite pas accueillir, ce que l’on souhaite accueillir et où.»

Connaître son potentiel foncier
«L’ère du développement économique par extension, par ouverture de zone à l’urbanisation, principalement sur des zones agricoles est terminée. Nous devrons identifier les sites considérés comme ‘mutables’, ‘stratégiques’, ou ‘recyclables’ pour une transformation et moins consommer d’espace. Les sites artificialisés aujourd’hui, sur lesquels le développement économique sera possible, existent mais sont peu identifiés et l’on manque de référence commune comme certaines zones d’activités et zones commerciales.»

Comment assurer l’équité territoriale ?
«Le Sraddet (Schéma régional d’aménagement et de développement durable et d’égalité des territoires) va définir les grands équilibres à l’échelle de la région et par espaces. L’aménagement des sites d’activité sera fait à partir de l’optimisation, de la mutualisation et de la densification. Les politiques foncières doivent être développées conjointement aux politiques d’urbanisme pour acquérir une maîtrise publique du foncier mobilisable et commercialisable,» a conclu Gilles Périlhou.

Fabrice Libérato

Fabrice Libérato, président du Scot du bassin de vie de Cavaillon-Coustellet-l’Isle-sur-Sorgue et porte-parole de l’Interscot comprenant les 8 Scot de Vaucluse
«Cette loi, nous la subissons. L’interscot a été formé en octobre 2021 et représente un triangle qui va de Montélimar à Arles pour rejoindre le Sud Vaucluse. Nous avons déterminé des enjeux sur nos spécificités et posé des constats. Les 8 Scots réunissent 21 EPCI, 357 communes et 940 000 habitants. Nous devrons faire face à nos voisins, comme Marseille qui est assez dévoreur de foncier. Si nous sommes pour des règles d’équité et d’égalité avec -50% de foncier nous voulons que cette règle s’applique pour toute la région. »

Le Sraddet
«Le Sraddet se divise en quatre espaces : l’espace Rhodanien avec nos 8 Scot, Alpin, Azuréen et métropole Aix-Marseille qui ne devra pas ‘bouffer’ les petits départements. Le Sraddet est un outil de proposition cependant la région pourra faire ce qu’elle veut. Pour autant d’autres territoires entreprennent également des projets d’envergure nationale ou internationale comme Iter, qui va consommer un foncier considérable, tout comme le port de Marseille, la ligne LGV (Lignes à grandes vitesses de France), dans ce cas que deviendront les autres projets ?»

A plusieurs on est plus forts
«Pour information, la Région Sud a demandé au gouvernement que ces projets ne soient pas inclus dans ces -50%-. Nous-mêmes à Cavaillon portons le projet de zone d’activité comme d’autres Scot et souhaitons que les investissements commencés puissent trouver leur réalisation. Ce qui m’interroge ? Nous sommes les seuls en Vaucluse à nous être réunis en Interscot pour porter notre voix et nos propositions. Ce n’est pas le cas ailleurs. Notre réussite ? Avoir su dialoguer entre technicien et élus pour nous comprendre ce qui nous permet, maintenant, d’être dans une position beaucoup plus affirmée que nos autres voisins Scot face à l’objectif Zéro artificialisation nette.»

Claude Bertolino

Claude Bertolino, directrice générale de l’Etablissement public foncier Paca
«Cela fait 20 ans que l’Établissement public foncier (EPF) intervient en transition foncière en Provence-Alpes-Côte d’Azur et que son espace géographique est resté inchangé. De 2014 à 2019 nous avons travaillé avec l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) sur les zones de concentration d’emploi. Nous avons constaté, nous aussi, que l’emploi n’était pas forcément dans les zones économiques et encore moins la concentration d’emplois. Cela nous autorise à une autre ambition en repensant le foncier et en recherchant l’optimisation comme la requalification des zones d’activité, ce sur quoi nous travaillons avec la Dreal (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement). »

Des milliards d’€
«Depuis 2017, nous avons abordé le recyclage foncier et notre Conseil d’administration a pris une disposition pour permettre que certaines recettes locatives viennent en minoration foncière lors d’utilisation transitoire. En novembre prochain, nous dépasserons les 2,5 milliards € d’engagement conventionnel actif sur l’ensemble du territoire Paca. Pour autant, la part des conventions en développement est de 293 milliards €, soit 12% du total d’engagement autorisé. La part des conventions en développement économique en Vaucluse est de 45,5 milliards € ce qui représente 15%.»

Les EPCI ont la main pour faire l’inventaire du foncier disponible
«J’attire votre attention sur l’article 220 de la lutte contre l’artificialisation des sols en adaptant les règles d’urbanisme qui est l’inventaire réalisé par les EPCI des ZAE sur l’artificialisation.»

Le Fonds friches d’Etat
«Également nous disposons d’un fonds friches de 3,5M€ par an ce qui fait 17,5M€ sur 5 ans, somme qui permet d’intervenir en minoration foncière en accompagnement éventuellement du Fonds friches de l’État dans le cadre de la loi de Finances en cours de débat et qui pourrait être pérennisée dans le cadre du fonds vert qui atteint les 2 milliards par an. En 2021, le Grand Avignon aura bénéficié, sur la friche Bordet (19 590m2, ancien commerce de gros spécialisé dans l’arrosage en zone industrielle de Fontcouverte fermé après 102 ans d’activité lors d’une  liquidation judiciaire en 2014), de 245 000€ qui ont permis la réalisation d’une opération de 3 sites dont de l’extension et de la création avec 3 500m2 de préemption. Le plan de relance permet de démonter à travers ces fonds friches qu’il est possible de faire autrement. Il ne faut pas faire que du logement, il faut aussi faire du développement économique.»

Courtine
«Nous allons intervenir sur la zone de Courtine, lors de son aménagement, identifier les sites de transformation prioritaire, sur les zones d’activité à repenser, protéger les rives du fleuve, nous procéderons à l’anticipation et à la gestion foncière car nous sommes actuellement sur de folles et inédites enchères dans la France entière. Nous ne pouvons pas enrichir ‘sans cause’ les propriétaires qui n’ont rien fait pour cela car ce serait une faute collective. L’industrie connaît un prix au m2 déterminé et l’on ne peut pas être en concurrence avec les bureaux, les commerces et les logements,» a conclu Claude Bertonlino, ouvrant une piste sérieuse d’adossement à un prix de référence du foncier.

Valérie Coissieux et Jean-François Cartoux

Jean-François Cartoux, secrétaire général adjoint de la Chambre d’agriculture
«Le département de Vaucluse est agricole et très présent dans l’agroalimentaire avec les céréales, vins, fruits et légumes et produits transformés. Le secteur représente 11 800 emplois, 4 854 exploitations et réalise 1,2 milliards de chiffre d’affaires. Nous sommes le jardin et le grenier de la France avec 115 000 hectares exploités. C’est un secteur phare également porté par la viticulture. La friche agricole reste un potentiel à exploiter. Pourquoi existe-t-elle ? C’est souvent lié à un parcellaire très morcelé, à l’héritage de petits maraîchages en périphérie de la ville ou lié à l’urbanisation. Il y a aussi de la rétention foncière liée à la possible plus-value en cas d’urbanisation. Également lorsqu’un exploitant agricole est exproprié il faut l’accompagner dans à sa réinstallation.»

Lire également : “La fin du village ?“

Valérie Coissieux, secrétaire adjointe de la CMAR (Chambre régionale Paca des métiers et de l’artisanat
«L’artisanat représente 24 000 entreprises en Vaucluse, soit 36%, autrement dit un tiers de l’économie marchande hors secteur de l’agriculture et 42 500 actifs. Les entreprises se développent et recherchent du foncier or, nous constatons des prix inaccessibles qui poussent les artisans à partir. Nous avons besoin que cesse cette désertification dans nos villes et aux abords et nous remarquons que le foncier réside aussi en cœur de ville. Les artisans ne veulent pas être oubliés.»

Christian Guyard

Christian Guyard, secrétaire général de la préfecture de Vaucluse
«La loi Climat et résilience s’emploie à maîtriser l’artificialisation des sols et à atteindre une sobriété foncière. Nous constatons que nos actions envers la nature ne sont pas adaptées si nous voulons adapter notre résilience à celle des générations futures : réchauffement climatique, destruction de la bio-diversité… Il est question de la préservation de notre environnement, de limiter les risques d’inondation par le ruissellement, de stocker de carbone dans les sols et de préserver le potentiel de production agricole. La loi va changer structurellement nos modes de vie et la gestion de l’espace. Elle doit permettre de limiter le temps et les coûts de transports, la facture énergétique, en favorisant la proximité entre logements, activités et services. Il s’agit de repenser notre rapport à l’urbanisme et à l’espace en général. La loi permettra aussi de limiter les coûts d’investissement et le fonctionnement des équipements publics.»

Un nouveau modèle d’aménagement
«C’est un nouveau modèle d’aménagement conjuguant sobriété foncière et qualité urbaine. Il y aura le recyclage des friches et locaux vacants tout en préservant et créant des surfaces de nature, notamment dans les villes denses, un besoin d’ailleurs démontré par la canicule. La loi fixe un cap avec à l’horizon 2031 de réduire la consommation de terre naturelles, forestières et agricoles et l’étalement urbain pour atteindre le zéro artificialisation nette des sols à l’horizon 2050.»

C’est déjà demain
«Une des mesures clefs de cette loi ? L’interdiction de création de nouvelles surfaces commerciales entraînant une artificialisation des sols. Une étude d’impact sera à fournir par le porteur de projet en ayant vérifié auparavant qu’aucune friche en centre-ville ou périphérie ne permet l’accueil du projet. Les différents documents d’urbanisme Scot (Schéma de cohérence territoriale), PLU (Plan local d’urbanisme), cartes communales devront intégrer ces mesures aux nouveaux objectifs : début 2024 pour le Sraddet (Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires), Août 2026 pour les Scot, Août 2027 pour les PLU et cartes communales. La concertation sera essentielle à ce projet ambitieux.»

Le Vaucluse connaît une forte dynamique d’étalement urbain
«En Vaucluse –qui comprend 352 000 hectares- a, entre 2011 et 2021, consommé 2 288 hectares dont 23% pour des activités et 70% pour l’habitat. Cela représente 16% de la consommation régionale pour 11% de la population. Les surfaces économiques et commerciales représentent 22% des surfaces artificialisées contre 14% à l’échelle nationale. Ces chiffres nous imposent peut-être plus qu’ailleurs d’agir et d’assurer la bonne réalisation des objectifs de la loi Climat et résilience. Cela passera par une approche partenariale en lien avec, notamment, les collectivités,» a conclu Christian Guyard.

L’Etat du foncier et les chiffres en Vaucluse
Le foncier économique représente 30% des emplois localisés en ZAE.

Des chiffres vauclusiens qui interpellent

L’emploi en ZAE
1 emploi sur 3 est présent dans les ZAE (zones d’activités économiques) vauclusiennes. La plupart des emplois se situe dans le tissu urbain, seulement 1 tiers sur les zones d’activités. Sur 216 000 emplois en Vaucluse 70 000 sont regroupés dans les zones d’activités et 140 000 en dehors. Le nombre d’emplois par hectare en zone d’activité en Vaucluse est de 9 ; en région c’est de 13 emplois par ha. Les ZAE de Vaucluse représentent 1% de la superficie du département –chiffre qui n’a pas évolué depuis 2013- et regroupent 31% des établissements et employeurs les plus importants.

Que veut dire potentiel foncier ?
Il s’agit de terrains non bâtis au sein des ZAE et du foncier en extension. Il peut présenter certaines contraintes à dépasser avant sa commercialisation comme l’accès et la viabilisation ; il s’agit également de dents creuses bâties ou non bâties.

Combien de potentiel d’hectares fonciers ?
Plus de 1 000 ha sont actuellement disponibles au sein des 200 espaces économiques dont 600 ha en extension dans des zones à urbaniser et 410 ha au sein des ZAE.

Quelle est la surface cumulée de foncier économique en cours de commercialisation ?
Elle est de plus de 230 ha dont 187 ha fléchés sur un domaine d’activité : tertiaire, logistique, naturalité et aéronautique, 43 ha ne sont pas thématisés. En Vaucluse 31% du foncier économique est fléché logistique, 22% naturalité, 40% dont 20% en tertiaire et équipement public et autant en non thématisé, enfin 7% en BTP, aéronautique et artisanat. Quant aux entreprises qui optimisent leur potentiel constructible sur leur terrain, elles sont 51%. Reste qu’un professionnel sur 2 est insatisfait de son implantation. En cause ? Le manque de place sur le site, l’inadaptation des locaux à l’activité, leur vétusté, le problème de cohabitation avec le voisinage. Enfin, 63% des entreprises déclarent un projet foncier ou immobilier. La typologie des biens recherchés par les entreprises ? Le terrain à bâtir. Le principal critère de choix restant le prix.

Une salle très attentive

Dans l’amphithéâtre, ni bruits ni chuchotements
90 personnes environ étaient présentes sur les 150 invités. Alors que la salle devait afficher complet, la grève générale –dont le train-, la pénurie de carburant, le retour du Covid et les embouteillages matinaux ont eu raison des bonnes intentions cependant que le lieu accueillait nombre de maires, d’urbanistes, et de techniciens de collectivités territoriales, d’EPCI (Établissement public de coopération intercommunale), responsables de développement économique et entrepreneurs. Alors que le sujet était plutôt ardu, la qualité d’écoute de la salle, dans un silence concentré, était bien présente durant ces 4 heures d’explications et de témoignages.

Environ 90 personnes étaient présentes

(Vidéo) Zéro artificialisation nette, Le Sénat protège les collectivités

L’Etat veut interdire toute consommation nouvelle de terre pour construire, d’ici 2050. L’artificialisation, réalisée majoritairement dans des petites communes de moins de 2000 habitants, va donc empêcher les français de vivre dans leur maison, sur un bout de terrain. Ce projet de ‘zéro artificialisation nette’ veut mettre un coup d’arrêt à l’exode urbain, en faisant flamber le prix du foncier. Il met le feu aux poudres au Sénat qui découvre une loi laissant les maires sans moyens, ni confiance, pour conjuguer développement et sobriété foncière. Jean-Baptiste Blanc sénateur LR du Vaucluse et rapporteur spécial de la commission des finances sur les crédits du logement et de l’urbanisme s’est emparé du sujet.

Parler du réel est devenu chose très difficile. Notre démocratie ne vit plus qu’avec des leçons de morales à quatre sous, des sujets montés en épingle par des groupes de pression, d’une vision aristocratique de la citoyenneté privant les gens de tout droit à la parole, forcement divergente – au sens d’Orwell – si elle ne s’inscrit pas dans le corset du discours technocratique qui a remplacé la pensée, et par conséquent, toute forme de débat.
Dernier exemple en date, voici la ‘zéro artificialisation nette’ des sols qui prétend densifier l’habitat, mieux utiliser les espaces réputés vacants et rendre au sol ses fonctions naturelles en les ‘renaturant’.

Qui pourrait donc bien s’opposer à une telle proposition, consistant à sauver la planète ?
Au départ, une excellente idée, comme on les aime en classe de sixième, où, après mûres délibérations, l’on convient que l’on est tous pour la paix (et contre la guerre).
Qui pourrait donc bien s’opposer à une telle proposition, consistant à sauver la planète ?
Mais à l’arrivée, cetteloi Zéro artificialisation nette (ZAN) enterre, à jamais, le rêve intime français, décrit en son temps par Voltaire : vivre dans sa maison, sur un lopin de terre à soi que l’on peut cultiver à son aise. C’est fini, et c’est prévu pour 2050.

Le ZAN sur-métropolise la France et punit la ruralité
Une partie des sénateurs sont vent debout contre les décrets d’application de cette loi, publiés le 29 avril dernier, comme l’explique Jean-Baptiste Blanc sénateur LR et rapporteur spécial de la commission des finances sur les crédits du logement et de l’urbanisme. « Après avoir fait une trentaine de déplacements dans notre pays, les élus sont en ébullition sur ce sujet. Que disent-ils ? Que le ZAN sur-métropolise la France, punit notre ruralité, que l’Etat abandonne tout le monde puisqu’il n’y a aucune ingénierie prévue pour atteindre les objectifs annoncés (…) Ils reprochent au gouvernement de revenir sur la loi alors que nous avions voté une territorialisation, demandé que l’on tienne compte, par exemple, de la trajectoire des élus qui sont dans la sobriété foncière et que l’on fasse tout simplement confiance aux élus au travers des schémas de cohérence territoriale d’urbanisme (…). Personne ne comprend pourquoi le gouvernement retranche tout cela à la loi ».

Comment tout ça a commencé ?
Avril 2021, la ministre du logement Wargon claironne fièrement dans les médias que l’habitat individuel n’a plus d’avenir en France, non sans créer la polémique : elle vit à Saint-Mandé dans une maison de 150 m2 estimée à 1,5 M€ (2,2 selon la moyenne de ‘Meilleurs Agents’), dans une ville très cossue qui ne respecte pas le quota de construction HLM. « Si la ministre a choisi Saint-Mandé et pas une autre ville, c’est qu’elle est venue y trouver un cadre de vie résidentiel, luxuriant, un urbanisme maîtrisé et une ville proche de Paris. Elle ne peut pas fustiger les villes qualifiées de « riches qui ne veulent pas de HLM” et en même temps, habiter un joli pavillon», lâchait le maire LR de Saint-Mandé. (Source : Le Figaro immobilier).
Voilà pour l’ambiance bobo « faites ce que je dis mais pas ce que je fais ».

Une urgence pour les maires et les sénateurs
Le 29 juin 2022, le sénateur Blanc publie un rapport, suivi d’une conférence de presse alertant les maires. Ces élus pour qui « le choix de l’urbanisme est le plus important de leur mandat » devront faire fissa pour affronter cette « révolution à bas bruit ». Ils ont jusqu’au 22 octobre prochain pour faire des propositions au gouvernement : le 6 juillet, près de 1 250 contributions des maires étaient parvenues au Sénat pour expliquer ce qu’ils reprochent à ce texte qui « impose le modèle de construction de la ville sur la ville (…) C’est l’Etat profond qui a tout décidé de façon orthogonale, et ce sera Gilet jaune multiplié par deux au bout » prédisent Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances, Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques et Jean-Baptiste Blanc qui sont unanimes à la conclusion de cette conférence de presse : c’est bien un « zéro pointé net, sans rature ni bavure » qu’il adressent au projet zéro artificialisation nette.

Retrouvez ici la vidéo de la table-ronde de la commission des affaires économiques du Sénat du 27 juillet dernier sur le sujet de la zéro artificialisation nette à laquelle a notamment participé le sénateur Vauclusien Jean-Baptiste Blanc.

Que peut-on reprocher à ce texte, en l’état du paysage constructif actuel ?
Pourquoi la loi parle d’artificialisation et non d’imperméabilisation des sols – une notion qui a le mérite d’opérer une distinction simple entre ce qui est naturel et ce qui ne l’est pas – comme on le fait par exemple en Allemagne ? Parce qu’il faut bien exagérer, sans en avoir l’air, un phénomène dont il faut connaître les limites. Détaillons tout ceci :

  • Actuellement, ‘l’artificialisation’ des terres reste modeste à l’échelle nationale : les 36 millions de logements qu’occupent les Français se concentrent sur 4 % du territoire national. 
  • Alors même qu’il conviendrait d’inciter à la végétalisation des espaces urbanisés, la loi inclut les parcs et jardins parmi les surfaces artificialisées (eh oui !), ainsi que « toute opération d’aménagement pouvant entraîner une imperméabilisation partielle ou totale, afin de les affecter notamment à des fonctions urbaines ou de transport » : habitat, activité, commerces, équipement publics…
  • En France, 200 kilomètres carrés seraient ainsi ‘artificialisés’, soit quatre fois plus que ne le justifierait la croissance officielle de la population. On parle donc de 150 kilomètres carrés en trop, à récupérer sur les friches industrielles, mais aussi sur les parcs et jardins publics ou même les potagers privés. Juste pour se rendre compte : 200 kilomètres carrés, c’est la surface détruite par les incendies de Gironde, en une semaine, au mois de juillet, en grande partie grâce aux écologistes qui s’opposent à la gestion des milieux naturels.

‘L’artificialisation’ est donc la rencontre d’une idéologie globalement anti Gilets jaunes et d’intérêts financiers qu’il ne faut pas être grand clerc pour désigner : les promoteurs d’une ‘smart city’ qui construit toujours plus haut des logements toujours moins grands. Et puis, il y a ces Français indécrottables, dont on ne sait que faire, en rupture avec le rêve banlieusard des ‘intellectuels’ des années 60, porté par l’emblématique architecte Roland Castro.

Rien de neuf, pourtant : au sortir de la seconde guerre mondiale une enquête de l’Institut national d’études démographiques (Ined) montrait que 72% plébiscitaient la maison isolée avec jardin. Les enquêtes, après les années 2000, aboutissent à des taux de préférence pour la maison individuelle dépassant les 80%.

Pourquoi donner aux gens ce qu’ils veulent en l’organisant ? Ce serait la Démocratie. Sortons un moment du fameux ‘cercle de la Raison’ qui sait, mieux que nous, ce qui est bon pour nous. Qu’adviendrait-il, si la totalité des ménages résidaient dans une maison construite sur une parcelle de 1 000 m2, soit à peu près la taille actuelle des habitations dans les zones péri-urbaines ? ‘L’artificialisation’ du territoire serait alors seulement de 10% du territoire, note le rapport Blanc.

A lire aussi : “La fin du village?“

Quel sont les premières victimes de cette loi ?
Entre 2000 et 2018, les prix des logements anciens et neufs en France métropolitaine ont augmenté de 115 %. Durant cette période, le coût de la construction n’a progressé que de 50 %.
La hausse des prix des logements serait donc expliquée en grande partie par la hausse des prix des terrains, constatait Notaires de France, dans une étude d’avril 2020. 
Jean-Baptiste Blanc évalue l’enjeu pour les années à venir. « Les Français sont très attachés au modèle de la maison individuelle avec terrain, qui reste souvent, à distance des centres villes, le seul mode de logement accessible aux classes moyennes modestes. Celles-ci risquent d’être les premières victimes de la limitation de l’accès au foncier qui en renchérira le coût dans les années à venir ».

Les collectivités doivent pourtant satisfaire la demande de logement des habitants qui ne veulent plus vivre dans des grandes villes – durablement endettées et mal gérées à cause du clientélisme électoral – de plus en plus violentes et plus chères (taxes foncières, stationnement, interdiction de circuler).
Entre 2009 et 2020, la moitié de l’artificialisation nouvelle des espaces naturels, agricoles et forestiers a eu lieu dans des communes de moins de 2 000 habitants, qui ne regroupent pas moins d’un quart de la population.

C’est cet exode urbain, vers ces communes paisibles, que le gouvernement veut arrêter à tout prix. « Il font tout pour que la richesse reste là où elle est », acquiesce Jean-Baptiste Blanc, soulignant un mouvement de fond. « Les gens ont découvert le télétravail lors des confinements et voient que l’exil urbain est possible avec le très haut débit numérique ».

Le sénateur vauclusien a sillonné la France pour aller à la rencontre des élus des territoires afin d’expliquer les enjeux de la la loi ‘zéro artificialisation nette’

Un défi impossible à relever
L’adjectif ‘nette’ dans l’objectif ‘zéro artificialisation nette’, fait référence à la possibilité de compenser l’artificialisation d’une surface par la renaturation d’une autre surface.
C’est un tour de passe-passe, et personne ne sait comment le réaliser. Encore moins nos petites communes qui n’ont pas les moyens financiers de faire face à l’incroyable flambée du foncier qui s’annonce. « La transformation d’un sol artificialisé en sol naturel est particulièrement difficile, surtout avec l’objectif de recréer un sol qui offre les mêmes services qu’un sol naturel ».
Le rapport Blanc explique aussi que, « selon France Stratégie, le coût de la renaturation d’un sol artificialisé, après dépollution, “ de-imperméabilisation” et construction d’un ‘technosol’ est de 95 à 390€ par mètre carré, coût auquel il faut ajouter celui de la déconstruction ».

Faisons le calcul pour un terrain de 1 000 m2 : 240 000€, en moyenne, auxquels il faudra ajouter le prix initial du terrain. Quel particulier pourra bien y construire une maison pour sa famille ? Les particuliers n’auront d’autre choix que de se positionner sur un parc immobilier à prix d’or, dans la moindre campagne poisseuse. Les libérations de terrain ne profiteront donc qu’aux grands opérateurs privés et aux collectivités qui en ont les moyens, sans possibilité de renaissance des espaces ruraux.
La feuille de route est prête : « dès les dix prochaines années, la consommation totale d’espace observée à l’échelle nationale entre 2021 et 2031 devra être inférieure de moitié à celle observée lors des dix années précédentes ».

Contractualiser avec des moyens
L’opposition, représentée par les trois sénateurs de la commission, veulent remplacer l’élément de langage ‘zéro artificialisation’ par celui de ‘modération foncière’ : il serait alors possible de revoir l’objectif à l’aune de chaque territoire, en tenant compte de la demande sociale et des intérêts économiques locaux. Mais aussi de dégager des lignes budgétaires et fiscales adéquates – au moins un milliard – pour créer un guichet unique proposant un service d’ingénierie aux communes qui en ont le plus besoin, en instituant un comité d’observation pour suivre le sujet. Le gouvernement a pour l’heure annoncé un fonds de recyclage des friches de 650M€ en mai dernier. « Nous préparons pour début octobre un texte unifié pour LR afin d’obtenir plus de moyens, mais aussi de permettre la contractualisation des objectifs en laissant aux Régions les schémas, mais pas les règlements. Les élus sont de bonne foi. Ils constatent, comme tout le monde, les abus que l’on voit sur les littoraux, et même chez nous, sur certaines zones du Grand Avignon par exemple. Ils sont par conséquent d’accord avec l’idée de ‘renaturer’, mais pas de payer les pots cassés en s’alignant sur une vision technocratique du ‘tout environnemental’, une culture d’énarques qui a le monopole de l’intérêt général et sur l’idée qu’il y a Paris et le désert français se transformant en ville à l’américaine. Il y a donc un juste milieu à trouver en permettant le développement local et regardant ce qu’on peut faire en fonction de la pression foncière. Pour cela, il faudrait en réalité une refonte de la fiscalité qui récompense les élus vertueux. Le sujet est donc loin d’être épuisé pour aboutir à ses objectifs initiaux ».

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