À l’arrêt depuis décembre 2022, l’authentique locomotive Mallet 403 mise en service pour la 1re fois en 1903 a officiellement repris du service mardi 1er juillet sur la ligne du Chemin de fer du Vivarais. Les touristes peuvent donc à nouveau vivre l’expérience unique d’un voyage à vapeur à travers les paysages spectaculaires des Gorges du Doux, à bord d’un train tractée par une machine classée monument historique.
Mardi 1er juillet dernier. 12h00 tout pile. Comme prévu. Comme vendu. Après de très long mois d’attente et une restauration minutieuse de la plupart de ses organes vitaux à commencer par sa chaudière tubulaire sortie tout droit de l’imagination d’un certain Marc Seguin à la fin des années 1820, la locomotive Mallet 403 entre sous un soleil écrasant en gare de Lamastre dans un petit panache de fumée.
Mise en service pour la 1re fois en 1903, la vénérable grand-mère n’a pas fait ce voyage seule puisqu’elle a parcouru en un peu plus d’une heure et demi les 28 kilomètres qui séparent la gare d’arrivée de son point de départ (Saint-Jean-de-Muzols) avec 5 wagons attelés à ses basques dont un dédié uniquement au transport des vélos, ce qui représente tout de même un ensemble de près de 200 tonnes.
Perpétuer le train de l’histoire à travers le temps et l’Ardèche
Sans doute ne le savaient-ils pas au moment d’embarquer mais les déjà très nombreux touristes qui ont décidé ce jour-là de découvrir les Gorges du Doux à bord du petit Train de l’Ardèche viennent de vivre un moment historique. Totalement muette depuis décembre 2022, la Mallet 403 vient en effet de retrouver de la voix et par la même occasion, de renouer avec sa vocation originelle : assurer une desserte du plateau ardéchois depuis la vallée du Rhône. « La locomotive Mallet 403 incarne plus qu’un patrimoine technique. Elle est le témoin d’un siècle d’histoire ferroviaire ardéchoise. Sa remise en route moyennant un investissement de 287 000€ illustre l’engagement de la société Train de Ardèche en faveur de la préservation et de la transmission de ce riche héritage », a rappelé Kléber Rossillon qui exploite le site et donc le matériel roulant depuis 2013. Tout commence en réalité en 1886 quand est signée la déclaration d’utilité publique autorisant la création d’une ligne ferroviaire entre Tournon et Lamastre. L’exploitation en sera confiée à la société CFD (Compagnie des Chemins de Fer Départementaux) créée, elle, en 1881. Cinq ans de travaux mobilisant près de 1 000 ouvriers seront nécessaires pour poser les 28 premiers kilomètres de voies à flanc de montagne mais aussi pour construire 9 kilomètres linéaires de murs de soutènement, huit viaducs et un tunnel, le tout bien sur à la seule force des bras. Inaugurée en 1891, la ligne qui connait un franc succès – notamment parce qu’elle est utilisée pour transporter du public mais aussi des marchandises comme du bois ou bien encore du bétail- sera prolongée quelques années plus tard jusqu’au Puy-en-Velais (Préfecture du département voisin de la Haute-Loire) et desservira au passage les villes du Cheylard, de Saint Agrève et d’Yssingeaux, ce qui représente 200 kilomètres. Le trafic de passagers et le volume de fret ne cessant d’augmenter et les distances de se rallonger, l’utilisation de nouvelles motrices , à la fois plus puissantes (400CV) et plus maniables car articulées, s’impose. C’est dans ces conditions que vont être déployées une quinzaine de locomotive Mallet telles que la 403 (l’une des toutes dernières encore en vie), spécialement construites en Suisse pour le Chemin de fer du Vivarais. Le développement du réseau routier va progressivement sonner le glas de l’activité ferroviaire en Vivarais à la fin des années Soixante telle qu’on la connaissait jusqu’alors. Sous l’égide d’une association, l’exploitation de la ligne et du matériel va progressivement reprendre jusqu’en 2008 avant d’être confiée à un acteur privé, qui, accompagné de ses 25 collaborateurs, gère depuis l’activité avec un certain…entrain. Informations complémentaires et achat des billets sur les sites : www.trainardeche.fr ou www.velorailardeche.com

113 000 soit le nombre de visiteurs qui, en 2024, ont fait une croisière ferroviaire avec le Train de l’Ardèche à travers les Gorges du Doux, entre Saint-Jean-de-Muzols et Lamastre. Sur la même période, 52 000 personnes ont affûté leurs mollets à bord du vélorail.
Un train d’activités pour rester sur les bons rails
Sélectionné en 2011 parmi plusieurs candidats pour assurer la relance de l’activité, le groupe Kléber Rossillon (également gestionnaire sur notre territoire de la Grotte Chauvet 2 et de la Tour de Crest est-il bon de rappeler) a développé de nombreux produits autour du « Mastrou » et cela, même si les paysages traversés et les communes desservies valent, à eux seuls, de vivre l’expérience.
Le monde du cinéma ne s’y est d’ailleurs pas trompé. À l’image de François Truffaut, Bertrand Tavernier, Jean Becker et Josée Dayan, notamment, nombreux sont les metteurs en scène à avoir choisi, sur les conseils de leur chef-décorateur, d’y planter leur caméras pour y tourner quelques scènes. Des longs métrages comme Le Juge et l’assassin, Les enfants du marais, Knock, Arsène Lupin, Les Cracks ou bien encore Verlaine et Rimbaud comportent plusieurs scènes tournées ici. Emprunter le Train de l’Ardèche et parcourir la vallée du Doux permet aux visiteurs d’inscrire leurs pas dans ceux de Bourvil, Michel Galabru, Benoît Magimel, Omar Sy, Romain Duris, Kristin Scott-Thomas, André Dussolier, Jacques Villeret, Michel Serrault, Jacques Gamblin ou bien encore Jean Rochefort mais pas que.

En plus d’accueillir régulièrement des équipes de tournage, plusieurs voyages thématiques (et gustatifs pour certains) ont ainsi été mis en place à destination des touristes par le gestionnaire du site. Citons le train de la bière axé sur la zytologie, le train du sommelier (événement labellisé Vignes et Découvertes animé par un œnologue ), le train western qui permet de redécouvrir ce que fut la conquête de l’Ouest au temps des cow-boys et des indiens ou bien encore le train Fantôme avec son énigme à résoudre sans oublier le train des lumières destinés aux amateurs de coucher de soleil et le train des fêtes, spécialement illuminé, qui circule, lui, uniquement en période de Noël. Les amateurs de petite-reine peuvent eux utiliser le cyclo-train et partir ainsi à la découverte de l’Ardèche depuis Lamastre protégés des gaz d’échappement en utilisant pour cela les anciennes lignes désaffectées reconverties depuis en voie douce comme par exemple la dolce via. La pratique du vélo-rail est en effet également proposée. Les visiteurs prennent place à bord de vélorails à l’aspect rétro spécialement conçus et réalisés par un artisan local. 5 personnes peuvent prendre place à bord de ces engins adaptés aux enfants de moins de 4 ans. La montée jusqu’au village de Boucieu-le-roi (village de caractère qui tire son nom de son illustre fondateur, Philippe le Bel) s’effectue à bords d’autorails restaurés. Plusieurs parcours permettent ensuite de découvrir les richesses naturelles et architecturales de la vallée du Doux , trait d’union entre la Vallée du Rhône et le Massif central avec de surprises à chaque virage.
Frédéric Rolland (Echo Drôme-Ardèche), membre du Réso Hebdo Eco
